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Avec Jeanne Balibar, les femmes entrent dans l’Histoire

A voir, Bobigny, Chalon-sur-Saône, Les critiques, Marseille, Paris, Théâtre

photo Mathilda Olmi

Dans le cadre du festival Actoral, Jeanne Balibar présentait son triptyque consacré à trois vies de femmes racontées par des historiennes. Un seule en scène en forme de « lecture jouée » sur l’oppression sociale, et donc masculine, des femmes. Mais aussi une mise en spectacle des travaux de recherche en Histoire qui donne envie d’épouser la carrière.

« Je n’ai jamais réussi à considérer l’Histoire que comme de la littérature, un art du récit » avance Jeanne Balibar pour expliquer qu’elle ait choisi le métier d’actrice plutôt que celui d’historienne. Elle avait pourtant commencé par étudier l’histoire à l’Université. A côtoyé pendant ces années d’études des jeunes femmes devenues depuis des amies, qui lui donnent aujourd’hui la matière des trois récits qu’elle porte sur scène. Violette Nozière, la parricide des années 30. Delphine Seyrig, actrice féministe inclassable. Et l’esclave portugaise Pascoa inlassablement poursuivie pour bigamie par le Tribunal d’Inquisition de Lisbonne en 1700. Leurs vies sont abordées avec toute la rigueur des études historiques, ce qui ne les empêche pas de produire une matière véritablement théâtrale.

Il faut dire qu’avec Violette Nozière, Balibar démarre fort. Il s’agit d’une « histoire totale ». De celles qui cristallisent bien des faits sociaux et permettent ainsi de déployer l’auscultation d’une société à partir d’un simple fait divers. Pour rappel, celui-ci tint en haleine la population française pendant les années 30. Violette Nozière avait empoisonné ses parents, seul son père était mort, supposément pour leur voler de l’argent. Elle accusa ensuite celui-ci d’avoir abusé d’elle. D’un côté, une France réactionnaire qui voyait en Nozière le symbole d’une jeunesse dépravée. De l’autre, une France progressiste qui dénonçait l’inceste, et une société corsetée. Comme pour Dreyfus, chacun a un avis, jusqu’aux surréalistes et ce poème d’Eluard à la chute éloquente : « Violette a rêvé de défaire / A défait / L’affreux nœud de serpents des liens du sang ». Sous les mots d’Anne-Emmanuelle Demartini, Jeanne Balibar nous promène ainsi dans le Paris de cette époque. La rue Madagascar dans le 12ème arrondissement de Paris – lieu du crime -, les jardins ouvriers de la petite ceinture, le bois de Vincennes. Mais aussi dans l’épais dossier d’instruction du juge. D’où ressortent le compte-rendu d’une scène de confrontation terrifiante entre Violette et sa mère. Et les courriers reçus d’anonymes femmes françaises qui racontent au juge comment elles ont été elles-mêmes victimes d’inceste. Cette histoire pourrait faire un film – Claude Chabrol l’a bien compris – en forme d’enquête policière, de drame social et de de tragédie tout à la fois. Mais c’est aussi cette saisie d’un état de la société, de la ville, des relations familiales, qui rend cette première partie absolument passionnante.

La seconde est plus visuelle. Parsemée de projections de films et d’archives de Delphine Seyrig. Plus discontinue aussi. Le travail d’Emmanuelle Loyer dessine la trajectoire originale de cette femme dont les combats féministes ont plus que freiné la carrière. Dans la troisième partie consacrée à Pascoa, esclave poursuivie des années durant par le tribunal d’inquisition de Lisbonne, pour s’être mariée à deux reprises, la parole reprend ses droits. Sous une forme moins littéraire, plus judiciaire. Répétitive, kafkaïenne, épuisante. Mimant l’acharnement du système contre une femme dont le destin a été exhumé par Charlotte de Castelnau-L’Estoile.

Trois femmes racontées par des femmes donc. Dont la vie a été marquée par l’oppression sociale, donc masculine. Le système patriarcal est dans le viseur. Cela va sans le dire. Mais ce seule en scène de 3h45 est aussi, et surtout, un hommage rendu à la science de l’histoire, au travail minutieux et passionnant de ces chercheuses qui exhument le passé et éclairent le présent. Grande, élégante dans son pantalon noir, les épaules carrées découvertes, Jeanne Balibar lit et interprète leurs textes. Sa « lecture jouée » se tient à parfaite distance entre le théâtre et la lecture, dans un parfait équilibre pour ne trahir ni l’art, ni la science. Parfois éclairée en contre-plongée, son ombre se découpe alors sur le fond de scène comme celle d’une révolutionnaire juchée sur des barricades.

Eric Demey – www.sceneweb.fr

Les Historiennes
Mise en scène et interprétation Jeanne Balibar
Assistante Andrea Mogilewsky
Textes :
Charlotte de Castelnau-L’Estoile
Anne-Emmanuelle Demartini
Emmanuelle Loyer
Production Elizabeth Gay

Production Théâtre Vidy Lausanne

Durée : 3h45 avec entracte

Festival Actoral à la Criée
24 et 25 septembre 2022

Du 28 septembre au 1er octobre 2022 au théâtre des Bouffes du Nord à Paris
Dans le cadre du festival d’Automne

11 novembre 2022
MC 93

14 janvier 2023
Carros

25 mars 2023
Théâtre d’Arles

5 mai 2023
Espace des arts à Chalon-sur-saône

26 septembre 2022/par Eric Demey
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