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Au Festival du Nouveau Théâtre Populaire, Margaux Eskenazi lève le voile sur « Les Jeunes Filles du Bon Pasteur »

À la une, Théâtre
Margaux Eskenazi crée Les Jeunes Filles du Bon Pasteur au Festival du Nouveau Théâtre Populaire
Margaux Eskenazi crée Les Jeunes Filles du Bon Pasteur au Festival du Nouveau Théâtre Populaire

Photo Guillaume Gozard

Entre une Nuit de Madame Lucienne en demi-teinte et un Roi nu carnavalesque en diable, la metteuse en scène a livré un spectacle-enquête délicat et politique qui a enchanté le public de la XVIIe édition du Festival du Nouveau Théâtre Populaire.

« Ce spectacle a bien failli ne pas avoir lieu. » Loin, et c’est heureux, de faire comme si de rien n’était, les membres de la troupe du Nouveau Théâtre Populaire (NTP) ont par trois fois, comme autant de soirs de première de la XVIIe édition de leur festival annuel, qui se tient du 12 au 28 août dans leur base arrière de Fontaine-Guérin (Maine-et-Loire), fait allusion à la menace qui, ces derniers mois, n’a cessé de planer au-dessus de leurs têtes. Déjà fragile, l’équilibre économique de cette aventure théâtrale hors du commun, auréolée, cette année, du Grand Prix de l’Accès à la Culture de la Fondation Charles Defforey – Institut de France, a sérieusement vacillé lorsque la Région Pays de la Loire, présidée par Christelle Morançais (Horizons), a annoncé son désengagement financier unilatéral et occasionné un trou dans la caisse suffisamment substantiel pour mettre un terme pur et simple à cette odyssée ô combien précieuse. Heureusement, grâce au soutien combiné des collectivités locales – le département du Maine-et-Loire, Les Bois d’Anjou, Mazé-Milon, La Ménitré, Beaufort-en-Anjou, Entente-Vallée et la Communauté de communes Baugeois-Vallée –, de l’Association des Amis du Nouveau Théâtre Populaire et des Trublions de Jarzé, cette édition 2025 a finalement pu être sauvée « in extremis », au prix de quelques aménagements. Tandis que la grille de tarification libre débute désormais à 10 euros, contre 5 jusqu’à présent, la création de l’un des deux spectacles jeune public, Le Baron perché, a été remplacée par une reprise de La Reine des neiges. En parallèle, la venue, un temps annoncée, des deux patrons du Munstrum, Louis Arene et Lionel Lingelser, pour mettre en scène Le Roi nu d’Evgueni Schwartz a été annulée en raison d’un « empêchement », et c’est Lazare Herson-Macarel qui, à la volée, a repris le flambeau. Pour autant, la troupe du NTP n’a pas totalement renoncé à ce qui constituait l’un des marqueurs forts de cette XVIIe édition : inviter un artiste extérieur au collectif – qui, en théorie, fonctionne en vase clos – à venir pour la première fois présenter son travail. Et c’est à Margaux Eskenazi qu’a été confiée cette lourde charge, qui, à l’épreuve des planches, s’est transformée en passionnante réussite.

