Adel Hakim emmène Marivaux en banlieue
Loin du classique marivaudage, Adel Hakim plonge les personnages de La double inconstance dans une épopée contemporaine, où Sylvia et Arlequin sont de jeunes banlieusards découvrant l’opulence de la bourgeoise. Une belle dramaturgie, un peu entachée par un jeu en force qui finit par devenir fatigant.
L’art s’adresse à tous. Adel Hakim expose les personnages de la pièce dans un musée imaginaire. Des reproductions de tableaux célèbres sont projetées sur les murs mobiles du scénographe Yves Collet. De L’Enlèvement des Sabines de Nicolas Poussin à L’Arlequin de Picasso, ce sont des chefs d’œuvre de l’histoire de l’art que l’on peut admirer entre les actes. L’art pour tous et le théâtre ouvert à tous, aux comédiens de toutes les couleurs. Le credo d’Adel Hakim qui effleure aussi les sujets d’actualité dans ce spectacle. Lorsqu’Arlequin dit « Je veux aller en exil », ses mots résonnent sur la scène.
Sylvia (Jade Herbulot) et Arlequin (Mounir Margoum) sont des jeunes de banlieues plongés à leur corps défendant dans le monde des riches, chez un Prince, patron aisé, qui use de son pouvoir pour parvenir à ses fins, et séduire la bondissante Sylvia en la capturant. Jade Herbulot est énergique, nerveuse, une vraie pile électrique. Elle rayonne. Mounir Margoum a lui les traits un peu durs. Il est « rude et bourru » dit Sylvia, « grossier » dit Flaminia. Mais sa rigidité joue contre lui. On l’a vu plus serein, plus mélancolique, plus léger (notamment dans A portée de crachat) et c’est comme cela qu’on l’aime. Il entraîne ses camarades dans un jeu freiné et rapide qui fatigue le spectateur.
Dans la distribution, on a beaucoup aimé Lou Chauvain dans le rôle de Lisette. C’est une des forces de ce spectacle, de ne pas laisser sur le carreau les personnages secondaires. Elle incarne une Lisette, nympho, cocaïnée, bimbo déchirée et déchirante qui fait tout pour exister. Frédéric Cherboeuf dans le rôle du prince est sobre et distancié. La froideur du mec qui a du pognon et qui se croit tout permis. Mais chez Marivaux, c’est l’amour qui gagne à chaque fois. Que l’on vienne de la banlieue ou des beaux quartiers.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
La double inconstance de Marivaux
mise en scène
Adel Hakim
scénographie et lumière
Yves Collet
assistant lumière
Léo Garnier
vidéo
Matthieu Mullot
assistant à la mise en scène
Pablo Dubott
costumes
Dominique Rocher
chorégraphie
Gilles Nicolas
maquillages
Nathy Polak
construction décor
Espace & cie
avec
Lou Chauvain
Frédéric Cherbœuf
Etienne Coquereau
Malik Faraoun
Jade Herbulot
Mounir Margoum
Irina SolanoThéâtre des Quartiers d’Ivry
Du 2 au 29 novembre 2015
A 20h du mardi au samedi
A 19h le jeudi et à 16 h le dimanche
Sauf les lundis et le 4 novembre
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