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« Portrait de famille » : Sivadier fait sa fête à la tragédie

Clermont-Ferrand, Coup de coeur, Les critiques, Lyon, Paris, Saint-Quentin-en-Yvelines, Sénart, Théâtre, Toulon
Portrait de famille de Jean-François Sivadier
Portrait de famille de Jean-François Sivadier

Photo Marie Clauzade

Jean-François Sivadier fait briller 14 anciens élèves de la promotion 2023 du Conservatoire National dans un Portrait de famille, une histoire des Atrides qui concentre en 3h30 toute la violence issue de la folle lignée légendaire. Thyeste qui dévore ses enfants, la guerre de Troie et la vengeance d’Oreste donnent paradoxalement naissance à une grande fête théâtrale à l’esprit shakespearien, où l’émotion, le politique et le rire se nourrissent du terreau des tragédies antiques.

Quelle chance se dit-on pour les élèves sortis en 2023 du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique de se lancer avec ce spectacle. Dans Portrait de famille, iels sont 14, soit environ la moitié de la promotion, à fouiller les entrailles de la mythologie, à reconstituer l’histoire maudite de cette horrible lignée des Atrides dont les meurtres et guerres ont abreuvé la littérature théâtrale antique, par ordre chronologique : Euripide, Eschyle, Sophocle, Sénèque. Une galerie des horreurs qui démarre par le crime d’Atrée, qui tue les enfants de son frère Thyeste et les lui fait manger, lançant une malédiction sur sa famille qui s’achèvera par la vengeance d’Oreste sur Egisthe, amant de Clytemnestre et meurtrier d’Agamemnon, père d’Oreste. Rien qu’à rapporter cela, on s’emmêle déjà un peu les pinceaux. Et ces histoires mythologiques apparaissent aussi embrouillées que celles qu’on découvre à l’occasion d’un grand repas de famille quand on ne sait plus qui est qui, le fils, la mère, le cousin… Portrait de famille en joue, s’en moque. Même si l’on passe son temps à tester ses souvenirs de mythologie, on s’amuse aussi beaucoup à redécouvrir tout ce qu’on avait oublié et d’apprendre ce qu’on n’avait jamais su.

C’est finalement sur deux générations seulement que se déploie cette incroyable somme de violences qui a constitué les bases du théâtre de notre culture occidentale dont le plat principal, le centre, est ici l’infanticide sacrifice d’Iphigénie qui lève le vent des navires et lance la guerre contre Troie. Encore fallait-il pour cela rappeler l’histoire de la pomme et du jugement de Pâris qui occasionna l’enlèvement d’Hélène, élue plus belle femme du monde. On croise donc Achille, Hector, Priam, Ménélas… tous ces noms qui abreuvent le récit d’Homère ici représenté comme un reporter embedded sur le champ de bataille et son fameux cheval. Jean-François Sivadier, qui aime à concevoir le théâtre comme une fête, s’en est donné à cœur joie. Pour satisfaire l’appétit de jouer de ces 14 élèves, il a constitué un spectacle de 3h30, infléchi et enrichi d’improvisations au plateau, où les personnages et les genres s’entremêlent à l’envi. A la fin, on convie le théâtre, on congédie les Dieux. Et en compagnie de cette belle troupe de comédiennes et comédiens prometteurs, on se dit que sans la religion l’avenir pourrait être radieux. Ou pas.

Car – et c’est aussi le talent de Sivadier – la fête théâtrale n’est pas superficielle, ni sans profondeur. Le sacrifice d’Iphigénie arrache des pleurs. La violence, l’enchaînement des vengeances et les dénégations de chacun quant à sa responsabilité résonnent fort avec l’actualité. Les fausses raisons d’État, les instincts qui se parent de discours, les appétences mal dissimulées à la gloire et les aveuglements criminels affleurent de partout. Et lorsque Cassandre est ramenée de Troie comme un trophée de chasse, ses prédictions sibyllines se font tout d’un coup bien claires quant aux malheurs qui s’avancent aujourd’hui et qu’on ne veut pas voir. Ce Portrait de famille, c’est aussi celui d’une humanité pleine de violence et de mauvaise foi qui n’est pas que celle de l’Antiquité, mais bien la nôtre, celle d’un monde qui aime à se dire civilisé.

Alors, parfois, les conflits interpersonnels qui structurent l’action théâtrale traînent un peu, ou peuvent se faire répétitifs. Mais, de ruptures en blagues, d’adresses public en parodies, d’inventivité en qualités de jeu, et en capacité à faire naître des types de personnages, les 14 du Cons’ tuilent parfaitement leurs partitions et leurs morceaux de bravoure. On ne s’adonnera pas au jeu cruel d’en faire ressortir tel ou telle quand on sait la carrière minée par l’hyper concurrence. La mise en scène ne recule pas devant les grands effets – coups de tonnerre, musiques entraînantes et décalées –, mais recourt aussi aux simples paravents. Le fantastique d’Iphigénie qui lorsqu’on la tue se transforme en biche débouche sur du Labiche où se mêlent vaudeville, évocations brechtiennes et bien sûr shakespeariennes, l’autre grand écrivain des violences politiques dont l’esprit plane un peu partout ici. Quand le théâtre est ainsi débridé, profond et irrévérencieux, forcément, le grand écrivain anglais n’est jamais loin.

Eric Demey – www.sceneweb.fr

Portrait de famille, une histoire des Atrides
Texte et mise en scène Jean-François Sivadier
Avec une partie de la promotion 23 du CNSAD-PSL Cindy Almeida de Brito, Manon Leguay, Arthur Louis-Calixte, Alexandre Patlajean, Marcel Yildiz, Walid Caïd, Aristote Luyindula, Elena El Ghaoui, Rodolphe Fichera, Marine Gramond, Mohamed Guerbi, Olek Guillaume, Olivia Jubin, Sébastien Lefebvre
Collaboration artistique Rachid Zanouda
Lumière Jean-Jacques Beaudouin
Scénographie étudiants en 4e année à l’Ecole des Arts Décoratifs – Paris Xavi Ambroise, Martin Huot, Violette Rivière
Costumes Valérie Montagu
Son Jean-Louis Imbert
Régie générale et régie son Jean-Louis Imbert
Régie lumière Jean-Jacques Beaudoin
Régie plateau Marion Leroy
Habilleur Yann Pagès

Production déléguée Cie Italienne avec Orchestre
Coproduction Théâtre et Auditorium de Poitiers, scène nationale ; L’Azimut, Antony/Châtenay-Malabry
En partenariat avec le Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique-PSL et l’Ecole des Arts Décoratifs – Paris
Avec la participation artistique du Jeune Théâtre National

La compagnie Italienne avec Orchestre est aidée par le Ministère de la Culture/Direction Régionale des Affaires Culturelles d’Ile-de-France, au titre de l’aide aux compagnies.

Durée : 3h50 (entracte compris)

Vu en mai 2024 au Printemps des Comédiens, Montpellier

Théâtre du Rond-Point, Paris
du 19 au 29 juin 2025

Châteauvallon-Liberté, Scène nationale de Toulon
du 12 au 14 mars 2026

Théâtre-Sénart, Scène nationale, Lieusaint
les 21 et 22 mars

Théâtre de Saint-Quentin-en-Yvelines et L’Onde Théâtre Centre d’Art, Vélizy-Villacoublay
du 26 au 28 mars

La Comédie de Clermont-Ferrand
les 5 et 6 mai

Les Célestins, Théâtre de Lyon
du 10 au 13 juin

19 juin 2025/par Eric Demey
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