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Andromaque à nu

À la une, A voir, Avignon, Festival d'Avignon, Les critiques, Strasbourg, Théâtre, Tulle

Photo Christophe Raynaud de Lage

A la Semaine d’art en Avignon, Gwenaël Morin impose un rythme d’enfer à la tragédie de Racine. Façon, pour lui, de la dépouiller pour en révéler l’essence.

Avec Andromaque, Gwenaël Morin n’en est pas à son coup d’essai. Ce n’est pas la première fois que le metteur en scène tente de brancher cette tragédie de Racine sur 220 volts, comme il avait admirablement su le faire avec Les Molières de Vitez. En 2018, déjà, il l’avait combinée avec Georges Dandin et expédié le tout en deux heures chrono. Sauf que les vers raciniens lui avaient, alors, davantage résisté que la prose de Molière. Comme l’artiste n’est pas homme à se laisser abattre, il a choisi de remettre l’ouvrage sur le métier et de le confier, non pas à sa troupe de fidèles comédiens, mais à trois acteurs – accompagnés de sa collaboratrice, Barbara Jung – issus du programme Ier Acte qui veut faciliter l’insertion de jeunes professionnels issus d’origines culturelles, sociales ou ethniques diverses pour encourager la diversité au plateau.

Une audace qui n’a pas empêché Gwenaël Morin de la jouer sans filet. Comme souvent, le metteur en scène impose un théâtre à nu et propose une version de la pièce de Racine dans son plus simple appareil. Au sein du complexe socioculturel avignonnais de la Barbière, où se donnait la première, n’existent ni décor, ni costumes. Seuls quelques reproductions de La procession du Cheval de Troie de Giovanni Domenico Tiepolo, une carte de l’Epire dessinée à la mano, un collage de l’oeuvre et un arbre généalogique ornent les murs. Façon pour l’artiste de se dégager, en préambule, de l’impératif pédagogique que peut supposer la représentation d’un tel classique, et de signifier que l’intrigue d’une simplicité rare – « Oreste aime Hermione, qui aime Pyrrhus, qui aime Andromaque, qui aime son fils Astyanax et son mari Hector qui est mort » – compte moins que les flux et les reflux qui animent les personnages et le texte racinien, distribué aux spectateurs.

Car, dans cet Andromaque là, tout est plus affaire de rythme que de sens, d’instinct que d’intellect. Au lieu de s’appesantir sur le moindre pied, Gwenaël Morin accélère la diction jusqu’à générer un incroyable tourbillon qui active l’oeuvre de Racine et l’éclaire d’une lumière nouvelle. A la limite du rap et du slam, la musicalité ainsi révélée emporte Oreste et consorts sur des rivages jusqu’ici méconnus, au bord d’une mer furieuse où les marées montantes et descendantes se succèdent autant qu’elles se chevauchent. Sans que tout soit textuellement limpide, le metteur en scène parvient à toucher du doigt l’essence même de la pièce, ce feu intérieur qui brûle et consume les personnages, et à générer une infinie compassion envers eux. Comme des écorchés vifs roulant à tombeau ouvert, ils n’ont jamais paru aussi transparents et humains.

Un parti-pris qui oblige Gwenaël Morin à ne rien figer et à organiser une mise sous tension permanente, et renouvelée, du collectif de jeu. Dans sa scénographie, d’abord, intensément dépouillée et resserrée en un dispositif bi-frontal qui met les comédiens au contact direct du public ; dans sa distribution, ensuite, chaque soir différente. Contraints d’apprendre l’intégralité de la pièce, Sonia Hardoub, Mehdi Limam et Emika Maruta changent de rôles à chaque représentation : à l’un Pyrrhus, à l’autre Hermione et au dernier le tandem Oreste et Andromaque. Seule Barbara Jung, en cheffe d’orchestre munie d’une grosse caisse, conservent l’ensemble des rôles secondaires. De ce danger, naît une pression, d’inévitables fragilités, mais aussi une sensibilité rare. En équilibre précaire, le quatuor met ses tripes dans la bataille, comme s’il s’agissait d’une question de survie, et prouve qu’Andromaque est, bel et bien, une matière vivante.

Vincent Bouquet – www.sceneweb.fr

Andromaque à l’infini
Texte Jean Racine
Mise en scène Gwenaël Morin
Avec Sonia Hardoub, Mehdi Limam, Emika Maruta et Barbara Jung

Collaboration artistique Barbara Jung
Collaboration technique Jules Guittier

Production Compagnie Gwenaël Morin / SAS Théâtre Permanent, Festival d’Avignon, Théâtre National de Strasbourg
Avec le soutien de la Fondation SNCF et de Spedidam pour la Semaine d’art en Avignon
Avec l’aide d’Odéon – Théâtre de l’Europe

Durée : 1h15

Semaine d’art en Avignon, en itinérance
du 24 au 31 octobre 2020, à 18h

Théâtre national de Strasbourg
du 4 au 14 novembre

L’Empreinte – Scène nationale de Brive-Tulle
du 3 au 8 décembre

25 octobre 2020/par Vincent Bouquet
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