En questionnant l’art préhistorique, le collectif bordelais tricote une pièce à la fois drôle et philosophique, intéressante, mais inaboutie.
Une chose est sûre : il faut être sacrément culotté pour choisir la préhistoire comme thème pour un spectacle. Évidemment, cette période charrie son lot de mystères, de fantasmes, et même de drôlerie. Mais qu’en faire sur les planches ? Et pour en dire quoi ? Curieux, on attendait OS’O au tournant. Réputé pour son humour absurde et la singularité de ses partis-pris, le jeune collectif bordelais avait de quoi relever le défi. D’autant que ce Caverne s’imposait comme l’un des temps forts de l’édition 2024 du Festival international des Arts de Bordeaux. Résultat ? Un spectacle qui laisse songeur, car l’on ne sait pas exactement où la troupe a voulu en venir, mais que, malgré tout, leur pièce fourmille d’idées.
Dans Caverne, il y a différentes histoires — ou, pour s’exprimer de façon plus contemporaine, différents tableaux : un petit groupe de touristes qui visite les grottes de Lascaux, emmené par une guide avec un fort accent du Sud ; un chercheur en anthropologie de la préhistoire qui tente de renouer les liens distendus avec sa fille après la mort de sa femme ; une artiste chargée de la reproduction des peintures à destination du grand public ; deux spéléologues à la recherche d’une fresque coincés dans les entrailles de la Terre ; et cet individu qui fera irruption d’une scène à l’autre, comme une figure décalée de l’homme préhistorique avec ses peaux de bêtes et son drôle de bagout — le fou, le sage, le bouffon, c’est selon.
Reconnaissons de belles idées de mise en scène. À commencer par la visite de la grotte, où le théâtre devient une caverne que l’on découvre une lampe torche à la main. L’effet est à la fois saisissant, en ce qu’il rapproche toutes les expériences esthétiques — des plus archaïques aux plus modernes —, et drôle pour la naïveté des propos tenus par les touristes. Chez OS’O, il y a toujours deux mouvements contraires qui s’affrontent : le propos rationnel, sous-tendu par les recherches effectuées par le collectif sur un sujet donné, et une pulsion plus enfantine, plus absurde, plus insolente, à l’image de cet homme préhistorique qui brouille les époques, mélange les références, et sert de fil conducteur entre les différentes scènes. Cette tension crée du rythme, des moments de respiration, et capte l’attention du public.
Des idées émergent, indéniablement — l’impossibilité d’interpréter ces fresques, la distance qui nous sépare de ces êtres anciens, l’atemporalité de l’expérience esthétique —, mais plusieurs tableaux s’imbriquent mal dans l’ensemble : l’ado qui parle à son père est un peu hors sujet ; les deux spéléologues, frère et sœur, qui se retrouvent avant de mourir, auraient également pu servir à créer une pièce à part entière. Le propos se brouille. Les émotions se perdent. La troupe compose ses spectacles de façon collective, et peut-être faut-il trouver là la raison de cet éparpillement. Finalement, cette pièce ressemble aux fresques en question : une énigme qui travaille l’imagination, mais laisse un peu pantois.
Igor Hansen-Løve — www.sceneweb.fr
Caverne
Écriture Olivia Barron, Vincent Toujas, Tom Linton
Avec Elsa Bosc, Roxane Brumachon, Bess Davies, Mathieu Ehrhard, Baptiste Girard, Shanee Krön, Tom Linton
Scénographie Hélène Jourdan
Lumières Jérémie Papin
Costumes Aude Desigaux
Création sonore et musique Martin Hennart
Régie générale Benoit LepageProduction déléguée Collectif OS’O
Coproduction La Passerelle, Scène nationale de Saint-Brieuc ; Scène nationale Carré-Colonnes, Bordeaux Métropole ; L’Odyssée, Scène conventionnée de Périgueux ; L’OARA ; l’iddac agence culturelle du Département de la Gironde ; le Théâtre du Champ au Roy à Guingamp ; le Théâtre Ducourneau à Agen ; le Théâtre de l’Union CDN de Limoges ; Scène nationale du Sud-Aquitain.
Avec le soutien de l’iddac, du Théâtre national de Bordeaux en Aquitaine, du CENTQUATRE-PARIS et du Théâtre du Rond-PointDurée : 1h50
Scène nationale Carré-Colonnes, Blanquefort, dans le cadre du FAB
du 8 au 11 octobre 2024Théâtre de l’Union, CDN du Limousin, Limoges
du 16 au 17 octobreCentre Simone Signoret, Canéjan
le 22 novembreL’Odyssée, Périgueux
les 3 et 4 février 2025Centre Culturel de Sarlat
le 6 févrierThéâtre Ducourneau, Agen
le 11 févrierThéâtre Le Liburnia, Libourne
le 13 févrierLe Champ de Foire, Saint-André-de-Cubzac
le 18 févrierM.270, Floirac
le 21 févrierThéâtre du Champ au Roy, Guingamp
les 31 mars et 1er avril
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !