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Agatha : théâtre de chambre durassien

À la une, Les critiques, Moyen, Paris, Théâtre
Rémi Blasquez

photo Rémi Blasquez

Théâtre de chambre évoquant une passion incestueuse sans limites, Agatha de Marguerite Duras est mis en scène par Louise Vignaud dans une forme empreinte de délicatesse mais sans puissance.

Directrice du théâtre des Clochards célestes à Lyon depuis janvier 2017 et artiste associée au Théâtre national populaire, à Villeurbanne, Louise Vignaud y monte Agatha, avant la reprise début mars au Théâtre 14 à Paris du Quai de Ouistreham. Après un Misanthrope de Molière en 2018 et Rebibbia, adaptation d’un récit de l’autrice italienne contemporaine Goliarda Sapienza, c’est, donc, de la langue de Marguerite Duras que se saisit cette fois-ci la jeune metteuse en scène. Dans Agatha, pièce écrite en 1981, Duras reprend l’un des motifs récurrents de son écriture, motif traversé par des réminiscences de son expérience intime : soit la relation incestueuse entre une sœur et un frère, réalisée dans l’ombre de la mère. Une relation durable, éternelle, impossible à abandonner et qui marque à jamais le couple – conditionnant leur conception de la vie et de l’amour.

Lorsque la pièce débute, la jeune femme Agatha est déjà là. Assise sur un fauteuil à jardin, elle demeure immobile, tandis que le bruit du sac et du ressac des vagues occupe tout l’espace. S’effaçant progressivement, ce son de la mer cède la place à une mélodie, écoutée par la jeune femme via une chaîne hi-fi : une valse de Brahms. Dans cette chambre dont le mobilier désigne un intérieur bourgeois décati un brin suranné – paravent, coiffeuse en bois, méridienne, fleurs séchées, etc. – Agatha attend « Lui », son frère. L’on comprend après l’arrivée de ce dernier et au fil de leur dialogue que ce lieu serait la chambre de leur mère, décédée huit mois plus tôt. Les retrouvailles dans cet espace renvoyant à un monde disparu, celui de l’enfance et de leur relation incestueuse nouée avec le consentement muet de leur mère, n’en deviennent alors que plus symboliques. Ce sont en effet les dernières : Agatha vient annoncer à Lui son départ avec un homme.

Mais pour que cette séparation ait lieu, ils vont devoir (se) raconter. Se vouvoyant, puis se tutoyant, et inversement, ou se désignant parfois par la troisième personne du singulier, ils reconstituent patiemment et avec prudence leur enfance, leur histoire, l’été de la consommation de leur amour, la découverte par leurs parents de leur relation. Ce cheminement fait de répétitions et de vides – propre à l’écriture de Duras – ils le réalisent prudemment en se déplaçant dans l’antre de la mère, demeurant toujours à distance l’un de l’autre. C’est une passion qui ne peut connaître de fin comme le dit leur dialogue fait de ressassement, de changements de types d’adresse et d’allers et retours entre les souvenirs et les années. Au final Agatha part, laissant son frère seul avec l’urne contenant les cendres de la mère, mais tous deux savent l’impossibilité de rompre, comme leur mère elle-même le leur a annoncé.

S’emparant de ce récit d’un amour absolu sans équivalence possible, Louise Vignaud signe une mise en scène rigoureuse empreinte de délicatesse. Un travail qui en étant fondé sur une lecture précise de la pièce replace la mère (par la chambre, par l’urne funéraire) au cœur de l’affaire. Mais si le spectacle conçu évoque cet amour incestueux sans jugement moral – fidèle en cela à la position de Duras –, il peine à en transmettre toute la violence et le puissant lyrisme. Certes cohérent dans sa facture classique, son souci du réalisme, de la clarté des signes et de l’illustration – incarnés par le décor, la création sonore ou le jeu des comédiens –, l’ensemble demeure trop sage. Quant aux comédiens, là où Marine Behar compose une Agatha toute en sensibilité nerveuse, Sven Narbonne offre un Lui trop univoque, manquant de subtilité. Face à ce travail certes sérieux, l’affolement des sentiments comme le trouble affectant ces adultes n’affleure jamais concrètement et les bouleversements supposés sont escamotés par la joliesse formelle recherchée.

Caroline Châtelet – www.sceneweb.fr

Agatha
de Marguerite Duras / mise en scène Louise Vignaud
avec Marine Behar et Sven Narbonne
scénographie Irène Vignaud
costumes Cindy Lombardi
lumières Luc Michel
son Michael Selam

production Compagnie la Résolue
coproduction Théâtre du Vellein – CAPI

Louise Vignaud est membre du Cercle de formation et de transmission

Le texte est paru aux Éditions de Minuit.
Durée : 1h20

Théâtre 14
du 8 au 19 février 2022

14 février 2020/par Caroline Chatelet
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