Avec Audrey Bonnet, Stanislas Nordey interprète ce couple qui se sépare dans Clôture de l’amour de Pascal Rambert. C’est le coup de cœur du Festival d’Avignon. Un grand texte, un théâtre poignant qui va droit au cœur avec deux comédiens excellents. Rencontre avec Stanislas Nordey
Beaucoup de spectateurs reçoivent ce spectacle comme un choc. Comment vous le ressentez sur scène ?
Il y a un engagement total, un double engagement, du corps et de l’esprit. Pascal Rambert met en scène deux artistes, deux intellectuels qui ont un rapport à la construction de la langue très fort. D’une certains manière, il n’y a pas de répits. C’est épuisant et passionnant parce que l’on vit pour cela lorsque l’on est acteur.
Au début du spectacle, votre personnage dit « ce n’est pas un combat », mais on assiste tout de même à un combat…
Oui ils disent des choses et ils en font d’autres. C’est une séparation, une rupture. Pour véritablement rompre il faut être dur avec l’autre. Il faut couper le cordon. Cela passe par une extrême violence. La fin de l’amour c’est sanglant, c’est une boucherie. Et c’est ce que Pascal a su magnifiquement écrire. On doit abattre l’autre pour survivre. A un moment donné le personnage dit « c’est toi ou c’est moi ». On est comme dans une guerre napoléonienne, avec des baïonnettes, les yeux dans les yeux.
Pascal Rambert a écrit le texte pour vous, comment l’avez reçu à la première lecture ?
C’est assez troublant de lire un texte où l’on se nomme. D’autant plus qu’avec ce sujet on va forcément puiser dans ses propres ruptures et dans ses propres blessures. Il y a un moment où c’était dur pendant les répétitions. C’était insupportable d’entendre tout ce qu’elle me disait. Ensuite on met de la distance. Cela crée un effet de réel passionnant.
On est dans le réel, mais on est dans le théâtre. D’ailleurs la pièce se déroule dans une salle de répétition. C’est du théâtre dans le théâtre.
C’est une des intelligences de la mise en scène, de travailler avec des effets miroirs. On peut même se demander s’ils jouent une scène ou si c’est leur vraie vie. Ca donne une force supplémentaire au texte. On peut y voir une réflexion sur le théâtre et sur l’art de l’acteur, car c’est aussi un cadeau, car il a écrit pour nos corps et pour nos débits. Cette question du fonctionnement de l’acteur figure dans le spectacle.
C’est un spectacle physique qui vous demande beaucoup. Comment en sortez-vous physiquement ?
On perd beaucoup d’eau ! Les spectateurs sont étonnés car ils trouvent que la couleur de mon t-shirt change. C’est juste parce qu’au début la couleur est jaune et ensuite il devient orange.
Et du coup on découvre l’inscription…
Voilà c’est magique. Donc on en sort épuisé pas tant que cela, car il y a une dynamique qui éveille l’acteur. Ensuite on passe des journées tranquilles, car il faut pourvoir être sur le ring en forme. D’autant que le décor est à nu, on est donc très exposé, voir surexposé.
Le hasard des textes fait que vous enchainez les monologues après Richter et Christophe Pellet.
C’est un hasard total. Mais les écritures n’ont rien à voir. A chaque fois l’énergie est différente, elle se déplace selon les langues proposées. Cela me permet de ne pas avoir le sentiment de répéter mais de décliner mon travail à travers différentes regards. Que du bonheur.
A la fin du spectacle les trois enfants du couplent arrivent et demandent à rentrer à la maison. Certaines personnes trouvent que ce moment est suranné. Qu’en pensez-vous ?
C’est un effet, c’est fait pour qu’on en discute. On en a beaucoup discuté avec Pascal Rambert. Il n’était pas totalement sur. Il ne sait pas d’ailleurs s’il va le conserver à Gennevilliers. C’est un retour au réel. Cela crée une ouverture. Vont-ils se séparer vraiment ? C’est joli, car cela crée un point d’interrogation. Il faudrait peut-être faire comme deux fins…
Propos recueillis par Stéphane CAPRON
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