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Camille Boitel, clown catastrophe

À la une, A voir, Aix en provence, Annecy, Cirque, Les critiques, Paris

(c) L’Immédiat

Dans Fissure, Camille Boitel poursuit son travail autour de l’échec à travers une figure de clown triste, suicidaire, qu’il incarne lui-même. Ou qu’il tente d’incarner, car le loupé concerne autant le monde de la fiction que celui de la représentation. Si elle est la substance première du clown de la pièce, cette crise générale a tendance sur la durée à lui faire perdre de sa densité.

Le visage maquillé d’un blanc qui ne laisse voir sa peau qu’à l’endroit de deux trainées verticales commençant sous les yeux pour finir à la naissance du cou, le personnage de Fissure ne laisse rien voir ou presque de l’homme qui l’incarne. Soit Camille Boitel, que l’on a pu voir au naturel ou presque dans tous les spectacles de sa compagnie L’Immédiat, fondée en 2003 avec la création de sa première pièce, le solo L’Homme de Hus. Là, en plus de son teint trop livide pour être vrai, l’artiste qui pratique la scène depuis l’âge de douze ans et dit confondre « jouer et écrire, et finir par n’en faire qu’une seule chose au point d’écrire tout le temps et toutes sortes de choses et de toutes sortes de manières mais jamais de la bonne manière », arbore une perruque rouge qui lui donne un air de lion et d’incendie que contredit son expression impassible. Il a aussi renoncé à ses habits de tous les jours pour s’attifer d’une grande robe, d’un long manteau qui confèrent au moindre de ses gestes une allure extrêmement artificielle, où la grandeur et le ridicule se confondent.

Le clown triste – car, aucune équivoque possible, c’en est un – qu’incarne Camille Boitel dans Fissure est un agrégat plutôt fascinant de figures très diverses, dont certaines appartiennent au monde du cirque, d’autres du théâtre, d’autres certainement encore d’univers éloignés du spectacle vivant. En cela, il est une sorte de monstre. Il est le fruit de rencontres, de hasards qui ne peuvent prendre corps que sur un plateau, devant un public. Son nom, Fissure, l’indique : il est l’équivalent spectaculaire d’un phénomène géologique qui, connaissant Camille Boitel, ne peut être que catastrophique. Si l’accident, l’accablant inattendu survient comme dans la plupart de ses spectacles sous la forme de trébuchements, de chutes et autres maladresses parfaitement feintes, c’est pour la première fois du personnage lui-même et non son entourage qu’elles naissent. Accompagné à l’écriture de la danseuse Sève Bernard – elle co-écrivait déjà avec lui sa précédente pièce, 間 (Ma, aïda…), qu’elle interprète aussi avec lui –, le fondateur de l’Immédiat joue ainsi un protagoniste qui ne fait rien d’autre que se livrer à sa propre nature.

Dès l’incident qui ouvre la pièce – une armoire tombe, et aussitôt Fissure se jette dessous, crinière la première –, le principe, le mécanisme du spectacle est donné. Catastrophe née d’un ou de plusieurs cataclysmes dont on ne sait rien tant son monde est replié sur lui-même, la créature incarnée par Camille Boitel se laisse aller à sa pente naturelle, au sens figuré comme au sens propre car le plateau où elle ne cesse de s’écrouler et de se relever est incliné. Cette caractéristique scénographique n’est pourtant pas la cause des difficultés de Fissure à se tenir debout : jamais le clown pleureur ne glisse. Pas plus que les meubles vieillots qui font de la scène une sorte de chambre hors du temps. Les nombreux pièges dont la scène est truffée, de même que dans toutes les pièces de Camille Boitel, ne semblent pas non plus responsables de la succession de calamités qui composent Fissure. Le clown est une sorte de Phénix programmé pour un échec qu’il n’arrive jamais tout à fait à réaliser.

