Angelin Preljocaj l’œuvre au noir

Wintereisse d’Angelin Preljocaj photo JC Carbonne

Le chorégraphe aborde les 24 lieder de Schubert pour la première fois : son Winterreise a renversé cet été le public de Montpellier Danse. Le spectacle est en tournée. 

Après le succès public et critique de Gravité, sa précédente création dévoilée à la Biennale de Danse de Lyon l’automne dernier, Angelin Preljocaj s’est tout de suite remis au travail. Il a décidé d’aborder un monument de la musique européenne Winterreise de Franz Schubert. Un long voyage vers la nuit. Dès l’ouverture du ballet des corps inertes comme recouverts de cendre –en fait du papier- vont peu à peu s’éveiller à la vie jusqu’à ce nouveau crépuscule. Preljocaj déploie sur scène toutes les nuances de noir dans la première partie de Winterreise. Sans jamais illustrer la partition -au piano James Vaughan, au chant Thomas Tatzl– le chorégraphe sait accélérer la cadence au bon moment accentuant les sauts par instant, ralentissant le tempo le temps d’un trio avec des portés enveloppés.

Les 12 solistes sont au diapason, graves et concentrés. Chaque lieder, il y en a 24, devient dès lors une micro chorégraphie de quelques minutes. Preljocaj se renouvelle sans cesse solo éploré par ci, ensemble tout en énergie par là. Au risque parfois du trop-plein. On sent surtout que la pièce a été pensée pour une compagnie de ballet au langage avant tout classique, la Scala de Milan. Il n’y a pas de pointes mais un travail appuyé sur la gestuelle des bras ou le pas de deux.

La version présentée à Montpellier est portée par le Ballet Preljocaj. La fluidité viendra au fil des tournées. D’ores et déjà certaines séquences bouleversent comme ces danseuses éventail la main et « soufflant » le mouvement du partenaire. Ou ces passages d’une danse comme un cocon emprisonnant le mouvement. Des couleurs vont s’imposer au final, longues jupes pour homme et femme, irisées. Il y a peut-être un espoir. Des cintres une pluie de confettis sombres vient adoucir la peine. Ce Voyage d’hiver en plein été en aura transporté plus d’un.

Philippe Noisette – www.sceneweb.fr

WINTERREISE
CRÉATION 2019
Pièce pour 12 danseurs

Chorégraphie
Angelin Preljocaj

Musique
Franz Schubert, Die Winterreise

Scénographie
Constance Guisset

Lumières
Éric Soyer

Baryton
Thomas Tatzl

Piano
James Vaughan

Assistante à la création
Claudia De Smet

Choréologue
Dany Lévêque

Assistant, adjoint à la direction artistique
Youri Aharon Van den Bosch

Assistante répétitrice
Cécile Médour

Commande de
La Scala de Milan

Production
Ballet Preljocaj

Coproduction
Festival Montpellier Danse

Résidences de création
Les Salins – Scène Nationale de Martigues, Grand Théâtre de Provence – Aix-en-Provence

Théâtre des Champs-Elysées
du 28 au 30 janvier 2022