À Nancy, Julia Vidit crée une nouvelle mise en scène du Menteur de Corneille. Elle donne de la fraîcheur et des couleurs à cette comédie classique malgré d’évidentes fautes de goût.
En 1643, Corneille, jouissant déjà d’une belle maturité, abandonne les destins tragiques de Rodrigue, de Cinna et de Polyeucte pour écrire avec délice sa dernière comédie. Un modèle du genre. Au cœur d’invraisemblables quiproquos, se trouve Dorante, personnage désopilant d’insolence et de drôlerie. Jeune étudiant, petit provincial, il rejoint la capitale où il s’invente mille vies, veut conquérir les femmes et défier l’autorité, sans toutefois éviter ni les déboires ni les querelles.
Le vif écrin d’un décor safrané s’apparente à une grande galerie ou un podium de mode avec des flashs intempestifs qui ponctuent la pièce jouée à toute allure. D’un rebond permanent, d’une vitalité épatante, le Dorante de Barthélémy Meridjen s’enflamme sans s’essouffler. Désinvolte et rebelle, il a quelque chose d’un Scapin, plus valet rusé que galant homme, mais malicieusement enivré de ses propres délires. Tel un chat habile, il retombe toujours sur ses pattes. Absolument exalté, il ne lui manquerait sans doute qu’une pointe de sensualité. On se souvient de Loïc Corbery à peine entré au Français, tout aussi fougueux, bondissant, dans le rôle, mais développant aussi un caractère lunaire et charmeur qui sied bien au personnage.
Autour de lui, une distribution dont la jeunesse et la diversité séduisent, malgré de fortes inégalités. Le jeu passe trop souvent en force. En soulignant le trait, les comédiens sont tantôt conduits à appuyer la diérèse ou les « e » muets comme une récitation déclamative, tantôt invités à prendre des distances avec le texte, voire à le réécrire.
La pièce se clôt sur un apologue superflu mis en scène comme un sketch sur les vertus illusoires de la vérité et les faveurs du mensonge. Les artifices sont nombreux dans le spectacle où les époques et les styles se mélangent complaisamment. Ainsi l’hier et l’aujourd’hui, mais surtout l’urbain et le précieux, cohabitent sans complexe. Cette oscillation permanente débouche sur des costumes chamarrés pas moins moches que ceux d’une kermesse d’école. On pense à un excès de coquetterie lorsque les acteurs se mirent continuellement dans une large façade en miroirs alors qu’ils sont si mal affublés. Jogging et baskets sous la redingote, musique baroque mâtinée de rythmes et de sonorités techno… Il fallait oser même si cela n’est plus vraiment original. Sans être vraiment de notre temps, ce Menteur demeure plutôt plaisant.
Christophe Candoni – www.sceneweb.fr
Le Menteur
de Pierre Corneille
Mise en scène Julia Vidit
Avec Grégoire Lagrange, Mégane Ferrat, Aurore Déon en alternance avec Clarisse Lhoni-Botte, Karine Pédurand en alternance avec Hélène N’Suka, Jacques Pieiller, Adil Laboudi, Joris Avodo, Marion Duphil
Dramaturgie et écriture Guillaume Cayet
Scénographie Thibaut Fack
Lumière Nathalie Perrier
Son Bernard Valléry, Martin Poncet
Costume Valérie Ranchoux-Carta
Maquillage, perruques Catherine Saint-Sever
Confection costumes Alix Descieux, assistée de Maeva Filée, Blandine Achard, Marion Sola
Construction du décor Atelier du Théâtre de la Manufacture, CDN Nancy Lorraine en partenariat avec Like MirrorProduction Java Vérité
Production déléguée et reprise Théâtre de la Manufacture CDN Nancy Lorraine
Coproduction Théâtre de la Manufacture, CDN Nancy Lorraine ; ACB – Scène Nationale de Bar-le-Duc ; Théâtre Firmin Gémier / La Piscine – Pôle National du Cirque d’Antony ; Le Carreau-Scène nationale de Forbach et de l’Est Mosellan ; Les Théâtres (Aix-en Provence) ; MC2: Grenoble ; Théâtre Jacques Prévert – Aulnay-sous-Bois ; Le Théâtre de Rungis.
Avec la participation artistique de l’ENSATT et du Fonds d’Insertion pour les Jeunes Comédiens de l’ESAD-PSPBB
Avec le soutien de la DRAC Grand Est, de la Région Grand Est, de la Ville de Nancy, de l’ADAMI, de la SPEDIDAMDurée : 1h45
Vu en octobre 2017 au Théâtre de La Manufacture, CDN Nancy Lorraine
Théâtre de la Manufacture, CDN Nancy Lorraine
du 25 février au 1er mars 2025Théâtre National de Nice
du 26 au 28 marsThéâtre Olympia, CDN de Tours
du 13 au 16 maiThéâtre de Bourg-en-Bresse, Scène nationale
du 4 au 6 juin
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