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« R.O.B.I.N. » : nom de code pour la justice à hauteur d’enfant

A voir, Jeune public, Les critiques, Pantin, Paris, Théâtre
Paul Moulin et Maïa Sandoz créent R.O.B.I.N.
Paul Moulin et Maïa Sandoz créent R.O.B.I.N.

Photo Maïa Sandoz

Pour leur première incursion dans le champ du jeune public, Paul Moulin, Maïa Sandoz et Clémence Barbier gardent la belle insolence et cette forme d’espoir qui avaient déjà nourri notamment Zaï zaï zaï zaï et Beaucoup de bruit pour rien. Plus qu’un « prince des voleurs », R.O.B.I.N. est la jubilatoire traversée de deux enfants en lutte contre l’injustice, dans un conte dévoré par le monde actuel.

Attention, démarrage en trombe ! Paul Moulin, Maïa Sandoz et Clémence Barbier, qui ont souvent travaillé en duo, mais jamais en trio, ont une heure pour raconter une histoire sur deux générations, un procès et, plus encore, comment la société se fracture entre des riches qui veulent toujours plus et des moins bien nés qui n’ont vraiment plus rien. Tout cela en le mettant à portée d’enfants à partir de 8 ans, une première pour eux. Pour réaliser cette gageure, les auteurs ont inventé un texte extrêmement syncopé, en grande partie fondé sur les personnages – notamment féminins – qu’Alexandre Dumas a écrits. Deux acteurs et deux actrices – il y a deux distributions en tournée – incarnent tous les personnages, à commencer par ce couple qui s’est rencontré à une fête de la brioche. C’est la famille Desbois. Le garçon s’appelle Robin, sa petite sœur Christabelle. Le père travaille pour les espaces verts de la ville, la mère répare des « trucs ». Ils croulent sous les factures, « mais ça va ». À l’opposé de l’échelle sociale, Guy de Guisbourne règne sur la ville, met des interdits partout : ne pas faire de bruit, ne pas courir dans les escaliers, et ne pas aller dans la forêt pendant qu’il se fait livrer des bébés pingouins pour se nourrir.

Le décor narratif est planté en quelques minutes pendant lesquelles le quatuor est devenu l’un ou l’autre des personnages, adulte ou enfant. Tout s’enchaîne rapidement, y compris une agression dans la cour de récré, décisive. Robin est traité de « sale pauvre » par la gosse de riche. Son chagrin « visqueux et humiliant » est au cœur d’une colère, matrice de ce spectacle. Car si le titre ne s’orthographie pas comme le prénom, mais en majuscules séparées de points, c’est qu’il se réfère à l’acronyme d’une organisation pour la Révolution oblique des brigands pour l’indépendance et la nature. R.O.B.I.N. n’est pas une bluette. Terminés les contes. Bienvenue dans la violence du monde contemporain et quoi d’autre à faire que de lutter avec acharnement contre l’injustice ? Encagoulés, des individus (eux) se font justice juste avant la deuxième partie de cette création consacrée au procès de Christabelle ; la première partie ayant consisté à résumer leurs vies de misère jusqu’à tomber dans un misérabilisme, qu’avec un sens du rythme indéniable et un art du théâtre très maitrisé, Paul Moulin, Maïa Sandoz et Clémence Barbier font twister par cette phrase qui tombe à point nommé : « Vous trouvez qu’on exagère ? ».

Les thématiques abordées, comme l’écologie – construire une sorte d’Aqualand délirant – ou les luttes sociales – oui, on meurt parfois dans les couloirs d’hôpitaux publics malmenés par l’État –, sont celles qui inondent les plateaux de théâtre à longueur d’année, mais ici tout fonctionne, car l’écriture est très solide, oscillant entre humour et exposition brute de faits politiques actuels, sans jamais oublier la beauté de la langue, au point que Christabelle, lors de son procès, s’exprime en alexandrins. Sa poésie lui est alors sévèrement renvoyée à la figure par un procureur véreux. La pièce, si elle s’appuie sur le contexte réel de la société de plus en plus inégalitaire dans laquelle vivent les petits spectateurs, n’en est pas pour autant documentaire. Elle syncrétise les maux du monde pour rendre grotesques ces inégalités. Ainsi, Christabelle est accusée de mille maux : association de malfaiteurs, insoumission, attentat à la pudeur, outrage, destruction de l’aquasplash… On peut y entendre un écho à l’affaire dite de Tarnac, surmédiatisée et instrumentalisée par le pouvoir, dans laquelle, en pleine présidence Sarkozy, dix personnes suspectées d’avoir posé des fers à béton sur des caténaires SNCF en 2008 avaient finalement toutes été relaxées par le Tribunal de Grande Instance de Paris.

Dans R.O.B.I.N., la compagnie se met constamment à hauteur d’enfant, en insérant des voix (off) d’enfants dans la bouche des grands – le travail sur le son est impeccable –, en ne bêtifiant pas son propos, mais en employant des mots enfantins qui disent la limite de la pensée d’adultes bien peu responsables quand, par exemple, les actes de cette brigade sont considérés par le procureur comme « une vaste organisation terroriste et méchante ». Cela dit aussi le caprice et la susceptibilité de ceux qui ne supportent pas qu’on écorne, ne serait-ce qu’une seconde, leur pouvoir, sidérés de constater que, dans une forêt, pendant sept ans, certains ont pu vivre sans chef et sans acte de consommation. Au fond du plateau nu, parfois occupé par une ou deux tables multifonctions et une cage pour barre de l’accusation, figure justement un rang d’arbres, cette forêt nourricière et refuge. C’est là que se nichent tous les espoirs du monde de demain qu’esquissent ces artistes.

Nadja Pobel – www.sceneweb.fr

R.O.B.I.N.
Texte Clémence Barbier, Paul Moulin, Maïa Sandoz
Mise en scène Maïa Sandoz
Avec, en alternance, Clémence Barbier, Maxime Coggio, Jeanne Godard, Anysia Mabé, Angie Mercier, Paul Moulin, Soulaymane Rkiba, Aurélie Vérillon
Assistanat à la mise en scène Élisa Bourreau
Scénographie Catherine Cosme, Maïa Sandoz, David Ferré
Collaboration chorégraphique Gilles Nicolas
Musique Christophe Danvin
Son Grégoire Leymarie
Lumière Romane Metaireau
Costumes Muriel Senaux
Régie générale David Ferré

Production Théâtre de L’Argument
Coproduction Théâtre des 2 Rives – Charenton-le-Pont ; Théâtre Jean-Vilar de Vitry-sur-Seine ; Théâtre de l’Usine de Saint-Céré ; Célestins – Théâtre de Lyon

Le Théâtre de L’Argument est conventionné par la DRAC Île-de-France et le Conseil départemental du Val-de-Marne.

Durée : 1h
À partir de 8 ans

Vu en décembre 2024 aux Célestins, Théâtre de Lyon

Théâtre Paris-Villette
du 13 février au 2 mars 2025

Théâtre du Fil de l’eau, Pantin
les 3 et 4 avril

13 février 2025/par Nadja Pobel
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