La Dame blanche de Boieldieu revient à l’Opéra-Comique sous la baguette de Julien Leroy et dans une mise en scène de Pauline Bureau. Une joyeuse troupe de chanteurs-acteurs est réunie au service d’un spectacle jovial mais figé dans l’ancien temps.
Impossible de démentir l’amour toujours palpable du public parisien pour La Dame blanche qui demeure l’un des plus remarquables succès de l’Opéra-Comique. Créée en 1825, elle avait déjà dépassé les 1500 représentations avant le changement de siècle. L’oeuvre a encore été chaleureusement acclamée le soir de la première de sa nouvelle production. Bien qu’aimé de Carl Maria von Weber qui trouvait l’oeuvre comparable aux géniales Noces de Figaro de Mozart, et de Wagner qui l’a lui-même dirigé en fosse, l’oeuvre apparaît aujourd’hui comme une matière musicale et théâtrale certes efficace mais plutôt simplette et désuète. Elle plait pour la légèreté grisante de son écriture vocale proche de celle de Rossini mais ne masque pas trop sa propension à regarder en arrière. On y reconnaît l’inspiration de Grétry notamment.
Pauline Bureau s’attaque à ce monument ancien en signant un travail par moments charmant, divertissant, mais très (trop) fidèle à la lettre de l’ouvrage. La Dame blanche n’est clairement pas ce genre de titres lyriques qui invite à de profondes réflexions ou émotions et inspire de multiples lectures mais on ne peut que s’étonner des partis esthétiques appartenant à un autre âge de l’opéra que prend la jeune artiste qui figure pourtant parmi les signatures importantes du théâtre contemporain. En dépit de quelques facéties et petits tours de magie, sa mise en scène demeure platement illustrative.
Témoin de l’attrait d’antan pour l’exotisme fantastique véhiculé dans les romans de Walter Scott, très en vogue en France à l’époque de Boieldieu, l’Ecosse gothique dans laquelle se jouent les trois actes de la pièces est à la fois restituée dans de massifs et assez vilains décors et au moyen de projections vidéo où dès le prologue, devant le très convoité château d’Avenel qui apparaît en arrière-plan, la dame blanche tournoie comme possédée au sommet de montagnes brumeuses tutoyant un croissant de lune irradiant un crépuscule romantique en diable. Par la suite, la mise en scène entraîne dans l’univers du conte qu’elle aime tantôt pasticher tantôt parodier mais jamais assez franchement.
Même souvent figés, les artistes du Chœur Les Eléments et les solistes tentent animent plutôt gaiement cette forme compassée. Philippe Talbot fait un gracieux Georges Brown. Avec un chant plein d’élégance et de facilité, il réussit chacun de ses airs de bravoure sans forcer l’abattage et se montre plus délicat et touchant. A ses côtés, c’est une Anna pétillante que campe Elsa Benoit pleine de naturel et de tempérament. Yann Beuron à l’allure de viking, Sophie Marin-Degor, Aude Extrémo (une Marguerite de grande classe), Jérôme Boutillier (presque trop séduisant Gaveston) forment une distribution bien soutenue par la direction attentive aux chanteurs et en même temps suffisamment galvanisante de Julien Leroy qui réalise un fort beau travail à la tête de l’Orchestre national d’Ile-de-France.
Christophe Candoni – www.sceneweb.fr
La Dame blanche de François-Adrien Boieldieu
Direction musicale Julien Leroy
Mise en scène Pauline Bureau
Avec Philippe Talbot, Anna Elsa Benoit, Sophie Marin-Degor, Jérôme Boutillier, Aude Extrémo, Yann Beuron, Yoann Dubruque
Choeur Les éléments
Orchestre National d’Île-de-FranceDécors Emmanuelle Roy
Costumes Alice Touvet
Lumières Jean-Luc Chanonat
Vidéo Nathalie Cabrol
Magicien Benoît Dattez
Dramaturgie Benoîte Bureau
Assistante musicale Emmanuelle Bizien
Collaboratrice artistique à la mise en scène Valérie Nègre
Chef de chant Christophe ManienProduction Opéra Comique
Coproduction Opéra de LimogesCréé à l’Opéra Comique en 1825. Spectacle en français, surtitré en français et en anglais.
Durée : 2h50
Opéra Comique
Salle Favart
du 20 Février
au 1 Mars 2020
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