Le Théâtre-Studio réouvre le 1er décembre, avec les trois Tchekhov de Christian Benedetti: La Mouette/Oncle Vania/Trois Soeurs. Séance de rattrapage nécessaire ou plaisir de revoir ces pièces dans ce formidable théâtre à Alfortville.
Un esprit de troupe et de simplicité souffle sur cet Oncle Vania. Fidèle à ses convictions de ne pas dilapider l’argent (et les subventions qu’on ne lui accorde pas !) Christian Benedetti en revient à l’essence même du théâtre. Un plateau nu, des acteurs, quelques accessoires, quelques lumières, peu d’effets, mais beaucoup d’intelligence dans la construction des personnages. Les comédiens sont habités par leurs rôles, ils sont étonnants de maitrise (Florence Janas dans le rôle d’Eléna est stupéfiante lorsqu’elle s’avance face au public et fait mine de se prendre les pieds dans le texte – chose voulue par Tchekhov – on y croit). En moins d’une heure vingt, Chrsitian Benedetti donne un sacré coup de jeunesse à la pièce. On en oublie qu’elle a été écrite en 1897. Le jeu naturel, rythmé, ponctué de très belles pauses, de silences pensés (le temps se fige dans une beauté incroyable) et d’accélérations dans le débit est magnifiquement porté par toute la troupe.
Et l’on découvre ainsi la modernité de cette pièce. Ce que dit Tchekhov sur l’état de la société est édifiant et pourrait être transposé à notre siècle. Il nous brosse le tableau d’un monde dégénérescent. Le docteur Mikhaïl Lvovitch Astrov (Christian Benedetti) montre le désastre écologique de la disparition de la forêt dans la campagne et l’absence totale de la conscience de l’homme qui détruit tout. Cette scène vaut bien plus que tous les discours écologiques d’aujourd’hui. Lorsque l’égoïste professeur Sérébriakov annonce qu’il souhaite vendre la maison qui ne lui appartient pas, Vania (Daniel Delabresse) lui explique avec énergie et simplicité en dessinant à la craie à même le sol que le fruit de son travail a permis au domaine de rester à flots. « Tu nous a mystifié » lui lance Vania. Les puissants n’ont pas toujours ce qu’ils désirent d’un claquement de doigts. Retour aux valeurs, à la morale !
Vania est aussi l’une des pièces les plus piquantes et les plus humoristiques de Tchekhov. « Ne me laisse pas là avec lui, il va me parler ! » dit Vania. C’est aussi une belle pièce sur la vieillesse et le temps qui passe. « Je ne suis pas satisfait de la vie, on est en train de devenir vieux » (…) « Faute de vraie vie, on vit de mirages, c’est déjà mieux ».
Oncle Vania de Tchekhov
Mise en scène de Christian Benedetti
avec Brigitte Barilley, Judith Morisseau, Isabelle Sadoyan, Christian Benedetti, Philippe Crubézy, Daniel Delabesse, Laurent Huon
traduction André Markowicz et Françoise Morvan
assistant Christophe Carotenuto
lumière Dominique Fortin
Durée : 1h18
12 mars – 7 avril 2012
du mardi au vendredi à 20h30
samedi à 16h00 & 19h30
Les représentations ont lieu au Théâtre-Studio à Alfortville : http://www.theatre-studio.com/fr/infos-pratiques.html