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Condor, un cauchemar en béton armé

A voir, Angers, Bobigny, Les critiques, Strasbourg, Théâtre, Toulon, Tours
Jean-Louis Fernandez

Mireille Herbstmeyer et Frédéric Leidgens dans Condor photo Jean-Louis Fernandez

Mireille Herbstmeyer et Frédéric Leidgens se livrent à un impeccable face-à-face nocturne sous haute tension entre crise politique et préjudices intimes dans Condor de Frédéric Vossier que met en scène Anne Théron au théâtre National de Strasbourg puis à la MC93 de Bobigny.

Le titre que donne Frédéric Vossier à son nouveau texte renvoie à l’opération « Condor » qui, au Brésil, en 1975, a vu s’allier, sous l’impulsion de Pinochet au Chili, certains pays d’Amérique latine dans le but de mutualiser l’organisation de la répression et de liquider les opposants aux régimes dictatoriaux. Mais si la pièce prend pour cadre un contexte historique, géographique et politique précis, c’est bien au cœur des déchirures intimes et familiales qu’elle se place en mettant en scène les retrouvailles inopinées d’un frère et d’une sœur au crépuscule de leur vie.

Lorsqu’elle l’appelle au téléphone, elle a beaucoup marché sous la chaleur de la ville, elle sait où il habite, elle est déjà devant chez lui, postée en haut du large escalier de pierres blanches qui mène à son logement terré comme « un trou à rat » dit-elle. Ameublement spartiate, murs gris et défraîchis, l’enceinte rappelle celle d’un espace concentrationnaire.  Une fois l’un face à l’autre, ils ne se regardent pas, chacun reste sur ses gardes. Il lui propose de boire de l’alcool, elle est fatiguée et demande à dormir dans sa chambre à coucher. Elle est venue sans bagage, juste munie d’un sac à main en cuir dans lequel se trouve un pistolet. Lui aussi possède une arme à feu qu’il astique virilement. Le ton est froid et distant. Ils s’interrogent, se provoquent mutuellement.

Au cœur de dialogues aussi elliptiques qu’éloquents, il se déploie des visions du Brésil, de la pauvreté, de populations déplacées et attaquées pendant les émeutes, de jeunes hommes et femmes, des adolescents, en masse, dans la rue, de leurs corps vigoureux traqués, frappés, courant pour s’échapper des quartiers où ils sont entassés pour rejoindre la plage, se jeter à l’eau.

Ancienne militante pour la liberté, Anna a été de ceux-là. Elle a été arrêtée, torturée, violée. Lui, à l’inverse, s’est placé du côté des bourreaux. Il a été son tortionnaire comme le dévoilent par bribes confusément brouillées des projections vidéos qui se télescopent comme autant de flashs mémoriels d’un passé assourdissant.

Quarante ans plus tard, malgré l’usure du temps, il affiche une santé physique fringante, fruit d’une vie d’ermite en harmonie avec la nature et d’un entraînement soutenu. Elle demeure accablée, anéantie et se débat contre ses traumatismes. Les souvenirs hurlent visuellement et physiquement.

Une menace permanente et une lutte continue perturbent le calme apparent. La mise en scène très soucieuse de rendre parfaitement audible et concret le texte met au cœur de son propos la violence, l’humiliation, la rébellion, mais sans trop d’effets ostensibles qui auraient tendance à en réduire la portée intellectuelle et émotionnelle. Elle sonde avec force l’intériorité et l’ambiguïté des deux personnages. La belle scénographie de Barbara Kraft, les lumières de Benoît Théron comme le travail sonore de Sophie Berger épousent finement l’intimisme suffocant du « théâtre de chambre » voulu par le dramaturge.

Il faut saluer l’incarnation saisissante qu’offrent les deux comédiens réunis. Entre ferme solidité et franche vulnérabilité, ils font de la pièce un ­combat livrés aussi bien dans les mots que dans les corps, puissamment acérés. Une nervosité toute rentrée n’empêche un jeu fauve d’advenir. Sous des airs doucereux, Frédéric Leidgens demeure inquiétant et diabolique en ancien tortionnaire ricanant qui se défend d’être un criminel. Atteinte dans sa chair de victime, Mireille Herbstmeyer déploie beaucoup de justesse dans un registre profondément tragique.

Christophe Candoni – www.sceneweb.fr

Condor
Texte
Frédéric Vossier
Mise en scène
Anne Théron*
Avec
Mireille Herbstmeyer
Frédéric Leidgens
Assistanat à la mise en scène
Claire Schmitt
Chorégraphie
Thierry Thieû-Niang
Scénographie et costumes
Barbara Kraft
Lumière
Benoît Théron
Son
Sophie Berger
Vidéo et régie générale
Mickaël Varaniac-Quard
Régie plateau et effets spéciaux
Marion Koechlin
Régie son
Quentin Bonnard
* Metteure en scène associée au TNS

Le décor est réalisé par les ateliers du Théâtre du Nord – Lille.
Les costumes sont réalisés par les ateliers du Théâtre National de Strasbourg.
Le texte est publié aux éditions Les Solitaires Intempestifs.
Production Théâtre National de Strasbourg et Cie Les Productions Merlin
Coproduction Festival d’Avignon, MC93 – Maison de la Culture de Seine-Saint-Denis, Théâtre Olympia − Centre Dramatique National de Tours, Le Quai − CDN Angers Pays de Loire, Châteauvallon-Liberté, scène nationale

Strasbourg – TNS
13 oct au 23 oct 2021

Bayonne | 26 sept 2021 | Scène nationale du Sud-Aquitain

Angers | 30 sept > 2 oct 2021 | Le Quai CDN Angers Pays de la Loire

Bobigny | 18 > 28 nov 2021 | MC93 Maison de la Culture de Seine Saint Denis

Tours | 26 > 29 avril 2022 | Théâtre Olympia – Centre dramatique national de Tours

18 octobre 2021/par Christophe Candoni
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