Chorégraphe régulièrement invité à Montpellier Danse, Emanuel Gat est programmé pour la première fois au Festival d’Avignon. On lui a confié la Cour d’honneur pour le deuxième spectacle de la 72e édition. Story Water est un spectacle exigeant et éminemment politique.
Emanuel Gat ouvre Story Water par une pièce musicale de Pierre Boulez. Il fait dialoguer deux quintets de danseurs sous le regard de l’Ensemble Modern de Francfort. Le plateau de la Cour d’honneur est blanc comme neige, tout comme les costumes des musiciens et des danseurs. Le chorégraphe avait imaginé dans un premier temps colorer les corps de ses interprètes comme il l’a fait régulièrement ces dernières années, notamment dans ses Works à Montpellier Danse. La pureté des pierres du Palais des Papes l’en a dissuadé.
Il occupe magnifiquement l’espace ; les musiciens de l’Ensemble Modern sont à jardin, tandis que les deux groupes de danseurs se croisent, en reproduisant à l’identique et en décalage des figures géométriques avec une précision millitrée dans un dialogue avec la musique. Il règne une telle énergie sur le plateau que les danseurs vont vibrer les premiers rangs des spectateurs. A la musique de Boulez succède celle de Rebecca Saunders pour une contrebasse solo. Le musicien prend place au milieu du plateau face à ses collègues musiciens, les danseurs revêtent des tuniques planches en papier mâché. L’envoûtement se poursuit.
Emanuel Gat a surpris tout le monde hier dans le tableau suivant dédié à Gaza et à ses enfants martyrs, lui le chorégraphe de nationalité israélienne. Des chiffres chocs sont projetés sur les murs du Palais des Papes rappelant que 69% des jeunes à Gaza sont au chômage et que 98% de l’eau est non potable. La partition musicale devient plus folklorique, elle s’appelle d’ailleurs FolkDance, elle composée par Gat lui-même et par l’Ensemble Modern. C’est un savant mélange de sonorités méditerranéennes et de l’hymne de la confédération sudiste américaine. Histoire de souligner l’ingérence des Etats-Unis dans la politique israélienne, quelques mois après le déménagement de son Ambassade de Tel Aviv à Jérusalem.
Emanuel Gat livre une chorégraphie énergique et vibrante. Il est là où on l’attendait peut-être pas, engagé politiquement. Il y a très longtemps qu’un spectacle de danse n’avait été autant envoûtant dans la Cour d’honneur du Palais des Papes.
Stéphane CAPRON – www.scenenweb.fr
Story Water
Avec Arnaud Bacharach, Thomas Bradley, Robert Bridger, Péter Juhász, Zoé Lecorgne, Michael Löhr, Emma Mouton, Eddie Oroyan, Karolina Szymura, Milena Twiehaus, Sara Wilhelmsson, TingAn Ying
Et Saar Berger (cor français), Jaan Bossier (clarinette), Paul Cannon (contrebasse, soliste Fury II), Eva Debonne (harpe), David Haller (percussion), Christian Hommel (hautbois), Stefan Hussong (accordéon), Megumi Kasakawa (alto), Michael M. Kasper (violoncelle), Giorgos Panagiotidis (violon), Rainer Römer (percussions), Johannes Schwarz (basson), Ueli Wiget (piano)
Chorégraphie, scénographie et lumière Emanuel Gat
Musique Pierre Boulez, Emanuel Gat & Ensemble Modern, Rebecca Saunders
Chef d’orchestre Franck Ollu
Collaboration lumière Guillaume Fevrier Costumes Thomas Bradley
Son Norbert Ommer
Effets électroniques live Felix DreherProduction Emanuel Gat Dance, Ensemble Modern et Frankfurt LAB e.V. Financée par Kulturfonds Frankfurt RheinMain, la ville de Francfort et l’Ensemble Modern Patronatsgesellschaft e.V.
Coproduction Emanuel Gat Dance Chaillot-Théâtre national de la danse, Festival d’Avignon, deSingel campus international des arts, Pôle Arts de la Scène – Friche la Belle de Mai Avec le soutien de la Fondation BNP Paribas
Résidence à La FabricA du Festival d’Avignon
Coproduction Ensemble Modern Beethovenfest Bonn, Künstlerhaus Mousonturm
Durée: 1h15Festival d’Avignon 2018
Cour d’honneur du Palais des Papes
du 19 au 23 juillet 2018 à 22hChaillot
Du 9 au 13 janvier 2019
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