La rédaction de sceneweb.fr vous propose à partir d’aujourd’hui son Grand Palmarès de l’année, à travers 10 portraits d’artistes qui ont marqué cette année 2022. Avec à l’issue le palmarès de chaque journaliste. Philippe Noisette a choisi le chorégraphe américain Trajal Harrell, en résidence à Zurich qui mélange érudition et pop-culture dans un savant pas de deux.
« Dancer of the year », c’est ainsi que Trajal Harrell avait intitulé une de ses récentes créations. Un trait d’humour peut-être, une quasi prémonition à nos yeux. On garde en souvenir la douce fébrilité de l’américain, un soir de mars 2021 à la Fondation Cartier. Invité des soirées nomades, il donna un récital sensible composé d’extraits de son répertoire. Le tout sans public, pour les seules caméras, et diffusé en ligne, portait le beau titre de Friend of a friend. « J’espère que les danseurs vont comprendre ce que c’est d’être dans le moment. Ce qui compte est ce qui se passe maintenant. Surtout en cette période Covid. Cela ne se reproduira sans doute jamais » nous confia t’il alors.
Autant dire qu’il y avait quelque chose d’infiniment joyeux à retrouver Trajal Harrell et ses danseurs à la Biennale de danse de Venise en juillet dernier. Un vrai public, aux masques tombés, et une pièce Maggie the Cat irrésistible. Trajal Harrell, micro en main au-devant de la scène, avait des allures de MC improvisé. Une pièce célébrant la diversité et le voguing, le simple fait d’être soi. Et de le danser.
Après des études à la Trisha Brown School, au CN D puis à l’école de Martha Graham, Trajal Harrell développe une esthétique qui lui est propre : un axe théorique hérité de son passage à Yale University où genre, féminisme et post-colonialisme se télescopent. Et une attention portée aux formes mouvantes de la création, de la post-modern dance au voguing, du butô aux avant-gardes. Regarder un spectacle de Trajal Harrell c’est à la fois assister à un défilé de mode, une leçon d’histoire de la danse, une party. Il s’est plus d’une fois perdu dans des concepts brumeux, et nous avec, avant de reprendre une certaine vigueur ces temps-ci. The Köln Concert ou Maggie the Cat en sont les meilleurs exemples.
Pour la Schauspielhaus de Zurich, il invente sans cesse. The Romeo y sera créé en avril 2023. « Imaginez la danse que les gens de toutes origines, sexes et générations, de tous tempéraments et humeurs, exécutent lorsqu’ils ont laissé leurs tragédies derrière eux et se contentent de danser » résume Trajal Harrell. Une danse, qui sait, d’avant la danse. Mister Harrell n’a pas fini d’être notre chorégraphe « of the year ».
Philippe Noisette – www.sceneweb.fr
Le palmarès 2022 de Philippe Noisette
Théâtre : Krzysztof Warlikowski,
L’Odyssée. Une histoire pour HollywoodDanse : Carcass, Marco Da Silva Ferreira
Espoir(s) Bleuenn Battistoni ( Opéra de Paris)
Sephora Pondi (Comédie Française)Ensemble : One Song ! conception Met Warlop
Avec Simon Beeckaert, Kris Auman, Elisabeth Klinck, Willem Lenaerts, Milan Schudel, Melvin Slabbinck, Joppe Tanghe, Karin Tanghe, Wietse TangheInterprète de l’année : Marion Barbeau et Mellina Boubetra
Déception de l’année : François Alu
Personnalité de l’année : Alain Platel
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