Claude Duparfait et Stéphane Braunschweig retrouvent Molière pour la troisième fois. Après Le Misanthrope en 2003, puis Tartuffe en 2008, voici L’Ecole des femmes à l’Odéon. Claude Duparfait est Arnolphe après avoir été Orgon. L’acteur nous parle de son amour pour Molière.
Cette version de L’Ecole des femmes nous renvoie dans la France du 17e siècle mais aussi dans la France du 21e siècle, elle en dit long sur les relations entre les femmes et les hommes aujourd’hui.
Absolument. La pièce raconte les rapports sur la toute-puissance de l’homme. Même si toutes ces questions ont été agitées au regard de l’actualité, Stéphane Braunschweig n’enferme pas le propos dans quelque chose de didactique. On évoque surtout l’emprise et l’abus de virilité chancelante qui est présente chez Molière. Il y a cela dans Le Misanthrope et dans Tartuffe, ce rapport de la peur des femmes qui génère chez les hommes une forme de pulsion, de puissance et d’écrasement. Et là pour le coup cela résonne avec le 21ème siècle et cela fait peur. Tout en remuant ces questions d’actualité liées au mouvement meetoo, on voulait aussi tout conserver l’humour de la pièce.
Que dit la scénographie de cette peur ?
Elle est ouverte sur la part fantasmatique plus que fantasmagorique. On se croirait des fois dans La dame de Shangaï, des fois chez Lynch, il y a des vitres, des parois intérieures comme des zones de fantasme. Les vitres créent un érotisme et un trouble. Stéphane Braunschweig dénude sa scénographie, on perd des peaux petit à petit. Ce cinquième acte sur un plateau nu est une gageure et c’est un immense plaisir pour les comédiens. On est très à nu quand on joue Molière.
Cette nudité dont vous parlez vous contraint à trouver une gestuelle pour incarner Arnophle ?
Ça me rappelle la fameuse phrase de Vitez : « les idées qui ploient le corps ». L’alexandrin de Molière est robuste, il est physique. Il est épuisant, on ne peut pas faire l’économie d’y engager complétement le corps, cela évite de cabotiner. On est sur le fil du rasoir, mais je pense que Molière se brûlait aussi. C’est un rôle de fou, avec cette récurrence des monologues et des soliloques. Ce type était un fou furieux. C’est pour cela que je l’adore. Il me fatigue, il m’épuise, il m’angoisse, mais il me donne une joie unique dans ma carrière d’acteur. C’est comme un copain, que je déteste parfois, mais dont je ne peux pas me passer. Il me donne de la fièvre. Je suis fou de lui.
Propos recueillis par Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
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