Au lieu d’aller piocher dans le répertoire, la metteuse en scène a, comme elle le fait depuis plusieurs années, été fouillée dans le réel historique pour y dénicher une puissante source d’inspiration. En découvrant le documentaire Mauvaises filles, réalisé par Emerance Dubas en 2022, Margaux Eskenazi a décidé de s’intéresser aux parcours et au combat de femmes qui, toutes, ont passé un fragment de leur adolescence au sein de la Congrégation du Bon Pasteur. Fondée en 1835 à Angers, cette institution, qui, en 1955, comptait 43 maisons à travers toute la France, a accueilli jusque dans les années 1980 ce qu’on appelait des « filles de justice », soit des mineures de 14 à 18 ans considérées comme « déviantes » ou simplement « difficiles », susceptibles, arguait-on souvent fallacieusement, de tomber dans la délinquance ou la prostitution. Placées par des juges aux affaires familiales, parfois à la demande expresse des parents en vertu de l’estomaquant « droit de correction paternelle », ces jeunes femmes devaient alors être « rééduquées » à coups d’études et de prières par les religieuses qui les encadraient. À ceci près que, à en croire les nombreux témoignages qui ont fleuri au cours des 20 dernières années, cette mission de rééducation, déjà problématique dans son principe, avait l’allure d’une entreprise de redressement, avec son lot de châtiments corporels et psychologiques, de travaux forcés pour des sociétés clientes en quête d’une main-d’oeuvre bon marché, de mises à l’isolement, de tentatives d’emprise psychologique, de recherches de négation du féminin, mais aussi de privations et d’humiliations en tous genres. Une sorte d’affaire Bétharram avant l’heure, fondée sur la violence systémique d’une institution hors de tout contrôle.

Pour retricoter les fils de cette histoire, et de ses dommages, Margaux Eskenazi s’est appuyée sur une collection de ressources – des entretiens avec d’anciennes pensionnaires, telles Marie-Christine Vennat et Eveline Le Bris ; l’expertise de l’historien et co-auteur de Cloîtrées. Filles et religieuses dans les internats de rééducation du Bon-Pasteur d’Angers (1940-1990), David Niget ; Le Passe-Peine d’Albertine Sarrazin ; le procès du Bon Pasteur qui s’est déroulé à Nancy en 1903 ; mais aussi le téléfilm Les Diablesses réalisé en 2007 par Harry Cleven – qui explique la richesse de son travail, à la lisière entre réalité documentaire et fiction inspirée de faits réels. Car, au-delà du traumatisme vécu dans leur jeunesse par ces femmes, dont les détails, de l’eau du « sceau des tintins » utilisée pour nettoyer le sol aux croix de langue exécutées de force à même le sol, en passant par les gifles, la bouse de vache étalée sur le visage ou les journées de 10 heures de travail sans aucune rémunération, sont sidérants, la dramaturge et metteuse en scène met en lumière le cheminement mémoriel des victimes qui, après plusieurs décennies d’amnésie traumatique, veulent aujourd’hui obtenir justice et réparation. Délicat, jusque dans la préhension de la parole des témoins dont, grâce à l’utilisation de leurs voix pré-enregistrées, elles ne sont jamais totalement dépossédées, Les Jeunes Filles du Bon Pasteur ou les sacrées nanas apparaît également comme un spectacle résolument politique dans sa façon de s’attaquer aux ravages de la violence patriarcale, qui, en l’espèce, trouvait un relais diligent dans l’institution ecclésiastique, mais s’imposait, et s’impose encore, comme un mal beaucoup plus systémique.

Lazare Herson-Macarel monte Le Roi nu d'Evgueni Schwartz au Festival du Nouveau Théâtre Populaire

Photo Guillaume Gozard

Politique, Le Roi nu d’Evgueni Schwartz – qui fait décidément florès cet été après la mise en scène que Sylvain Maurice en a présentée au Théâtre du Peuple de Bussang –, dont Lazare Herson-Macarel a hérité, l’est, malgré son genre bien différent, tout autant. Écrite en 1934, inspirée de trois textes d’Andersen – Les Habits neufs de l’empereur, Le Porcher et La Princesse au petit pois –, la pièce de l’auteur russe, sous ses allures de conte féérique, entend redonner au peuple le pouvoir de se débarrasser des dirigeants autocratiques et idiots qui le gouvernent. Satire politique s’il en est, visant à alerter sur la montée des totalitarismes et le danger que représente le régime nazi alors en place, Le Roi nu se veut paradoxalement gai, joyeux et enlevé, et c’est sur cette pédale que Lazare Herson-Macarel a décidé d’appuyer. Sans avoir recours aux masques qu’auraient, à n’en pas douter, utilisés Louis Arene et Lionel Lingelser, le metteur en scène livre une version carnavalesque en diable, où les personnages sont autant de figures caricaturales, capables, une fois assemblées, de se moquer du pouvoir et de ceux qui le soutiennent, et creusent son tombeau à force de déférence aveugle. Du rideau rouge aux éléments de décor en carton-pâte, il joue à plein la carte du théâtre, dans ce qu’il peut avoir de plus brut et de plus efficace pour faire rire, grincer des dents et ouvrir les yeux et les consciences. Si, au soir de la première, l’ensemble manquait parfois de ce rythme capable d’enflammer sans discontinuer le plateau, la composition musicale de Teresa Silveira Machado – et son entêtante ritournelle qui célèbre, en forme de pied de nez, l’amour d’Henri et Henriette – et la performance de l’ensemble des comédiennes et comédiens, à commencer par Léa Guillemet, impayable en Princesse à la mode Beth Ditto, font suffisamment mouche pour exploiter toute la malice dramaturgique d’Evgueni Schwartz et révéler la puissance de son propos à double détente qui, s’il valait pour hier, vaut sans doute encore pour aujourd’hui.

