Entre danses de balles et musique live, Nos matins intérieurs orchestre la rencontre entre jonglage et musique classique grâce à une collaboration fructueuse entre le Collectif Petit Travers et le Quatuor Debussy. Le résultat est d’une harmonie renversante, d’une créativité radieuse et met du baume au cœur sur les valeurs véhiculées. Une parenthèse de plaisir optique et musical pour petits et grands.
Lancés ou lâchers de balles, chutes et rebonds, trajectoires longues ou au plus près du corps, entre la balistique et la chorégraphie aérienne, la nouvelle création du Collectif Petit Travers s’accorde à merveille avec l’interprétation musicale en live du Quatuor Debussy. Une fois de plus, elle pousse l’art du jonglage là où on ne l’attendait pas, là où l’exploit n’est pas un but en soi, là où l’esprit d’équipe prime sur la compétition, et la singularité de chacun.e valorisée. Nos matins intérieurs est le fruit d’une collaboration riche et stimulante entre le collectif spécialisé dans le jonglage et cet ensemble musical féru de rencontres et d’expérimentations scéniques, à laquelle s’ajoute la participation de l’auteur Jean-Charles Massera pour la partition textuelle du spectacle, qui ponctue en pointillés tableaux et mouvements d’ensemble saisissants. En effet, ici, exit la piste de cirque et le mutisme des athlètes de la jongle, et, si la virtuosité est bel et bien là, jamais elle ne parade.
Le dispositif est frontal et permet un travail sur l’image chorale remarquable. Au plateau, quatorze interprètes portent ce spectacle qui est une utopie à lui tout seul. Dix jongleurs et jongleuses au contact de quatre musiciens défient le repli sur soi et la facilité, la gravité et les rôles assignés. Circassiens et musiciens occupent et se partagent l’espace en bonne entente et sur le même plan. La scénographie est mobile, modulable et légère, constituée de cubes disposés tantôt à cour et à jardin libérant l’espace central, tantôt au milieu en fond de scène ou en avant-scène ou de façon éparse, selon des combinaisons à chaque fois réinventées qui génèrent une dynamique visuelle intéressante. Ces cubes sont des supports, des assises, des paravents ou des pyramides sur lesquels se perchent jongleur.ses et musiciens.
Tout le travail est centré sur la relation. La relation entre les interprètes au plateau, attentifs, solidaires, à l’écoute, prompts à l’entraide ; la relation entre le résultat, le spectacle abouti, fruit d’une discipline assidue et d’un labeur évident, et la personnalité de chacun.e, son lien personnel et particulier avec le jonglage – évoqués sous forme de voix off ou de confidences partagées lors d’une séance de thérapie collective aussi touchante que cocasse ; et, bien sûr, au cœur du spectacle, la relation entre jonglage et musique, et l’harmonie qui s’en dégage. Partitions visuelles et musicales avancent d’un commun élan, osent le grand écart entre musiques baroque (Purcell) et contemporaine (Marc Mellits), sans que le hiatus ne choque les oreilles. Héritière de la musique répétitive de Steve Reich, la composition de Mellits dynamise la représentation, donne le la et le rythme, et l’hypnose nous gagne. Les balles éclatent de toutes parts, en largeur, en hauteur, dans des circuits circulaires ou des lignes droites. Leurs trajectoires se font géométriques, sinusoïdales, oscillatoires, selon des lois physiques qui défient nos regards. Les balles battent la mesure, se font notes de musique sur portée imaginaire, et forment des figures abstraites et des trainées graphiques dans les airs, tandis que les bâtons tournoient, transformés par la vitesse en éventails, échos visuels aux archets des violonistes et du violoncelliste. Les cubes glissent sur le sol au son des cordes, et le pizzicato final et son éclosion de balles offrent un moment de grâce pure.
Ce spectacle d’un enchantement réconfortant révèle la musicalité à l’œuvre dans le jonglage et les images cachées dans la musique. Il s’immisce dans l’intimité des jongleurs.es, depuis les origines de leur pratique jusqu’à leurs labyrinthes intérieurs. Balles et javelots deviennent la prolongation des corps. L’un jongle avec les pieds, l’autre danse en jonglant, tandis qu’un autre encore utilise le sol comme source de rebond. Pas un n’est identique ; pas une technique n’est le calque d’une autre. Nos matins intérieurs met à l’honneur toutes les saveurs d’une discipline aussi riche qu’elle a de praticiens. Riche de tous les humains qui s’y adonnent, pour la beauté du geste, la magie optique et ce plaisir ludique inouï de contrer le poids des choses, faire voler et valser les balles et s’envoler l’imaginaire. L’humour s’invite, la mélancolie guette, mais le rêve est là, dans cette pluie de balles qui vaut toutes les machines à bulles, et replace nos talents au cœur de l’émerveillement.
