Frédérique Loliée reprend cette semaine à La Comédie de Caen, son rôle dans Richard III, créé en juillet 1995 au Festival d’Avignon, à sa sortie de l’école du Théâtre National de Bretagne, sous la direction de Matthias Langhoff. Avec Marcial Di Fonzo Bo qui endosse de nouveau le rôle-titre, ils reprennent la mise en scène. En 25 ans de carrière, Frédérique Loliée s’est imposée comme l’une des plus grandes comédiennes de la décentralisation. Elle se partage entre la France avec la bande du collectif les Lucioles composée de Marcial Di Fonzo Bo, Elise Vigier, Pierre Maillet et l’Italie avec le Teatro Stabile à Naples, Turin, Rome, Gênes. Voici son interview Soir de Première.
Avez-vous le trac lors des soirs de première ?
Forcément à la première, il y a ce mélange d’appréhension et d’excitation… On va « exposer » ce qui a été creusé… Mais en général j’aime vraiment ne pas l’avoir ! Arriver à un état de « tension détendue ». Etre dans un état de disponibilité à l’instant présent, pour pouvoir jouer et continuer à travailler avec ce qui va arriver. Ca c’est le mieux !
Comment vous passez votre journée avant un soir de première ?
Ca dépend vraiment des spectacles et des villes
Avez-vous des habitudes avant d’entrer en scène ? Des superstitions ?
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Première fois où je me suis dit « je veux faire ce métier ? »
Je devais avoir 10 ans, au théâtre du Lucernaire, toute petite salle. L’acteur parlait d’une fenêtre, elle était importante cette fenêtre, il la montrait, elle était derrière nous, spectateurs. Je me doutais bien qu’elle n’y était pas, mais quand même je me suis retournée pour vérifier.
Premier bide ?
Un spectacle pour enfant. On avait tenté d’adapter « Cent ans de solitude » de Gabriel García Márquez, mais on avait pas eu assez de temps de répétitions, ou pas mesuré l’ampleur du projet ! Du coup, par manque de temps on avait laissé une fin « ouverte », en cours, à suivre… Mais on n’avait pas pensé que les enfants détestent les fins en queue de poisson. C’était à Grenoble je crois, une salle assez grande de souvenir, 400 enfants… Dans le noir, juste avant les saluts, on entend « Bouh bouh » et nous on saluait en souriant… je crois qu’ils nous ont même jetés des choses, des gommes… C’était assez humiliant ! Ou une autre fois, c’était pas un bide, c’était juste qu’il y avait 7 spectateurs dans une salle de 200 places. Ca fait un son très bizarre.
Première ovation ?
Le Richard III de Langhoff à Avignon
Premier fou rire ?
La première fois que j’ai joué, je devais entrer en scène avec une grande actrice. J’étais assez impressionnée, émue, dans un état un peu romantique. On attendait dans un tout petit espace derrière le décor. Et juste avant d’entrer elle s’est mise à roter et à péter mais tout très vite. J’osais plus bouger ! On est rentrées en scène et j’ai eu mon premier fou-rire
Premières larmes en tant que spectateur ?
Que c’est beau quand ça arrive, d’être submergé par une émotion au théâtre. Souvent c’est une phrase. Inattendue. Qui cueille. Je me rappelle d’un spectacle de Daniel Veronese « La maison de poupée » je crois : dernière phrase, noir, je n’arrivais pas à m’arrêter de pleurer, mais c’est idiot de raconter ça parce que je ne me rappelle plus de la phrase. Des fois c’est un acteur, là me vient Jean-Quentin Chatelain dans « Exécuteur 14 » ou « Mars » ou Pierre Clémenti qui jouait Clarence dans « Richard III »… des solitudes qui irradient, des extra-terrestres…
Première mise à nue ?
En mise à nue concrète, la plus marquante est celle avec Rodrigo Garcia pendant les répétitions de « Roi Lear » à Valence. On était 5 acteurs, on ne se connaissait pas très bien. On fait une impro, assez physique, on se retrouvait en tas, comme des vers de terre à ramper ou je sais plus… et il nous demande de la refaire mais nus. On s’est retrouvés à se ramper dessus tout nus, en s’excusant un peu à voix basse sur certains passages… mais de manière très polie, en essayant de maintenir la face « pas de problème », « c’est un peu gênant mais ça reste très professionnel ». Ce que c’était drôle…
Première fois sur scène avec une idole ?
C’était pas une idole, c’était une star du cinéma italien. J’ai adoré. Elle trouvait absurde que le metteur en scène lui demande sur une réplique d’être de dos parce que le public venait pour la voir, les gens aux saluts couraient pour s’approcher d’elle, pour lui donner des fleurs, des chocolats, en hurlant son prénom… tous les maires des villes où on jouait l’invitait à déjeuner… j’avais l’impression d’être dans un film de Fellini.
Premier coup de cœur ?
Premier je sais pas, mais des actrices m’ont donné des coups au cœur ! comme Dominique Valadié dans « Le soulier de satin », Valérie Dréville dans « La vie de Galilée », Claude Degliame dans « L’échange »… que des mises en scène de Vitez c’est drôle ! elles étaient des modèles pour moi, elles montraient des femmes décalées, complexes, bancales, folles, exigeantes.
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