Le Théâtre du Soleil vient de faire savoir dans un communiqué que le spectacle Kanata sera bien programmé au Théâtre du Soleil en décembre dans le cadre du Festival d’Automne. Il avait été annulé cet été par Robert Lepage à la suite d’un longue polémique au Canada au sujet de l’absence d’autochtones dans la distribution. Le spectacle présenté sera rebaptisé: Kanata – Épisode I — La Controverse.
Nouveau rebondissement dans l’affaire Kanata. Le Théâtre du Soleil vient de faire savoir par un communiqué publié sur son site que le spectacle sera finalement joué au Théâtre du Soleil (du 15 décembre 2018 au 17 février 2019). Cet été, dans un communiqué, Robert Lepage avait annoncé qu’il jetait l’éponge suite à la polémique soulevée par les autochtones au Canada. Kanata retrace 200 ans de l’histoire du Canada jusque dans ses aspects les plus violents et intolérables, sur la relation entre les Blancs et les peuples autochtones. Or la distribution ne comprenait aucun comédien issu des Premières Nations. Des représentants autochtones s’en étaient émus dans une lettre ouverte publiée dans le quotidien Le Devoir. Robert Lepage avait expliqué qu’il ne pouvait plus continuer la production suite au retrait de plusieurs coproducteurs.
Le Théâtre du Soleil a donc décidé de poursuivre l’aventure. L’équipe d’Ariane Mnouchkine explique dans son communiqué que le spectacle ne viole « ni la loi du 29 juillet 1881 ni celle du 13 juillet 1990 ni les articles du Code pénal qui en découlent, en cela qu’il n’appelle ni à la haine, ni au sexisme, ni au racisme ni à l’antisémitisme ; qu’il ne fait l’apologie d’aucun crime de guerre ni ne conteste aucun crime contre l’humanité ; qu’il ne contient aucune expression outrageante, ni terme de mépris ni invective envers une personne ou un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, ou une religion déterminée. »
Ce retour à l’affiche de Kanata est aussi un geste fort pour le Théâtre du Soleil qui entend répondre aux critiques nombreuses et souvent anonymes qui se sont élevées au Canada sur les réseaux sociaux, et s’en remet au jugement du public. « Une fois le spectacle visible et jugeable, libre alors à ses détracteurs de le critiquer âprement et d’appeler à la sanction suprême, c’est-à-dire à la désertification de la salle. Tous les artistes savent qu’ils sont faillibles et que leurs insuffisances artistiques seront toujours sévèrement notées. Ils l’acceptent depuis des millénaires. »
Le Théâtre du Soleil explique enfin qu’il « s’emploiera sans relâche à tenter de tisser les liens indispensables de la confiance et de l’estime réciproques avec les représentants des artistes autochtones, d’où qu’ils soient, déjà rencontrés ou pas encore« . Le collectif Décoloniser les arts sera certainement attentif à la suite, il considère sur sa page facebook que la position du Théâtre du Soleil « contourne le débat national au Québec en faisant usage des lois de la république française« . Le metteur en scène David Bobée, directeur du CDN de Rouen et membre du collectif estime pour sa part que le maintien de la production sera « le support à une réflexion de fond qui, espérons le, permettra d’échapper à la polarité des universalistes brutaux et ethnocentrés d’un côté et des identitaristes agressés donc crispés de l’autre« .
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !