Génération sceneweb (5/30). La chorégraphe Jann Gallois séduit avec son hip hop résolument contemporain. L’avenir lui appartient.
Il faut un rien d’audace –ou d’inconscience- pour nommer sa compagnie BurnOut créée en 2012. Jann Gallois n’en manque pas. Compact ou Quintette ont marqué les esprits depuis. Mandala, projet pour 30 danseurs amateurs, devrait voir le jour en 2021. « Ces dix dernières années m’ont permis de faire pleinement l’expérience de ce que signifie un « engagement de vie » témoigne Jann avouant au passage avoir peu de « vie sociale et familiale », tout entière occupée par ses créations. « Plus j’avance dans ma carrière et plus je réalise que l’acte artistique est un acte d’une importance immense dans notre monde si perturbé. J’y vois même aujourd’hui une dimension spirituelle dans le sens où il permet de rendre manifeste la plus belle partie de l’homme, centrant son intelligence au service de la beauté et cherchant à sublimer chacune des forces et des faiblesses qui le composent. Toujours chercher à grandir tout en offrant la possibilité aux autres de faire de même, là est le sens même de ce métier. »
En cette période de crise sanitaire, la chorégraphe s’est replongée dans l’écriture d’un livre en chantier depuis quelque temps et anticipe la pré-production de ses prochaines pièces. Le quotidien d’une compagnie de danse même en mode pause n’est jamais de tout repos. « Cette pandémie arrive évidemment comme un grand choc. Elle nous met face à une écrasante réalité que l’on ne peut plus fuir : la vulnérabilité de notre système et, bien évidemment, de notre vie. Mais comme tout évènement marquant, je suis persuadée que cette période de pandémie est là pour un bien. Ou du moins pour commencer à préparer un mieux, même si cela va sans doute prendre du temps et demander une forme de « sacrifice » (encore une fois) de tout un chacun« . Jann Gallois voit ainsi le rôle de l’artiste aujourd’hui : « J’imagine que le peuple attend d’un politique qu’il parle en son nom, d’un journaliste qu’il lui transmette des informations, d’un religieux qui le guide, et d’un artiste tout ceci à la fois. Seulement, le rôle primordial d’un.e artiste avertis est surtout de questionner avant de prendre position. » Elle ne voit pas le vivant disparaître des scènes au profit du virtuel et salue les avancées des artistes féminines. « J’ai le sentiment de faire partie d’une première génération de femmes qui récolte enfin les fruits du combat héroïque qu’ont accompli des centaines de femmes auparavant et dont je suis profondément reconnaissante. »
Est-elle une voix de cette génération ?
A sa façon, sans doute un peu. Jann Gallois voudrait lui dire avant tout cela : « Que le temps est précieux, qu’il serait dommage de le gâcher dans des activités dénuées de sens car il y a bien plus beau à portée de main. Que tout est impermanent et qu’il n’est jamais trop tard pour faire changer le cours des choses. Mais surtout, que depuis les prémisses de l’existence de l’homme, la Nature, sûre et fière de son capital de beauté, lui lance ce défi : « Voilà ce que j’ai fait en matière de beauté, et toi que feras-tu ? » » On imagine qu’après deux confinements en 2020 Gallois veut retrouver un peu d’espace pour sa danse. Elle a d’ailleurs pris ses marques à Chaillot en ce mois de novembre, travaillant au plus près du corps. La danseuse qu’elle est également est-elle devenue plus forte ? « Plus forte non je ne pense pas, mais plus sensible oui c’est certain ».
Philippe Noisette – www.sceneweb.fr
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