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Arthur Miller et la mort du rêve américain

A voir, Cherbourg, Les critiques, Théâtre, Versailles
Philippe Baronnet monte Mort d'un commis voyageur d'Arthur Miller
Philippe Baronnet monte Mort d'un commis voyageur d'Arthur Miller

Photo Victor Tonelli

Portée par une nouvelle traduction de Kelly Rivière, Mort d’un commis voyageur, mise en scène par Philippe Baronnet avec Vincent Garanger dans le rôle-titre, nous ramène dans l’Amérique des années 1930, quand l’idéal américain avait déjà du plomb dans l’aile. Une fable sociale et familiale d’une étonnante actualité.

Nous sommes dans les années 1930 et pourtant, ce pourrait être aujourd’hui. On se demande d’ailleurs en découvrant le très fameux texte d’Arthur Miller comment la violence d’un système capitaliste qui détruit la planète et place la réussite sociale au-dessus de tout perdure encore. Comment le pouvoir patronal et le rêve américain tiennent encore debout. Car Mort d’un commis voyageur détaille précisément, déjà presque cent ans en arrière, la mécanique qui détruit toute une famille américaine moyenne à coups de mirages dorés. Le père, Willy Loman, commis voyageur, arpente en effet les États-Unis depuis trente ans pour vendre on ne sait quelle camelote. Sa femme tient le foyer. Ses garçons ont grandi. L’un soigne l’horizon bouché qui s’offre à lui par d’innombrables mensonges et quelques aventures féminines ; l’autre rêve de liberté et de vie en harmonie avec la Nature. Il refuse le schéma du père qui avait pourtant tout misé sur lui pour atteindre ce qu’il n’avait pu accomplir : réussite sortant du lot, enrichissement, notoriété et reconnaissance sociale. Tous ces espoirs pour lesquels Willy a accepté de littéralement se tuer au travail.

Pièce sur les chausse-trappes du rêve américain, multiprimée dès ses premières représentations sous la houlette d’Elia Kazan en 1949, Mort d’un commis voyageur s’attarde aussi sur la complexité des relations familiales. Années 1930 obligent, la femme y est cantonnée à son statut d’objet de désir, de trophée de chasse ou de gardienne du foyer, qui tente d’apaiser les conflits naissants entre les hommes, père et fils. Ceux-là sont habités d’une complexité qui fait qu’on ne saurait condamner ni l’un ni l’autre. Ni le fils attaché au père par cet amour originel qui a longtemps maintenu son géniteur sur un piédestal ; ni le père qui voit dans son enfant l’occasion de réussir là où il a échoué, et est prêt pour cela à tout sacrifier, aimant sa progéniture comme il aurait adoré celui qu’il a rêvé d’être. Il y aurait bien sûr mille manières de mieux faire pour ce petit père obnubilé par la réussite, mais le dramaturge américain sait construire des personnages complexes qu’on ne peut ni complètement aimer ni complètement détester, dans un paysage patriarcal encore bien peu conscient de l’être.

Au plateau, les espaces à peine suggérés – à travers une table ou un lit – se métamorphosent facilement au gré des délires du commis Willy et des flash-back qui nourrissent l’histoire. Le VRP vieillissant vit autant dans ses souvenirs et ses rêves que dans le réel, il parle tout seul, et sa famille, démunie, s’inquiète de le voir ainsi perdre la tête. Avec sa dizaine de personnages, la pièce déploie tout le paysage intime et social d’un homme finissant, qui aurait voulu être mieux que ce pas grand-chose que nous sommes tous·tes. Un petit sexagénaire ventripotent et dépassé, formidablement incarné par Vincent Garanger. Dans une nouvelle traduction simple et fluide menée par Kelly Rivière, avec un habillage sonore discret et efficace et une mise en scène au service du texte, Philippe Baronnet laisse résonner toute la complexité d’une histoire parfois un peu longuette. Dans un entre-deux d’époques, il donne à voir les routes erronées qu’empruntent nos existences, et la tragédie ordinaire de nos déterminismes, en même temps que nos puissants liens d’amour et désirs de liberté.

Eric Demey – www.sceneweb.fr

Mort d’un commis voyageur
Texte Arthur Miller
Nouvelle adaptation Kelly Rivière
Mise en scène Philippe Baronnet
Avec Vincent Garanger, Anne Cressent, Marc Lamigeon, Romain Fauroux, René Turquois, Samuel Churin, Nine de Montal, Philippe Baronnet
Lumière Maxime Rousseau
Son Haldan de Vulpillières
Interprétation musicale Haldan de Vulpillières, Lucille Gallard
Costumes Emilie Baillot
Collaboration artistique Mickaël Pruneau, Marie-Cécile Ouakil, Alain Deroo

Production Les Echappés vifs
Coproduction Théâtre Montansier Versailles ; Théâtre de Rungis ; Théâtre municipal de Coutances ; Le Trident Scène nationale de Cherbourg-en-Cotentin ; DSN Dieppe Scène nationale ; CA Mont-Saint-Michel Normandie
Résidences de création Théâtre de Saint-Lô ; Dieppe Scène Nationale ; Théâtre de Rungis ; TM Coutances ; Théâtre Montansier Versailles
Aide Spedidam
Soutien Centre départemental de création artistique de Regnéville-sur-Mer ; Théâtre de Sartrouville et des Yvelines CDN ; SACD Pôle auteurs en cours

Arthur Miller et ses ayants droit sont représentés en France par l’agence Drama – Suzanne Sarquier.

Durée : 2h30

Vu en novembre 2024 au Théâtre Montansier, Versailles

Le Trident, Scène nationale de Cherbourg-en-Cotentin
du 13 au 15 novembre

Théâtre de Rungis
le 10 janvier 2025

Théâtre municipal de Coutances
le 14 janvier

Théâtre de la Ville de Saint-Lô
le 16 janvier

DSN, Dieppe Scène Nationale
le 27 février

13 novembre 2024/par Eric Demey
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