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A l’Opéra de Paris, deux Don Giovanni aux abois dans les bois

A voir, Les critiques, Opéra, Paris

Alex Esposito et Peter Mattei dans Don Giovanni photo OnP Bernd Uhlig

Donnée pour la première fois en France, la mise en scène salzbourgeoise du Don Giovanni de Mozart réalisée par Claus Guth bénéficie, à l’Opéra Bastille, de deux excellents interprètes en alternance dans le rôle-titre. Chacun dans son style se met au service d’une lecture forte et sombre de l’œuvre.

Créé au festival de Salzbourg en 2008, le Don Giovanni de Claus Guth plante son action au cœur d’une forêt profonde et obscure qui s’offre comme un lieu sauvage par excellence dans lequel parcours initiatique rime avec destin tragique. Posé sur un plateau tournant, le très beau décor imaginé par Christian Schmidt, invite à l’errance et la perte de repères. Les personnages mozartiens y paraissent continuellement mis à l’épreuve et livrés à eux-mêmes : Elvira demeure postée sur le banc d’un arrêt de bus déserté en pleine nuit, Anna et Ottavio sont en panne de voiture et sans réseau téléphonique au milieu des hauts sapins. Dans cet impressionnant milieu naturel où règnent sexe et violence, Dom Juan se figure à la fois comme un prédateur vorace et une proie traquée.

Peter Mattei, l’un des meilleurs titulaires actuels du rôle-titre, revient sur la scène de la Bastille où il abordait Don Giovanni il y a presque vingt ans dans la version exceptionnellement froide et clinique que signait Michael Haneke. S’il a désormais troqué la fière allure et la séduction arrogante du jeune cadre dynamique des bureaux de la Défense érigés en enfer urbain capitaliste par le cinéaste autrichien, c’est pour épouser cette fois la solitude existentielle d’un loup des bois, hargneux et las à la fois, rôdant dans sa clairière hostile en attendant la mort. Plein de fougue dans le fameux « Air du champagne », ici fiévreusement sabré à la bière en canette, et en même temps d’une suavité languissante qui fait totalement succomber dans la Sérénade de l’acte II, le baryton suédois n’a rien perdu de ses atouts majeurs, à savoir une voix dont la clarté et le velours rendent son chant sublimement magnétique. Chez Kyle Ketelsen, qui fait de très beaux débuts à l’Opéra de Paris dans le seconde distribution, le timbre est plus noir et corsé. Non sans une rondeur et une chaleur vocales tout à fait adéquates, il se dégage de l’interprète quelque chose de plus brut, de plus fauve, de plus jouisseur et charnel, tout aussi inspirant.

C’est moins l’insatiable séduction exercée par Don Giovanni que sa condamnation à un destin funeste qui guide la lecture du metteur en scène Claus Guth. D’ailleurs, dès l’ouverture, et à la faveur d’un procédé très cinématographique, le héros éponyme en pleine altercation avec le commandeur reçoit une balle de revolver dans l’abdomen. Au bout d’une intrépide course vers l’abîme, le libertin ventre à terre trouve pour tombeau un sol meuble recouvert de neige frigorifiante. Son châtiment conclut sèchement la représentation débarrassée de son artificiel et moralisateur lieto final. Un choix dramaturgiquement convaincant et conforme à une proposition du compositeur lui-même dans sa version viennoise.

De fait, la légèreté inhérente à l’œuvre revient davantage au personnage de Leporello joué également par deux chanteurs qui ne se ménagent pas : Alex Esposito et Bogdan Talos, en acolytes toxicomanes, sont fort à l’aise dans le registre de la comédie avec ce qu’il faut de déjanté et de décadent. Le reste des distributions comporte des points forts (des Ottavio classieux, un Masetto de belle allure) comme il inspire aussi des réserves. Les voix féminines surtout trouvent assez souvent leurs limites. En revanche, le jeu reste dramatiquement investi. Cette vision forte de Don Giovanni, empreinte d’humour et de noirceur, est davantage soutenue par une direction d’acteurs engagée que par l’exécution musicale d’un orchestre étonnamment dépassionné.

Christophe Candoni – www.sceneweb.fr

Don Giovanni
mise en scène de Claus Guth
Musique
Wolfgang Amadeus Mozart
(1756-1791)
Livret
Lorenzo Da Ponte
Direction musicale
Antonello Manacorda
Giancarlo Rizzi

Chef des Chœurs
Alessandro Di Stefano

Décors et costumes
Christian Schmidt

Lumières
Olaf Winter

Chorégraphie
Ramses Sigl

Dramaturgie
Ronny Dietrich

Avec
Don Giovanni
Peter Mattei
Sept 13, 19, 26, Oct 1, 4, 7, 12
Kyle Ketelsen
Sept 16, 21, 29, Oct 3, 6, 9

Donna Anna
Adela Zaharia
Sept 13, 19, 26, Oct 1, 4, 7, 12
Julia Kleiter
Sept 16, 21, 29, Oct 3, 6, 9

Don Ottavio
Ben Bliss
Sept 13, 19, 26, Oct 1, 4, 7, 12
Cyrille Dubois
Sept 16, 21, 29, Oct 3, 6, 9

Il Commendatore
John Relyea

Donna Elvira
Gaëlle Arquez
Sept 13, 19, 26, Oct 1, 4, 7, 12
Tara Erraught
Sept 16, 21, 29, Oct 3, 6, 9

Leporello
Alex Esposito
Sept 13, 19, 26, Oct 1, 4, 7, 12
Bogdan Talos
Sept 16, 21, 29, Oct 3, 6, 9

Masetto
Guilhem Worms

Zerlina
Ying Fang
Sept 13, 19, 26, Oct 1, 4, 7, 12
Marine Chagnon
Sept 16, 21, 29, Oct 3, 6, 9

Orchestre et Chœurs de l’Opéra national de Paris
Production du Staatsoper Unter den Linden, Berlin, en collaboration avec les Salzburger Festpiele

Opéra Bastille
du 13 septembre au 12 octobre 2023

18 septembre 2023/par Christophe Candoni
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