Kaboul, le 15 août 2021 par Lucie Berelowitsch, Brice Berthoud et Marcial Di Fonzo Bo © Le Préau CDN
Treize artistes réfugiés afghans rendent hommage à leur pays dans « Kaboul, le 15 août 2021 ». Un spectacle conçu et porté par Lucie Berelowitsch, Marcial Di Fonzo Bo, et Brice Berthoud, et les trois Centres Dramatiques Nationaux de Normandie.
La guerre, l’obscurantisme religieux, ou le terrorisme forment bien souvent les premiers éléments venant à l’esprit lorsque l’on pense à l’Afghanistan. Pourtant, ce pays est aussi peuplé de trésors archéologiques majeurs, de larges paysages à la beauté époustouflante et d’habitants au grand cœur. Avec Kaboul, le 15 août 2021, treize hommes et femmes, tous artistes réfugiés afghans, ont fait rayonner samedi 1er avril les richesses de leur pays sur la scène du Théâtre du Soleil, à la Cartoucherie (Paris 12e). Le soir-même, le spectacle Danse macabre se tenait entre ces mêmes murs, porté par la troupe ukrainienne des Dakh Daughters. Une circonstance loin d’être un hasard. Ariane Mnouchkine vient de se rendre à Kiev pour y encadrer un stage de théâtre à l’Ecole nomade et accueille au sein de la Cartoucherie plusieurs artistes afghans. Lesquels ont été conviés à rejoindre sur scène leurs homologues de Kaboul, le 15 août 2021 pour cette première parisienne.
Le projet est né en Normandie sous l’impulsion des trois Centres dramatiques nationaux (Rouen, Caen et Vire), rapidement rejoints par la scène nationale Le Volcan du Havre et celle du Tangram à Evreux. Et enfin par le CDN de Tours, comme ont tenu à le préciser au public les trois metteurs en scène du spectacle (Lucie Berelowitsh, Brice Berthoud et Marcial Di Fonzo Bo) ainsi que leurs partenaires présents avant la représentation.
Ces structures ont chacune répondu à la chaîne de solidarité mise en place pour aider les Afghans lorsque Kaboul est tombée sous le contrôle des Talibans. « Nous avons rédigé des lettres de soutien pour permettre à des artistes de quitter le pays », explique Lucie Berelowitsch, directrice du Préau CDN de Normandie-Vire. Une fois leur venue en France actée, les comédiens, activistes, réalisateurs ou chanteurs afghans ont d’abord été dispersés parmi les théâtres qui les accueillaient avant d’être rassemblés autour d’un projet artistique commun. « On a senti qu’ils avaient envie de passer au plateau pour raconter ce grand départ de Kaboul. A l’origine, il n’y avait pas de finalité précise. L’idée était qu’ils remettent le pied à l’étrier », raconte Brice Berthoud, codirecteur du CDN de Rouen. Au fil des nombreux temps de parole, la trame se tisse autour de la mi-août 2021 et de l’exil hors de l’Afghanistan.
Le poids du réel confère à Kaboul, le 15 août 2021 une valeur de témoignage à la puissance évocatrice saisissante. L’une des premières scènes du spectacle – joué plusieurs fois depuis sa création en mai 2022 – nous plonge dans la nuit. Éclairée par un léger rai de lumière, Farzana Nawabi entonne avec force un chant dont la traduction française défile sur l’écran accroché en fond de scène. Durant plusieurs minutes, la jeune femme livre a capella une prestation intense, comme un cri du cœur.
La beauté des textes a pu être transmise au public grâce à Saeed Mirzaei, chargé de la dramaturgie et de la traduction. « On a eu la grande chance de le rencontrer, indique Marcial Di Fonzo Bo, directeur de la Comédie de Caen. Il a été un lien essentiel, puisque très vite la question de la langue s’est posée. » L’artiste iranien, installé en France depuis plusieurs années, a permis aux trois metteurs en scène d’être pleinement à l’écoute des désirs de leurs comédiens. « Ce qui était passionnant pour nous c’était de ne surtout pas penser à leur place c’est-à-dire d’apposer un geste de mise en scène qui serait finalement notre vision », précise Lucie Berelowitsch (Les Géants de la montagne).
Les poèmes, les chants, la danse et même le repas improvisé sur scène sont autant de portes d’entrée pour le public vers la culture des comédiens. Mis bout à bout, ces morceaux d’Afghanistan déploient un récit polyphonique, rappelant la forme épique caractéristique du théâtre classique du pays. La troupe allie tradition et modernité, puisant dans les marqueurs identitaires de l’Afghanistan pour constituer un hommage à sa manière. Et célébrer cette terre aux mille richesses – non moins fragile –, dont la chaleur nous conquiert instantanément.
Kilian Orain – www.sceneweb.fr
Kaboul, le 15 août 2021
Conception : Lucie Berelowitsch, Marcial Di Fonzo Bo, et Brice Berthoud
Dramaturgie et traduction : Saeed Mirzaei
Régie générale et son : Johan Allanic
Création et régie lumières : Jean-François lelong
Création et régie vidéo : Steven Guegan
Interprétation : Shogofa Arwin, Maryam Yousefi, Ali Mohammadi Kiyan, Soghra Setayesh, Maryam Sepehr, Leena Maqsoodi, Mamnoon Maqsoodi, Shahwali Nawabi, Farzana Nawabi, Gulsom Zahra et Mohamad Reza AhouraProduction déléguée : CDN de Normandie-Rouen
Coproduction : Comédie de Caen – CDN de Normandie ; Le Préau – CDN de Normandie-Vire ; Le Tangram – Scène nationale Evreux-Louviers ; L’Olympia – CDN de Tours ; Le Volcan – Scène nationale du Havre.Avec le soutien du Ministère de la Culture/DRAC Normandie, de la Région Normandie, de l’ODIA Normandie, de la Ville de Rouen, du Ministère de la Culture/DRAC Centre, de la Région Centre.
Durée 1h30
Le Tangram scène nationale Evreux-Louviers
6 avril 2023 à 20h
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