À l’inverse, on regrette que le spectacle qui, sur le papier, promettait la soirée la plus endiablée de cette XVIIe édition du Festival du Nouveau Théâtre Populaire soit resté le plus sage. Mise en scène par Frédéric Jessua – qui avait récemment fait recette en montant une vraie-fausse pièce de Shakespeare, Tout est bien qui finit bien, au Théâtre 13 –, La Soirée de Madame Lucienne de Copi avait tout pour transformer le plateau de Fontaine-Guérin en laboratoire échevelé, dopé au jeu de poupées russes métathéâtral imaginé par l’auteur franco-argentin. Las, La Comédienne, Le Machiniste et L’Auteur, bientôt rejoints par Vicky Fantomas dans cette vraie-fausse répétition d’une pièce aux accents cosmogoniques, qui prend progressivement la tournure d’un vrai-faux polar, n’auront pas réussi à faire turbuler la scène. Tout se passe comme si, en tenant la bride du texte un peu trop courte et en ne jouant pas pleinement la carte du travestissement et du plein délire, Frédéric Jessua avait mis des grains de sable dans la dynamique dramaturgique pourtant bien huilée de Copi, et ne parvenait pas à enclencher sa dynamique irrésistiblement comique. En manque d’une lecture qui leur aurait permis de mieux s’emparer du double, voire du triple fond, du discours de Copi, les comédiennes et les comédiens, encore un peu verts au soir de la première, peinaient à donner une épaisseur à cette brochette de personnages pourtant hauts en couleur – que Thomas Jolly avait d’ailleurs précisément su activer lors de son arrivée à la tête du Quai d’Angers –, qui, sous leurs airs de ne pas y toucher, peuvent, à leur corps défendant, être vus comme les prophètes de la mort du théâtre, ou, à tout le moins, d’un certain théâtre – comme un clin d’oeil précurseur au Yannick de Quentin Dupieux. En ces temps plus que troublés, l’actualité était toute trouvée.

Vincent Bouquet – www.sceneweb.fr

Les Jeunes Filles du Bon Pasteur ou les sacrées nanas
Écriture Margaux Eskenazi d’après les improvisations de l’équipe d’interprètes (Esse Que Éditions)
Conception et mise en scène Margaux Eskenazi
Avec Leslie Bouchet, Lazare Herson-Macarel, Elsa Grzeszczak, Kenza Laala, Julien Romelard, Teresa Silveira Machado
Dramaturgie Lazare Herson-Macarel
Conseiller historique David Niget
Création costumes Loïse Beauseigneur, Zoé Lenglare
Habillage Angèle Glise, Zoé Lenglare
Création son Lucas Soudi
Composition musicale Teresa Silveira Machado
Régie Marco Benigno, Thomas Chrétien, Lucas Soudi, Victor Veyron
Assistante à la mise en scène Cordélia Monge

