A mi-chemin entre cirque et théâtre, le Galactik Ensemble plonge à pieds joints dans un environnement hostile. Tout l’enjeu d’Optraken, actuellement au Monfort, est de tester la capacité de résilience des hommes face à des trésors d’inventivité technique.
A l’attention des non-initiés, il peut-être utile de le préciser. A skis, « l’op-traken » – qui vient du norvégien « opträker », tire-bouchon – est « un mouvement rapide de repli des jambes sous le corps qui permet un saut contrôlé pour éviter un décollage intempestif au passage d’une bosse ou d’une rupture de pente », à en croire la définition donnée par le Larousse. Aussi incongru soit-il, ce titre entre en résonance directe avec la folie douce qui s’empare de la scène du Monfort au passage du Galactik Ensemble. Pour les cinq circassiens de formation à l’origine de ce collectif, tout l’enjeu est de « confronter des idées vagues à des images claires » dans le capharnaüm sombre et inquiétant qu’ils organisent patiemment.
Chez eux, les boulettes de papier mâché, le tableau noir en triptyque et les clac-doigts n’ont rien à voir avec des madeleines de Proust qui feraient rêvasser d’anciens écoliers nostalgiques. Pour Mathieu Bleton, Mosi Espinoza, Jonas Julliand, Karim Messaoudi et Cyril Pernot, ce sont autant de menaces dont ils doivent à tout prix contenir les assauts. A mi-chemin entre cirque et théâtre, leur univers anxiogène ressemble à un cauchemar où un mauvais génie se serait emparé du pouvoir. Pris au piège d’objets divers et variés qui ne cessent de s’acharner sur eux, ils ont l’esquive pour seule et précaire échappatoire.
Les tables et les plaques de plâtre qui tombent du plafond, les balles de tennis propulsées par des automates, les chaises qui se dérobent sous eux ont un unique but : tester leur capacité de résistance et évaluer leur niveau de résilience. Comme une rébellion vengeresse de la technique contre son créateur et habituel dompteur. Dans cette métaphore d’un monde menaçant où l’échec et la perte de contrôle sont la règle, aucune panique ne submerge jamais les comédiens. Violemment assaillis, ils restent étonnamment stoïques, sans voix, comme résignés face aux différents fléaux qui s’abattent sur eux. D’abord seuls, voire concurrents, ils prennent progressivement conscience de la force du collectif pour assurer leur survie et s’adapter à cet environnement hostile.
Davantage que par des prouesses physiques dont on pourra regretter l’insuffisante présence, le Galactik Ensemble étonne par sa virtuosité technique. Avec des moyens relativement modestes, ils déploient des trésors d’inventivité, où l’effet de surprise est particulièrement bien ménagé. Ils réservent aussi des moments drôles et burlesques qui contribuent à alléger cette chape menaçante. Dynamisés par leur folle énergie, les cinq circassiens transforment le plateau en un immense terrain de jeu où l’incongruité des actes dame peu à peu le pion à cette terreur diffuse. Comme pour souligner qu’il peut y avoir aussi par gros temps une certaine dose d’amusement.
Vincent Bouquet – www.sceneweb.fr
Optraken par le Galactik Ensemble
de et avec Mathieu Bleton, Mosi Espinoza, Jonas Julliand, Karim Messaoudi, Cyril Pernot
Direction technique Nicolas Julliand
Technique plateau Charles Rousseau
Construction, création machinerie Franck Breuil
Création lumière Adèle Grépinet
Créateur son et musique Denis Mariotte
Communication et graphisme Maëva Longvert
Regards extérieurs Matthieu Gary et Marie Fonte
Production et diffusion Léa Couqueberg
Administration de production Emilie Leloup
Aide à la diffusion Antoine Blesson
Production : Le Grand Gardon Blanc / Galactik Ensemble ; coproduction : Plateforme 2 Pôles Cirques en Normandie : La Brèche à Cherbourg, Cirque Théâtre d’Elbeuf, Scène Nationale de Châteauvallon, Le Tandem scène nationale, Les 3T Scène conventionnée de Châtellerault, La Nouvelle Digue (Toulouse), Houdremont Scène Conventionnée, La Courneuve, Les Subsistances (Lyon), CircusNext, dispositif européen coordonné par Jeunes Talents Cirque Europe et soutenu par la Commission Européenne.
Le Galactik Ensemble bénéficie de l’Aide à la production de la DRAC Île-de-France, de l’Aide à la création artistique pour le cirque, DGCA / Ministère de la Culture et le soutien de la SACD / Processus Cirque, ainsi que de l’aide de l’ADAMI et de l’aide à la diffusion d’œuvres sur le territoire parisien de la Mairie de Paris.
Avec le soutien de : Le Monfort Théâtre (Paris), Théâtre de L’Agora (Evry), Théâtre de La Digue (Toulouse), CIRCa (Auch), La Grainerie (Balma), La Cascade, Pôle National des Arts du Cirque, Bourg-Saint-Andéol, Le Carré magique, Pôle National des Arts du Cirque en Bretagne, Lannion.
Durée 1hLe Monfort
du 10 au 20 avril 2019 à 20h30
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