Duo à la forte personnalité, Split voit les danseuses Melanie Lane et Lilian Steiner s’affronter autant que s’apprivoiser. Troublant. Pour quelques jours encore au Théâtre des Abbesses.
Split commence à l’unisson : celui des deux interprètes prises dans un ballet soutenu d’effets de bras tournoyants, de mouvements du bassin et de diagonales en scène. Sur la partition minimaliste de Scanner dont on ne sait si elle progresse ou régresse, la paire formée par Lilian Steiner et Melanie Lane ne fait qu’une. A cette nuance près : la première est nue, la seconde habillée d’une robe presque sévère. Le regard passe alors d’une danseuse à l’autre, sans voyeurisme. Il y a juste cette tension d’un corps à nu aux muscles saillants. Peu à peu Lucy Guerin resserre la focale par un effet à la belle simplicité. Le plateau marqué au sol est divisé en deux. Puis au fur et à mesure encore réduit. Jusqu’à ne laisser aux solistes qu’un carré de « jeu » ridiculement petit. On comprend vite que le propos n’est plus l’accord –presque- parfait mais la domination.
Lilian Steiner, complice de Guerin sur d’autres pièces mais également chorégraphe, devient la manipulatrice (in)consciente de ce pas de deux. Dans une séquence furtive elle paraît dévorer les entrailles de sa partenaire. L’amour monstre ainsi affiché fait de Split une transe soutenue. On peut voir dans Split une affaire de séduction ou de conflit, un exercice de style bien dans la manière de Lucy Guerin aussi. Surtout la gestuelle à l’œuvre s’interdit de faiblir toute en tension partagée. 55 minutes durant Melanie Lane et Lilian Steiner ne baissent pas la garde. Simplement enrobé des lumières de Paul Lim ce tandem bouscule nos certitudes.
Lucy Guerin est un secret bien gardé de la danse actuelle, peu programmée en France. On avait découvert l’australienne avec une commande du ballet de l’Opéra de Lyon, Back Box, en 2016. Puis elle récidivait l’année suivante avec un polar dansé Motion Picture déjà aux Abbesses. Chez elle, Guerin est saluée comme un talent à part couronné de récompenses. On ne comprendrait pas que les scènes hexagonales ne finissent pas céder à ses charmes fussent-ils un rien vénéneux.
Philippe Noisette – www.sceneweb;fr
Split, chorégraphie Lucy Guerin, avec Melanie Lane et Lilian Steiner
Théâtre des Abbesses, Paris jusqu’au 8 décembre 2018
www.theatredelaville-paris.com
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !