Le chorégraphe et directeur de Chaillot, Rachid Ouramdane, déploie une pièce tout en souplesse qui interroge les relations entre les individus, mais, malgré sa grâce et son vocabulaire diversifié, elle ne parvient pas à s’envoler.
Dans la pénombre, onze interprètes s’avancent face à nous, déterminés. On croirait presque assister à un remake zen (et habillé) de Tragédie (2012) d’Olivier Dubois, où des danseurs avancent, nus, d’un pas pressé, recréant un défilé survolté. Contre-nature est la dernière pièce du chorégraphe Rachid Ouramdane, qui a pris la direction du Théâtre de Chaillot en 2021. Connu pour interroger l’intime dans ses chorégraphies, il se consacre depuis quelques années à capter l’envol, comme en témoigne Möbius Morphosis (2024), créé aux Nuits de Fourvière, puis au Panthéon, où décollent la Compagnie XY et les interprètes de l’Opéra de Lyon. Pour Contre-nature, c’est la Compagnie de Chaillot, composée de danseurs et d’acrobates complices de son travail depuis plusieurs années, qui explore différentes manières d’être en relation dans un ensemble poétique tout en souplesse.
Contre-nature est-elle une pièce de danse ou de cirque ? Les deux à la fois probablement. On y retrouve les portés familiers de la Compagnie XY, où un interprète se tient sur les épaules de l’autre, jusqu’à empiler trois personnes. D’autres figures jouent sur la gravité, les équilibres, lorsqu’un voltigeur tient sur la cuisse d’un autre ou fait tourbillonner son partenaire au ras du sol. Des motifs chorégraphiques se déplient aussi : un clin d’œil à la danse contact-improvisation de l’Américain Steve Paxton, où les interprètes sautent dans les bras les uns des autres. Plus tard, un danseur fait mine d’en appeler un autre avec son bras. Alors que le geste est répété plusieurs fois, on les croirait reliés à un tissu élastique, qui se tend et se détend. Toute la pièce est rythmée par ces tensions et ces relâchements, qui décrivent les relations entre les interprètes. Interroge-t-on ce qui relie les individus ? Ou peut-être comment faire collectif ?
Ces scènes se déploient avec douceur et poésie dans des paysages de mer et de forêt, projetés par intermittence en fond de scène, parfois sertis de fumigènes. Les gestes sont souples, étirés, moelleux, comme si ce Contre-nature évoquait l’organicité des mouvements du vivant. L’ensemble des figures sont maîtrisées, tout comme les transitions qui assurent une fluidité globale, mais, de cet ensemble, seuls quelques moments saillants se dégagent. On se perd dans la diversité des gestes et des tableaux, qui apparaissent, malgré leur grâce, un peu consensuels.
Belinda Mathieu – www.sceneweb.fr
Contre-nature
Chorégraphie Rachid Ouramdane
Avec des interprètes de la Compagnie de Chaillot : Joaquin Bravo, Clotaire Fouchereau, Löric Fouchereau, Peter Freeman, Emma Loïs, Maria Celeste Mendozi, Léo Merrien, Mayalen Otondo, Lucas Tissot, Aure Wachter, Owen Winship
Musique Jean-Baptiste Julien
Lumières Stéphane Graillot
Scénographie Sylvain Giraudeau
Vidéo Jean-Camille Goimard
Costumes Siegrid Petit-ImbertProduction Chaillot – Théâtre national de la Danse
Avec le soutien de Dance Reflections by Van Cleef & Arpels
Coproduction Bonlieu, Scène nationale d’Annecy ; Maison de la danse, Lyon – Pôle européen de création ; National Theater & Concert Hall (Taipei) ; Théâtre de Caen ; MC2: Maison de la Culture de Grenoble – Scène nationaleDurée : 1h
Chaillot – Théâtre national de la Danse, Paris
du 6 au 17 novembre 2024Palais des Festivals, Cannes
le 1er décembreLe Grand R, Scène nationale de La Roche-sur-Yon
les 9 et 10 décembreBonlieu, Scène nationale Annecy
du 17 au 20 décembreOpéra de Dijon
le 15 janvier 2025Théâtre Edwige Feuillère, Vesoul
le 17 janvierThéâtre d’Orléans, Scène nationale
les 22 et 23 mai
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