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Ivo van Hove distille le poison du secret

À la une, A voir, Festival d'Avignon, Les critiques, Théâtre

Photo Christophe Raynaud de Lage

Deuxième volet d’une « trilogie » que le metteur en scène flamand consacre à l’écrivain néerlandais Louis Couperus, De dingen die voorbijgann (Les choses qui passent) transforme le huis-clos familial en une tragédie austère. Epaulée par la magnifique scénographie de Jan Versweyveld, la troupe du Toneelgroep Amsterdam y brille une nouvelle fois par sa virtuosité.

Au loin, le tic-tac de l’horloge se fait obsédant. Compte à rebours cruel et inexorable vers la mort, l’immuable régularité sonore du balancier ressemble à s’y méprendre au bruit d’une solution létale qui, après avoir été savamment distillée, serait administrée goutte par goutte, seconde après seconde, jusqu’à la dévitalisation totale des âmes et des corps. Ce lent poison est celui d’un secret, lourd, très lourd, que Grootmama Ottilie et Emile Takma ont toute leur vie cherché à dissimuler, mais qui n’a fait que détruire l’existence des générations suivantes, enfants et petits-enfants compris. Parés des habits du deuil, tous attendent patiemment que les deux patriarches trépassent pour enfin être délivrés de cette malédiction funeste qui a fait de leur vie un gigantesque purgatoire. Dans cette entreprise macabre, Louis Couperus fait office de laborantin littéraire, Ivo van Hove d’alchimiste théâtral.

Photo Christophe Raynaud de Lage

Juste après De stille kracht et juste avant Kleine zielen, De dingen die voorbijgaan (Les choses qui passent) est le deuxième volet d’une « trilogie » que le patron du Toneelgroep Amsterdam a consacré à cet auteur méconnu en France, qu’il définit à l’envi comme le « Proust néerlandais ». D’un ascétisme glacé et glaçant, sa mise en scène transforme le huis-clos familial en une tragédie austère dont il offre une vision nouvelle. Réunie en un chœur antique, la cellule habituellement protectrice devient un miasme maudit qui contamine et absorbe ses membres, malgré toute l’énergie qu’ils déploient pour tenter de s’en extirper.

Dans cette cohorte gangrénée par le péché originel, où chacun a plus peur de vieillir que de mourir, la pyramide des âges s’en trouve inversée : les jeunes sont déjà vieux alors que les vieux se battent pour rester jeunes. Grâce à sa lecture d’une rare intelligence de l’œuvre assez mineure de Couperus, Ivo van Hove se plait à brouiller les pistes et attribue à ses comédiens des rôles qui ne sont pas conformes à leur âge. Avec une intensité dramatique très minimale, tous excellent de précision et de justesse pour dire la déréliction de ces femmes et de ces hommes vampirisés par leurs tourments intimes. En grand-mère pétrie de remords, Frieda Pittoors subjugue, quand Eelco Smits et Aus Greidanus jr. bouleversent en Harold et Lot, fils et petit-fils étouffés par le crime passé et désespérés par un futur sans issue.

© Jan Versweyveld

Cet océan de pétrification, où les corps des personnages se statufient en même temps que leurs âmes putréfient, est magnifié par la sublime scénographie de Jan Versweyveld. Immense salle d’attente, entourée par des peintures d’enfants aux accents macabres, elle révèle l’immense lot de non-dits grâce à de magnifiques effets scéniques et à une utilisation magistrale des lumières. De ce travail d’orfèvrerie, la scène du voyage de noces constitue la plus belle illustration. Un temps éclairé par un faisceau solaire, comme revitalisé par ce mariage qu’il n’avait pourtant pas désiré, Lot plonge peu à peu dans l’ombre de sa mère qui se nourrit de la jeunesse de son nouveau compagnon. Comme un écho à sa glaciation finale, sorte de cryogénisation de ses espoirs déçus. Car, en dépit d’un temps subitement suspendu, la tragédie, elle, se perpétue.

Vincent Bouquet – www.sceneweb.fr

Les choses qui passent
Avec Katelijne Damen, Fred Goessens, Janni Goslinga,Aus Greidanus jr., Abke Haring, Robert de Hoog, Hugo Koolschijn, Maria Kraakman, Majd Mardo, Celia Nufaar, Frieda Pittoors, Luca Savazzi, Gijs Scholten van Aschat, Bart Slegers, Eelco Smits

Texte Louis Couperus
Adaptation Koen Tachelet
Mise en scène Ivo van Hove
Dramaturgie Peter Van Kraaij
Chorégraphie Koen Augustijnen
Musique Harry de Wit
Scénographie, lumière Jan Versweyveld
Vidéo Theunis Zijlstra
Costumes An D’Huys

Production Toneelgroep Amsterdam, Toneelhuis
Coproduction Ruhrtriennale
Avec le soutien de Ammodo, Jeroen van Ingen et Jaap Kooijman,Joost Houtman et Jeffrey Ong, Rob et Marijke van Oordt, et pour la 72e édition du Festival d’Avignon : Dutch Performing Arts
Spectacle en néerlandais surtitré en français
Durée : 2h10

72e édition du Festival d’Avignon
Cour du lycée Saint-Joseph
Du 14 au 21 juillet sauf le 16h à 22H

15 juillet 2018/par Vincent Bouquet
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