Production Nouveau Théâtre Populaire
Avec le soutien du Jeune Théâtre National, de l’Association des Amis du Nouveau Théâtre Populaire, des Trublions de Jarzé, de la commune de Loire-Authion, du collectif intérieur moquette, du Quai-CDN d’Angers, de D::Light et l’engagement de l’Anjou Vert Communauté

Le Nouveau Théâtre Populaire est subventionné par le ministère de la Culture – DRAC Pays-de-la-Loire, le département du Maine-et-Loire et l’Entente-Vallée (Les Bois d’Anjou, Mazé-Milon, La Ménitré, Beaufort-en-Anjou) et artiste associé au Quai-CDN d’Angers et à La Criée-CDN de Marseille.

Durée : 1h50

Festival du Nouveau Théâtre Populaire, Fontaine-Guérin
du 13 au 27 août 2025

Le Roi nu
Texte Evgueni Schwartz
Traduction André Markowicz (Les Solitaires intempestifs)
Adaptation et mise en scène Lazare Herson-Macarel
Avec Marco Benigno, Valentin Boraud, Leslie Bouchet, Robin Causse, Elsa Grzeszczak, Léa Guillemet, Frédéric Jessua, Kenza Laala, Julien Romelard, Claire Sermonne, Teresa Silveira Machado
Scénographie Robin Causse
Construction décor Marco Benigno
Création costumes Loïse Beauseigneur, Zoé Lenglare
Habillage Angèle Glise, Zoé Lenglare
Création son Lucas Soudi
Composition musicale Teresa Silveira Machado
Régie Marco Benigno, Thomas Chrétien, Lucas Soudi, Victor Veyron
Collaboration artistique Morgane Manceau

Production Nouveau Théâtre Populaire
Avec le soutien du Jeune Théâtre National, de l’Association des Amis du Nouveau Théâtre Populaire, des Trublions de Jarzé, de la commune de Loire-Authion, du collectif intérieur moquette, du Quai-CDN d’Angers, de D::Light et l’engagement de l’Anjou Vert Communauté

Le Nouveau Théâtre Populaire est subventionné par le ministère de la Culture – DRAC Pays-de-la-Loire, le département du Maine-et-Loire et l’Entente-Vallée (Les Bois d’Anjou, Mazé-Milon, La Ménitré, Beaufort-en-Anjou) et artiste associé au Quai-CDN d’Angers et à La Criée-CDN de Marseille.

Durée : 1h55

Festival du Nouveau Théâtre Populaire, Fontaine-Guérin
du 14 au 28 août 2025

La Nuit de Madame Lucienne
Texte Copi (L’Avant-Scène Théâtre)
Mise en scène et décors Frédéric Jessua
Avec Valentin Boraud, Robin Causse, Léa Guillemet, Claire Sermonne
Création costumes Loïse Beauseigneur, Zoé Lenglare
Habillage Angèle Glise, Zoé Lenglare
Construction Eric Szczuczynski
Affiches, peintures planètes et accessoires Zoé Logie de Mersan
Création son Lucas Soudi
Régie Marco Benigno, Thomas Chrétien, Lucas Soudi, Victor Veyron
Assistante à la mise en scène Méline Fulda

Production Nouveau Théâtre Populaire
Avec le soutien du Jeune Théâtre National, de l’Association des Amis du Nouveau Théâtre Populaire, des Trublions de Jarzé, de la commune de Loire-Authion, du collectif intérieur moquette, du Quai-CDN d’Angers, de D::Light et l’engagement de l’Anjou Vert Communauté

Le Nouveau Théâtre Populaire est subventionné par le ministère de la Culture – DRAC Pays-de-la-Loire, le département du Maine-et-Loire et l’Entente-Vallée (Les Bois d’Anjou, Mazé-Milon, La Ménitré, Beaufort-en-Anjou) et artiste associé au Quai-CDN d’Angers et à La Criée-CDN de Marseille.

Durée : 1h20

Festival du Nouveau Théâtre Populaire, Fontaine-Guérin
du 12 au 26 août 2025

23 août 2025/par Vincent Bouquet
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