Imaginé par Pierre-Yves Chapalain, le spectacle itinérant de la 76e édition du Festival d’Avignon peine malheureusement à convaincre, et à aller au-delà de quelques idées pré-conçues.
Au Théâtre de Verdure de Courthézon où le spectacle itinérant de la 76e édition du Festival d’Avignon a, mercredi 12 juillet, posé ses valises, un invité surprise s’est, au fil de la soirée, glissé parmi les spectateurs. Profitant de la pierre chaude de ce petit théâtre antique, un chat sauvage, gris et blanc, est venu s’installer en haut du gradin, tel le lointain cousin de celui de la Cour d’honneur qui, cette année, n’a pas gratifié le public du Palais des Papes de sa présence, au soir de la première du Moine noir de Kirill Serebrennikov. Discrète et attentive, cette manifestation féline a valeur de symbole pour la pièce de Pierre-Yves Chapalain qui entend se situer À l’Orée du bois – et, pour l’occasion, au coeur du beau jardin de la mairie de Courthézon.
Bien consciente de son rôle, la nature a, d’ailleurs, décidé de s’immiscer plus avant dans l’affaire : tandis que les paons n’en finissent plus de brailler et les cigales de cymbaliser, les buses tournoient à proximité du plateau. On ne peut alors que regretter que le spectacle, centré sur les défis de l’exode rural et de la ruralité, n’ait pas cherché à jouer plus franchement avec ce cadre bucolique, qui aurait pu lui offrir l’élan vital dont il manque cruellement. Car, sur la mini-scène posée là, faite de cagettes déstructurées et de planches de bois sur lesquelles un peu de terreau a été déversé, les trois acteurs, Pierre-Yves Chapalain, Madeleine Louarn et Kahena Saïghi, paraissent rapidement à bout de souffle, et le texte cousu par le premier en panne sèche.
Imaginé pendant le confinement, À l’Orée du bois s’impose comme le point de rencontre de trois mondes, au gré de l’installation d’un couple d’urbains dans une maison dont ils ont hérité : lui incarne la figure de l’intellectuel patenté, hypocondriaque et paniqué, qui rechigne à se salir les mains ; elle, une Manon des sources en devenir, fascinée par la nature, en quête d’une vie authentique, adepte de balades nocturnes dans les bois qui la conduisent jusqu’à des fêtes clandestines au sujet desquelles, mises à part quelques nappes sourdes, rien ne filtre vraiment. Organisées par un mystérieux « homme aux yeux verts », elles inquiètent la maire du village, sorte de narratrice-commère, qui voudrait tout régir, mais se contente de tout commenter. Alors qu’elle aurait pu se transformer en polar rural haletant, cette pièce pointe certains enjeux – la rencontre compliquée entre néo-ruraux et ruraux de naissance, les difficultés d’adaptation des urbains à un autre mode de vie, la lutte entre voisins pour s’approprier la terre, le conflit entre les générations –, sans jamais réellement parvenir à les exploiter et à les dépasser.
La faute à une langue qui, entre la simplicité, propre à l’adresse directe au public, et le lyrisme, qui théâtralise maladroitement l’ensemble, ne sait plus sur quel pied danser ; la faute à un texte qui ne cherche jamais à interroger les fantasmes charriés par un sujet complexe ; la faute, enfin, à un trio de comédiens qui manque de dynamisme et d’allant. Accompagnés par le musicien Pablo Pensavalle, ils semblent un peu perdus au milieu de cette mise en scène où tous les éléments, à commencer par la musique, sont superposés plutôt que d’être imbriqués. Dès lors, il est difficile de voir où cet Orée du bois veut nous conduire, au-delà du ressassement de quelques idées pré-conçues. Un écueil regrettable pour un spectacle décentralisé, qui, au fil des années, s’était pourtant imposé comme l’un des rendez-vous fertiles du Festival d’Avignon.
Vincent Bouquet – www.sceneweb.fr
À l’Orée du bois
Texte Pierre-Yves Chapalain
Mise en scène Pierre-Yves Chapalain, Kahena Saïghi
Avec Pierre-Yves Chapalain, Madeleine Louarn, Kahena Saïghi et le musicien Pablo Pensavalle
Musique Pablo Pensavalle
Assistanat à la mise en scène Jonathan Le BourhisProduction Espace des Arts Scène nationale Chalon-sur-Saône, Compagnie Le temps qu’il faut
Avec le soutien de la Drac Bretagne – ministère de la Culture
En partenariat avec France Bleu VaucluseDurée : 50 minutes
Festival d’Avignon 2022
du 8 au 26 juillet
en itinérance :
Collège Anselme Mathieu, Avignon
le vendredi 8, à 20hEspace Baron de Chabert, Barbentane
le samedi 9, à 20hThéâtre de Verdure, Courthézon
le mardi 12, à 20hL’Alpilium, Saint-Rémy-de-Provence
le mercredi 13, à 20hSalle des fêtes, Mondragon
le jeudi 14, à 20hSalle des fêtes, L’Isle-sur-la-Sorgue
le vendredi 15, à 20hCour du Château d’Aramon
le samedi 16, à 20hJardin Ceccano, Avignon
le lundi 18, à 12hSalle Roger Orlando, Caumont-sur-Durance
le mardi 19, à 20hSalle polyvalente de Saze
le mercredi 20, à 20hCentre départemental de Vaucluse, Rasteau
le jeudi 21, à 20hCour du château de Vacqueyras
le vendredi 22, à 20hSalle des fêtes L’Arbousière, Châteauneuf-de-Gadagne
le samedi 23, à 20hSalle des fêtes La Pastourelle, Saint-Saturnin-lès-Avignon
le lundi 25, à 20hPôle culturel Camille Claudel, Sorgues
le mardi 26, à 20h
Navrant ! Désolée pour les comédiens qui jouent bien. Pour le reste moi non plus je n’ai pas compris où l’auteur voulait nous emmener, je suis restée jusqu’à la fin par politesse mais quel ennui !