Le festival d’Avignon accueille « Lenz » mis en scène par Cornelia Rainer. L’autrichienne dit vouloir mettre en lumière le dramaturge et philosophe Jakob Michael Lenz. Un spectacle aux belles intentions mais qui ne tient aucune de ses promesses.
On est d’abord saisi par cette incroyable scénographie, des montagnes russes d’un autre temps, on les imagine créées au XVIIIe siècle, tout juste pour cette famille austère échappée d’une toile de David Teniers le Jeune aux occupations modestes.
En 1778 – année de la mort de Rousseau, Voltaire ou Piranèse – un homme bien peu connu frappe à la porte de l’honnête demeure. Jakob Lenz est recommandé par une connaissance commune, et il va profiter de cet environnement favorable pour continuer au développement de sa pensée. Cette même famille va raconter comment elle accueillit le penseur. Le style alterne entre adresse au spectateur et l’érection d’un quatrième mur pour le déroulement des scènes.
Cornelia Rainer est motivée ici par la volonté de redonner sa place dans l’histoire à Jakob Lenz, selon elle injustement oublié au profit de Goethe. Mais ce qu’elle montre de son auteur, est un portrait bien peu attirant qui, sans nous faire comprendre l’essence de son intellect, nous donne envie de nous tenir loin de lui. On saisit quelques notions sur des rapprochements entre la nature et l’univers – comme tous les philosophes de son époque serons-nous tentés de dire. L’apport des textes de Büchner et Oberlin n’apporte rien à la compréhension de cette pensée qui semble un mauvais mélange entre quelques concepts de Jean-Jacques Rousseau et de l’amour de l’essentiel d’un Pierre Rabhi. « Lenz » souffre d’une cruelle absence de parti pris.
L’esthétique sobre n’est que style et ne se reflète aucunement dans la construction du texte ou le jeu des comédiens dont aucun n’est juste. L’ennui se substitue au jeu avec une morale rigide et remise en question. La scénographie spectaculaire est sous exploitée au profit d’un jeu presque toujours à plat, hormis quelques coups de folie frappant Lenz, interprété par un Markus Meyer immature aux faux airs de Sacha Baron Cohen dans ses films les plus potaches. La promesse de musiques d’époque pour comprendre la construction du personnage n’est en fait qu’une raison de plus pour fabriquer de la dérision.
Quelques scènes oniriques où la musique et la lumière sont le principal intérêt ne sauvent pas cette création datant de 2012 et qui donc aurait pu être largement filtrée…
Hadrien VOLLE – www.sceneweb.fr
Lenz d’après Jakob Michael Lenz, Georg Büchner et Johann Friedrich Oberlin
Adaptation et mise en scène Cornelia Rainer
Scénographie et costumes Aurel Lenfert
Musique Sophie Hunger, Christian Prader, Julian Sartorius
Dramaturgie Sibylle Dudek
Lumière Bernhard Schmidhuber
Assistanat à la mise en scène Claire Tudela
Avec Anne Bennent, Jele Brückner, Jakob Egger, Noah Fida en alternance avec Merlin Miglinci, Markus Meyer, Heinz Trixner et le musicien Julian Sartorius
Production Theater Montagnes Russes
Coproduction Young Directors Project, festival de Salzbourg
Avec le soutien de la Chancellerie Fédérale autrichienne pour l’Art et la Culture, du Forum Culturel Autrichien de Paris et de HS-Art Service Austria
Spectacle en allemand surtitré en français.
Durée : 1h40Avignon 2016
Cour du lycée Saint-Joseph
Du 8 au 13 juillet fauf le 10
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