Reprise de l’un des succès de la saison 2011/2012. Cette adaptation brillante de l’œuvre de Thomas Bernhard, Des arbres à abattre, par Célie Pauthe et Claude Duparfait parle avec finesse du racisme, de la montée de l’extrémisme. Claude Duparfait s’est vu décerné le prix du meilleur comédien en 2012 par le Syndicat de la Critique.
Thomas Bernhard a beaucoup écrit pour le théâtre. Mais c’est un roman qu’ont choisi d’adapter Célie Pauthe et Claude Duparfait, Des arbres à abattre. Dans cette œuvre Thomas Bernhard décrit un homme, confortablement assis dans un « fauteuil à oreilles », observant des artistes discourir sur le monde, le théâtre, à l’issue des obsèques d’une jeune fille, Joanna, qui s’est suicidée. Pendant la première partie du spectacle, Claude Deparfait est seul, engoncé dans son fauteuil. Pendant une heure il décrit cette société « pseudo-artistique » viennoise que déteste tant Bernhard. Ce monologue est passionnant. On est embarqué dans la description minutieuse de chaque caractère des personnages. Claude Duparfait nous tient en haleine, excellent dans cette posture de misanthrope.
Puis les personnages font leur entrée dans la pièce : le couple Auersberger qui organisé le dîner (Hélène Schwaller et François Loriquet), une romancière Jeannie Billroth (Annie Mercier) et un vieux comédien du Burgtheater (Fred Ulysse). Claude Duparfait se tait, observe et écoute. Célie Pauthe et Claude Duparfait ont réalisé un découpage époustouflant du roman de Bernhard qui n’est pas dialogué et qui est composé de longues phrases (dont certaines tiennent souvent sur une page).
Cette deuxième partie dialoguée est tout aussi passionnante que le monologue. On sourit au débat sur Strindberg et Ibsen. Le vieux comédien du Burg (magnifique Fred Ulysse) ne jure que par le personnage d’Ekdal du Canard Sauvage d’Ibsen plus que par celui d’Edgard dans La danse de la mort de Strindberg. On est ému par la danse de Joana qui apparaît sur un voile sur la musique de Boléro de Ravel. On est ravi de retrouver Annie Mercier dans une coupe de cheveux qui lui va à ravir. François Loriquet interprétant le compositeur Auersberger se lance dans une improvisation endiablée au piano. Ivre, il lâche : « l’humanité mérite d’être exterminée ! ». Tout dans le discours de ce roman, écrit en 1984, cinq ans avant le mort de Bernhardt, illustre la montée de l’extrémisme, du racisme, de l’intolérance qui ont ensuite essaimé l’Europe, et en premier lieu l’Autriche.
Célie Pauthe et Claude Duparfait ont réussi une adaptation audacieuse de l’œuvre de Bernhard. Ce n’était pas joué d’avance. Ils le font avec beaucoup d’intelligence et de simplicité.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Des arbres à abattre
d’après le roman de Thomas Bernhard
traduction de l’allemand Bernard Kreiss
un projet de Claude Duparfait et Célie Pauthe
adaptation et mise en scène Claude Duparfait
en collaboration avec Célie Pauthe
scénographie Marie La Rocca
lumière Patrice Lechevallier
vidéo Mammar Benranou
costumes Mariane Delayre
son Aline Loustalot
stagiaire en dramaturgie Clémence Bordier
avec Claude Duparfait, François Loriquet, Annie Mercier, Hélène Schwaller, Fred Ulysse
et la participation d’Anne-Laure Tondu
production La Colline – théâtre national
L’Arche Éditeur est agent théâtral du texte.
L’œuvre de Thomas Bernhard est publiée aux Éditions Gallimard
Durée: 2h05
Théâtre National de la Colline
Petit Théâtre
du 11 au 28 septembre 2013
du mercredi au samedi à 21h, le mardi à 20h et le dimanche à 16h
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