Sur la scĂšne de Garnier comme sur lâĂ©cran, filmĂ©e par CĂ©dric Klapisch, Marion Barbeau, PremiĂšre danseuse dans le ballet de l’OpĂ©ra de Paris impose son Ă©vident talent. Elle prendra bientĂŽt une annĂ©e sabbatique, avec dâautres projets en vue. Rencontre.
On a pu vous voir dans Play de Alexander Ekman, Faun de Sharon Eyal ou Body and Soul de Crystal Pite en ce dĂ©but de saison. Actuellement vous ĂȘtes distribuĂ©e dans In your rooms de Hofesh Shechter
Ces chorĂ©graphes comptent pour moi. Avec Hofesh, câest mĂȘme lâexpĂ©rience la plus intense de ma carriĂšre. Jâapprofondis peu Ă peu sa corporalitĂ©. Il est exigeant mais Ă lâĂ©coute. Il sait sâadapter aux danseurs quâil en face de lui. Lorsque vous arrivez dans une maison comme lâOpĂ©ra de Paris avec des solistes qui ont ce bagage classique, câest primordial. AprĂšs câest Ă nous de « piger » vite ce quâHofesh veut ! Nous avons pu travailler avec ses assistants, sans eux nous aurions sans doute eu plus de mal.
On peut dire que vous ĂȘtres une danseuse contemporaine dans une institution classique ?
En quelque sorte, oui. Je suis fiĂšre de ma formation, de lâexigence de cette compagnie, le Ballet de lâOpĂ©ra de Paris. Mais cela peut-ĂȘtre dĂ©licat, cette situation. Je me dis que câest une force cependant. Je cultive ces extrĂȘmes. Il y a des jours oĂč vous devez passer dâun style Ă un autre, dâun cours classique aux rĂ©pĂ©titions avec un chorĂ©graphe comme Hofesh Shechter ! Mais au final, je pense que lâun peut nourrir lâautre.
Cela veut dire que lâOpĂ©ra de Paris a changĂ© ?
Aurélie Dupont a un appétit pour des chorégraphes émergents. Cela dit, notre compagnie a besoin de ballets classiques, elle a les danseurs pour.
Travailler avec des chorĂ©graphes vivants, câest plus de pression ?
Jâessaye de rester moi-mĂȘme face Ă un chorĂ©graphe. Plus on est Ă fond dĂšs le dĂ©but, dans une certaine vĂ©ritĂ©, meilleur on va ĂȘtre sur scĂšne. Lâhumain est le plus important. AprĂšs jâai le souvenir dâavoir travaillĂ© avec Florence Clerc sur du classique. Elle a une maniĂšre tellement moderne dâenseigner les grands ballets que vous avez lâimpression que Rudolf Noureev est dans le studio avec nous. On peut, parfois, ressentir plus de libertĂ© sur un classique parce que le coach est formidable et moins sur une crĂ©ation contemporaine.
Vous tenez le premier rĂŽle de En Corps, le film de CĂ©dric Klapisch dont lâaction se situe dans le milieu de la danse. On peut-ĂȘtre soi devant la camĂ©ra ?
Câest la premiĂšre fois que je jouais un rĂŽle, câest-Ă -dire que je devais danser en tant quâElise, le personnage, pas en tant que Marion ! AprĂšs câest la mĂȘme intensitĂ© de travail mais on ne met pas la concentration au mĂȘme endroit. Par exemple, il y a une scĂšne oĂč CĂ©dric filmait mes mains, mes bras. Je devais penser Ă cela, pas Ă mon corps en entier.
Le cinĂ©ma, un peu comme la danse, câest lâĂ©cole de la patience ?
On est prĂ©parĂ©e Ă cela. Pourtant je nâai jamais eu Ă attendre entre les prises. DĂšs que jâavais un moment, jâallais dans ma loge pour mâentrainer ou simplement rester Ă©chauffĂ©e.
Quitter le plateau dâun film pour retrouver le Palais Garnier câest rĂ©confortant ?
On quitte un cocon pour un⊠autre ! Les tournages de CĂ©dric, câest leur rĂ©putation, sont comme une grande colonie de vacances. De plus nous tournions en pĂ©riode Covid, les lieux en extĂ©rieur Ă©taient dĂ©serts. AprĂšs, on ressent vraiment cet esprit dâĂ©quipe sur un film. Peut-ĂȘtre plus que sur un ballet. Lorsque jâarrive sur scĂšne, je peux dire que presque tout le travail a Ă©tĂ© fait.
Justement, ces deux derniÚres années, avec des confinements, des salles sans public, vous avez vécu cela de quelle maniÚre ?
Jâai adorĂ© ce confinement dâune certaine façon. Il arrivait au bon moment, le dĂ©but dâune pĂ©riode de changement. Jâavais, comme beaucoup, cette contrainte de lâespace. Danser Ă la maison ce nâest pas lâidĂ©al. Mais jâai travaillĂ© de maniĂšre autonome, je ressentais ce dont mon corps avait besoin, je pouvais me donner une direction. Jâai fait beaucoup de gaga aussi (la technique mise au point par Ohad Naharin). La scĂšne ne me manquait pas tant que cela. Jâai mĂȘme rĂ©ussi Ă rĂ©tablir mon Ă©quilibre ⊠de sommeil.
On vous verra ce dimanche 27 mars dans le Concert pour la Paix au Palais Garnier dans le pas de deux extrait de Body and Soul (avec Simon Le Borgne)
Je nâai pas hĂ©sitĂ© une seconde Ă dire oui. Mais câest en croisant des danseurs ukrainiens, actuellement accueillis Ă lâOpĂ©ra de Paris, que jâai pris conscience de leur situation. Câest rĂ©el, câest concret. Participer Ă cette soirĂ©e est un honneur.
Propos recueillis par Philippe Noisette – www.sceneweb.fr
In your rooms (avec Uprising), chorĂ©graphie Hofesh Shechter, Ballet de lâOpĂ©ra de Paris, jusquâau 3 avril
Concert pour la paix, Palais Garnier, le 27 marsEn corps, film de Cédric Klapisch, en salles le 30 mars
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