Kirill Serebrennikov présente dans la Cour d’honneur, Le Moine Noir, d’après une nouvelle fantastique de Tchekhov. C’est sa 4e participation au Festival d’Avignon, et la première fois qu’un artiste russe met en scène un spectacle dans la Cour. Après le triomphe d’Outside en 2019 pendant son assignation à résidence, le metteur en scène russe retrouve la liberté.
Comment la trouvez-vous cette Cour d’honneur ?
C’est un espace incroyable, sublime, immense, difficile. Et qui est très exigeant. C’est une sorte de loupe à travers laquelle le spectateur te scrute. Et probablement, elle peut mettre en évidence les choses que l’on voudrait cacher.
Le Moine Noir a été créé en janvier à Hambourg, avez-vous changé la mise en scène pour Avignon et la Cour ?
Je suis train de faire ce travail de modification, tous les soirs jusqu’à la première. J’espère y arriver car c’est une chose de jouer un spectacle dans une salle pour 500 personnes. C’est tout à fait diffèrent dans cette arène immense.
Qu’est ce que représente ce texte dans l’œuvre de Tchekhov ?
C’est un texte par lequel il répondait à ses propres questionnements sur la tristesse, sur ses souffrances, sur l’homme, sur lui-même. Aujourd’hui on se trouve dans un moment de notre histoire, où pour la énième fois, on se pose la question : qu’est ce que l’homme ? On peut grâce à Tchekhov chercher la réponse à ces questions.
Le spectacle parle un peu de la folie. Est ce que la folie du temps de Tchekhov est la même que la folie aujourd’hui, en 2022 ?
Tchekhov a développé des théories nouvelles pour son époque, avant le début du Freudisme, sur l’homme, sur sa nature comme créature obscure et sombre. Tout à coup, aujourd’hui, on est témoin d’une chose assez étonnante de se dire que depuis des siècles, l’humanité a déjà répondu à certaines questions sur la nature de l’homme. Et encore une fois, on est témoin des guerres, des assassinats, des tueries. On se doit de revenir aux textes classiques pour comprendre notre époque.
C’est la première fois que vous montez un Tchekhov. C’était le bon moment ?
Je n’avais jamais monté Tchekhov en russe, du coup je le monte en russe, en allemand, en germano russe, et en anglais car Tchekhov appartient à la communauté internationale.
Lorsque vous étiez assigné à résidence en Russie, Vous avez été très soutenu par beaucoup d’artistes en France. Est ce que ça vous a aidé pendant ces années difficiles pour vous ?
Je ne sais pas comment les remercier. Comment trouver les mots pour remercier tous ces gens là qui m’ont soutenu à cette époque. Et je profite justement de votre interview pour m’adresser à vous. Je vous adresse ma gratitude profonde. Votre soutien et tout ce que vous avez exprimé m’ont beaucoup aidé. Je vais essayer de vous rendre cet amour.
La dernière fois que avez été programmé à Avignon, c’était pour Outside en 2019. Le public était debout à la première. Comment avez-vous ressenti à distance ces clameurs ?
Quand j’éprouve des émotions fortes, je m’enferme pour éviter que cela me ruine ou me déchire le cœur. Mais en même temps, comme j’avais déjà eu l’occasion plusieurs fois de venir au festival d’Avignon, je m’imaginais les images. J’étais avec le public mais j’étais invisible.
Propos recueillis pas Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Traduction Macha Zonina
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !