A l’Opéra de Paris, la soprano Elza van den Heever offre son épatante prise de rôle de Salomé dans une nouvelle production d’une horrible laideur.
Les Salomé de Strauss se suivent et ne se ressemblent pas. À Aix, cet été, Andrea Breth proposait de l’œuvre une belle mise en scène d’inspiration picturale pleine d’une poésie tout en clair-obscur, qui plaçait son héroïne sous la lueur protectrice de la lune omniprésente tandis qu’Ingo Metzmacher déployait en fosse une myriade de détails orchestraux et de couleurs saturniennes. Hélas, ce début de saison parisienne dévoile le navrant travail de l’artiste américaine Lydia Steier, signataire d’un spectacle qui assume un in-esthétisme à faire peur, qui abonde en provocations scabreuses, qui regorge d’outrances et de complaisances dans son traitement de la pièce. Sous la direction de Simone Young, l’orchestre de l’Opéra de Paris est du même acabit, il rivalise d’épaisseur et de prosaïsme.
Le livret comme la musique sont évidemment indissociables d’un érotisme violemment subversif, mais ce qu’ils racontent de la naissance du désir, de la frustration et de la révolte de Salomé paraît autrement plus complexe, bien moins réducteur et racoleur, que ce qui est présenté : une vaine chronique de la vie sexuelle débridée d’une faune de partouzeurs exhibés derrière une vitrine s’adonnant sans complexe à une partie fine qui tourne à la boucherie. Voilà ce qui se donne assez bêtement à voir sur le plateau de l’Opéra Bastille. Une orgie de sexe et d’effusions de sang. La chair y est aussi sale que risible. Impossible d’y trouver la moindre once de sensualité.
Des jouvenceaux nus comme des vers mais enrubannés à la façon d’un paquet cadeau, y sont jetés en pâture. Paluchés puis dépecés, leurs corps sont transportés puis balancés dans une fosse en plein espace public sous l’inaction d’une milice d’hommes armés. Plus tard, Salomé exprime son ardent désir en se livrant à une longue et pénible scène de masturbation. Au paroxysme du mauvais goût, la très gênante « danse des sept voiles » se présente sous la forme d’un viol collectif ou Hérode, suivi d’une cohorte de voyeurs libidineux cocaïnés, abuse copieusement de la pauvre princesse de Judée.
Dans un décor massif et uniformément gris morose, transpire un univers sordide et malsain. Le seul enchantement est suscité par la découverte de la soprano sud-africaine Elza van den Heever qui investit le rôle-titre d’abord avec une expression placide assez monolithique mais qui, peu à peu, laisse découvrir une sauvage incandescence. Elle tient en haleine jusqu’au bout de la scène finale dont elle offre une puissante et tragique incarnation. Si son corps est calfeutré sous un long imperméable puis sous une informe chemise-blouse avant d’être déshabillé et épouvantablement maltraité, sa voix volumineuse, capable de fort belles nuances comme de grands coups d’éclat, est quant à elle pleinement épanouie. Face à elle, Iain Paterson chante un Jochanaan moins passionnant tant il manque de relief et de hauteur. John Daszak est un habitué du rôle d’Hérode dont il fait ici un sommet de perversité. Au timbre vibrionnant du ténor répond insuffisamment la voix bien fatiguée de Karita Mattila dans Herodias, compensée par le certain abattage scénique de la chanteuse qui semble, comme d’autres, bien s’amuser. C’est sans doute le pire dans ce triste spectacle qui voudrait raconter et dénoncer l’hyper-violence subie par une jeune femme victime, mais qui détourne son propos en vaine mascarade grotesque et grossière.
Christophe Candoni – www.sceneweb.fr
Salomé
D’après Oscar WildeMusique :
Richard Strauss – (1864 – 1949)Livret :
Hedwig LachmannDirection musicale :
Simone YoungMise en scène :
Lydia SteierDécors :
Momme HinrichsVidéo :
Momme HinrichsCostumes :
Andy BesuchLumières :
Olaf FreeseDramaturgie :
Maurice LenhardOrchestre de l’Opéra national de Paris
Distribution
Salomé :
Elza van den HeeverHerodes :
Zoran TodorovichHerodias :
Karita MattilaJochanaan :
Iain PatersonNarraboth :
Tansel AkzeybekPage der Herodias :
Katharina MagieraErster Jude :
Matthäus SchmidlechnerZweiter Jude :
Éric HuchetDritter Jude :
Maciej KwaśnikowskiVierter Jude :
Mathias VidalFünfter Jude :
Sava VemićErster Nazarener :
Luke StokerZweiter Nazarener :
Yiorgo IoannouErster Soldat :
Dominic BarberiZweiter Soldat :
Bastian Thomas KohlCappadocier :
Alejandro Baliñas VieitesEin Sklave :
Thomas RicartDurée : 1h45
Opéra Bastille
du 12 octobre au 05 novembre 2022
Effectivement tout est nullissime, gore, de mauvais goût et malsain pour une œuvre qui ne s’y prête pas
On n’y respecte rien ni les acteurs ni les musicien ni l’auteur et encore moins le public
Quelle horreur!