Marie Plantin – www.sceneweb.fr
Nos matins intérieurs
Écriture Julien Clément, Nicolas Mathis
Mise en scène Nicolas Mathis
Texte et direction d’acteurs Jean-Charles Massera
Conception musicale Christophe Collette
Avec les musiciens du Quatuor Debussy et les jongleurs et les jongleuses du Collectif Petit Travers : Eyal Bor, Julien Clément, Rémi Darbois, Amélie Degrande, Bastien Dugas, Alexander Koblikov, Taichi Kotsuji, Carla Kühne, Emmanuel Ritoux, Anna Suraniti
Musiques Henry Purcell, Marc Mellits
Création lumière Arno Veyrat
Costumes Léonor Boyot Gellibert
Laboratoire prise de paroles Stéphane Bonnard
Construction de la scénographie Olivier Filipucci
Regard sur le geste Violeta Todo Gonzalez
Voix off Jean-Charles Massera, Martin Sève
Régie générale et lumière François Dareys, en alternance avec Thibault Thelleire
Régie son Victor Page, en alternance avec Eric DutrievozProduction Collectif Petit Travers, en complicité avec le Quatuor Debussy
Coproduction et accueil en résidence Maison de la Danse, Pôle européen de création, Lyon ; La Biennale de Lyon ; Le Carré magique, Pôle National Cirque en Bretagne ; AGORA – Pôle National Cirque Boulazac – Nouvelle Aquitaine ; Plateforme 2 Pôles Cirque en Normandie / La Brèche à Cherbourg et le Cirque Théâtre d’Elbeuf ; Le Sirque, Pôle National des Arts du Cirque Nexon Nouvelle Aquitaine
Coproduction Initiatives d’Artistes / La Villette – Paris ; La Cité Bleue, Genève ; Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines, Scène nationale ; Equinoxe – Scène nationale de Châteauroux ; Le Carreau, Scène nationale de Forbach et de l’Est mosellan ; La Rampe-La Ponatière, scène conventionnée d’intérêt national art et création danse et musiques, Echirolles
Accueil en résidence Circa, Pôle National Cirque, Auch Gers Occitanie ; Théâtre de Privas – Scène conventionnée Art en Territoire / Centre Ardèche ; Théâtre National Populaire, Villeurbanne
Avec le soutien de la SPEDIDAM, du Centre national de la musique et de la Ville de VilleurbanneLe Collectif Petit Travers est conventionné par le ministère de la Culture (DRAC Auvergne-Rhône-Alpes) et par la Région Auvergne- Rhône-Alpes.
Le Quatuor Debussy est conventionné par le ministère de la Culture (DRAC Auvergne-Rhône-Alpes), la Région Auvergne- Rhône-Alpes et la Ville de Lyon, et est soutenu par la Métropole de Lyon, la SPEDIDAM et SG Auvergne Rhône Alpes.Durée : 1h15
À partir de 7 ansLa Villette, Espace Chapiteaux
du 14 novembre au 1er décembre 2024Maison des Arts et du Léman, Thonon-les-Bains
les 6 et 7 décembreLa Coursive, Scène nationale de La Rochelle
les 17 et 18 décembreOpéra de Limoges
le 9 janvier 2025Scène nationale Carré-Colonnes, Saint Médard-en-Jalles
le 14 janvierAGORA, Pôle National Cirque Boulazac
les 16 et 17 janvierThéâtre d’Angoulême, Scène nationale
les 21 et 22 janvierBleu Pluriel, Centre culturel de Trégueux
les 25 et 26 janvierCentre Culturel Juliette-Drouet, Fougères
le 6 févrierMaison de la Danse, Lyon
du 8 au 14 févrierThéâtre de Privas, Scène conventionnée Art en Territoire
le 18 avrilLe Figuier Blanc, Argenteuil
le 16 maiLe Quai, CDN Angers Pays de la Loire
les 20 et 21 mai
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