Le Festival TransAmériques accueille la nouvelle création de la chorégraphe et performeuse Dana Michel. Si sa pièce précédente, Cutlass Spring, a été créée à Montréal, MIKE a vu le jour à Bruxelles et sera de passage en Europe à plusieurs reprises cet été et à l’automne, notamment à Montpellier Danse et à Marseille pour Actoral.
Dans Cutlass Spring, les spectateurs entouraient l’espace de jeu au moyen d’une scénographie quadrifrontale. Dans MIKE, on est invités à prendre place où on veut à travers l’espace. À Montréal, c’est dans la salle polyvalente de l’UQAM que le public s’installe sur des chaises et des couvertures. Un peu partout, des objets que l’on imagine ramenés des coulisses : lampes, portants, rallonges électriques et quelques vêtements qui pourraient tout aussi bien être ceux que Dana Michel portait avant d’entrer costumée sur scène. En fond sonore, des notes de piano désaccordées, saturées, nous laissent deviner une Lettre à Élise sans cesse interrompue.
Les précédents spectacles de Dana Michel duraient généralement une heure. Dans MIKE, le propos central nait de la durée : la performeuse partage ses recherches dans un long et intense work in progress qui s’étend sur trois heures. Un temps pendant lequel le spectateur peut bouger, suivre la danseuse dans l’espace, se reposer ou changer de position. D’autant qu’au début de la représentation, Michel partage la salle en deux au moyen de cloisons amovibles. Une partie de la performance est donc rendue invisible à ceux qui ne bougent pas.
Une obsession du détail
MIKE apparaît comme une réflexion partagée sur le temps et l’espace. Sous des airs improvisés et tâtonnants, Dana Michel apporte une intensité et une maîtrise de la relation avec les spectateurs qui ne laissent aucun doute sur la profondeur de son travail. Elle est habillée d’un costume et d’un t-shirt blanc. À ses pieds, des chaussettes trop grandes. Aux mains, des gants de manutention. Comme dans ses pièces précédentes, elle cherche sa place. Même lorsqu’elle s’assoit au milieu du public, elle entretient une différence palpable qui fait qu’on la distingue toujours.
Sa quête est retranscrite à travers son corps par une gestuelle qui tourne parfois jusqu’à l’obsession du détail. En l’observant, on pense à un enfant en bas-âge livré à lui-même et qui explore le monde à travers un regard qu’un adulte ne pourrait pas comprendre. Dana Michel ne suit aucune direction logique. Elle réinvente l’utilisation des objets, oblige le public à ne plus penser le monde selon des critères définis.
Le piano du début s’est arrêté depuis longtemps. Le silence et l’écoute du public font partie de l’expérience. Ces derniers ne sont que ponctuellement perturbés par une bande sonore constellée d’expérimentations. Des musiques de jeux vidéo des années 90 précèdent des borborygmes et quelques notes d’harmonica avant une troisième heure qui s’ouvre sur une composition épique de John Adams.
Dans un tel dépouillement, un rien devient poétique et résonne, sans pour autant que la considération esthétique ne s’invite dans la réflexion. La première heure peut paraître longue et éprouvante mais à la fin du spectacle, quand Dana Michel quitte son personnage d’un « I’m done », nous sommes éblouis par son génie.
Hadrien Volle – www.sceneweb.fr
MIKE de Dana Michel
Une production de SCORP CORPS
Création et interprétation Dana Michel
Élan artistique Viva Delorme + Ellen Furey + Peter James + Heidi Louis + Tracy Maurice + Roscoe Michel + Karlyn Percil + Yoan Sorin
Conseil scénographie et direction technique Romain Guillet
Conseil son David Drury
Production Viva Delorme + Dana Michel ̶ SCORP CORPS
Diffusion Anna Skonecka + Koen Vanhove ̶ Key PerformanceCoproduction Festival TransAmériques + ARSENIC ̶ Centre d’art scénique contemporain (Lausanne) + Centre National des Arts (Ottawa) + Julidans Amsterdam + Kunstenfestivaldesarts (Bruxelles Brussels) + MDT (Stockholm) + Montpellier Danse + Wexner Center for the Arts of The Ohio State University (Colombus) + Moving in November (Helsinki)
Avec le soutien de Ministère des Relations internationales et de la Francophonie
Résidences de création Alkantara (Lisbonne) + ANTI Festival (Kuopio) + Centre National des Arts (Ottawa) + Kinosaki International Arts Center + Kyoto Experiment + Kunstenfestivaldesarts (Bruxelles) + Künstlerhaus Mousonturm (Francfort) + Montpellier Danse, résidence à l’Agora, cité internationale de la danse avec le soutien de Fondation BNP Paribas + RIMI/IMIR SceneKunst (Stavangery) + Shedhalle (Zürich) avec le soutien de Tanzhaus Zürich et de l’Ambassade du Canada en Suisse + The Chocolate Factory (New York)
Création au Kunstenfestivaldesarts, Bruxelles, le 18 mai 2023
Présentation en collaboration avec UQAM – Cœur des sciences
Rédaction Enora Rivière
Traduction Marie-Pier LabbéDurée : 3h (sans entracte)
Festival TransAmériques à Montréal
du 1er au 4 juin 2023Montpellier Danse
Salle Béjart / Agora
3 et 4 juillet à 14h
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