Il ne lésine pourtant pas sur les moyens, ou du moins veut donner l’impression de faire tout son possible pour réussir la catastrophe parfaite : celle qui mettrait fin à ses jours. Ses sauts depuis l’armoire, ses électrocutions, ses intoxications produisent d’abord un effet comique habilement contrebalancé par la noirceur des tentatives. Rythmées par les allers-retours d’une lumière attachée à un long bras articulé, ces morts ratées paraissent dans un premier temps vouloir faire fable, ou du moins portrait. L’adresse très directe que crée la scénographie pentue nous fait miroiter sinon un dévoilement complet, du moins une levée partielle de l’énigme que nous pose l’artiste avec son clown fait de signes souvent contraires, et venus de partout. Mais Fissure demeure un système clos. Contrairement à L’Immédiat (2013), dont le mobiliser foisonnant finissait en tas informe, ou à 間 (Ma, aïda…) dont le plancher ne résiste pas aux tentatives d’amour du couple incarné par Camille Boitel et Sève Bernard, le plateau de cette nouvelle création est lui aussi rebelle à toute évolution.

À force de répétitions, les échecs du clown à rater vraiment placent la crise qu’il exprime au-delà du niveau de la fiction. Est-il encore personnage, celui qui ne se définit que par la mise en scène de tentatives de disparition ratées ? Plus Fissure renaît de ses cendres, plus il a l’air de dire la mort du théâtre, et plus il se vide de ce qui en lui était naïf, autrement dit de ce qui en lui était clown. Il déçoit ainsi une partie des belles promesses que nous faisaient miroiter sa maladresse volontaire et son allure improbable.

Anaïs Heluin – www.sceneweb.fr

Fissure

Ecriture et mise en scène : Camille Boitel et Sève Bernard

Idée originale, scénographie et interprétation : Camille Boitel

Jeu et manipulations d’objets : Juliette Wierzbicki

Régie plateau : Audrey Carrot

Régie lumière : Jacques Grislin

Construction décors : Vincent Gadras

Accessoires : L’immédiat, Guillaume Béguinot et Margot Chalmeton,

Avec l’aide de Franck Limon-Duparcmeur, Maxime Burochain, Sylvain Giraudeau, Hervé Vieusse et Louise Diebold

Remerciements à Christophe Charamond et Thomas Marechal

Confection des costumes : Caroline Dumoutiers, Nathalie Saulnier, Lucie Milvoy

Régie générale : Stéphane Graillot

Administration, production et diffusion : Elsa Blossier

Fissure a été créé au Festival Spring, le 4 mars 2022

Production : L’immédiat

Coproduction : Équinoxe – Scène nationale de Châteauroux / Bonlieu Scène nationale Annecy / Le Vellein, scènes de la CAPI – Isère / Trio…S, Scène de territoire pour le cirque / Plateforme 2 Pôles Cirque en Normandie – La Brèche à Cherbourg et le Cirque-Théâtre d’Elbeuf / Conseil Départemental de Seine-St Denis / Ville de Romainville / La Cascade Pôle National Cirque Ardèche Auvergne Rhône-Alpes / Archaos – Pôle National Cirque / le Pôle, scène conventionnée d’intérêt national / avec l’aide du SAMOVAR (Bagnolet) et du Théâtre de Grasse.

Avec le soutien en résidence du Théâtre de la Cité internationale, Paris, de la cie Les Plastiqueurs, la Ferme des 2 Lions, Canteleu, et de la Martofacture.

Avec l’aide de la Fondation Écart Pomaret.

Durée : 1h10

Théâtre de la Cité Internationale – Paris
Du 12 au 24 mai 2022

L’Equinoxe – Chateauroux
Les 4 et 5 octobre 2022

Cirque-Théâtre d’Elbeuf
Du 14 au 16 octobre 2022

Le Pavillon – Romainville
Le 19 novembre 2022

Théâtre de Grasse
Les 25 et 26 novembre 2022

Le Pôle – Le Revest-les-Eaux
Les 2 et 3 décembre 2022

Le Bois de l’Aune – Aix-en-Provence
Les 19 et 20 janvier 2023

Bonlieu – Annecy
Du 21 au 23 février 2023

14 mai 2022/par Anaïs Heluin
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