Voici la première création très attendue de Wajdi Mouawad dans ses fonctions de directeur du Théâtre National de la Colline. Il livre une fresque familiale passionnante de 4 heures avec une troupe d’acteurs inconnus en France.
Dans une bibliothèque universitaire à Harlem, c’est le coup de foudre entre deux étudiants, Eitan (Jérémie Galiana), juif allemand et Wahilda (Souheila Yacoub), d’origine arabe. Ils partent en Israël à la recherche des origines d’Eitan, pour rencontrer Leah (Leoro Rivlin) la grand-mère qui tient les secrets de sa famille. Eitan est victime d’un attentat suicide, sa famille débarque de Berlin, et découvre sa liaison avec une jeune fille arabe. Sacrilège. Comment peut-on tomber amoureux de son ennemi ?
La pièce est le résultat de plusieurs années d’échanges entre Wajdi Mouawad et l’historienne américaine Natalie Zemon Davis. Si l’écriture a continué de se peaufiner pendant les répétitions, la trame de l’histoire s’appuie sur les travaux de Natalie Zemon Davis sur Hassan Ibn Muhamed el Wazzän, diplomate et voyageur du XV ème siècle, livré au pape Léon X et contraint de se convertir au christianisme. On le connaît plus sous le nom de Léon l’africain. Il est en quelque sorte devenu son propre ennemi, ce que Wajdi Mouawad appelle l’oiseau amphibie. Mais l’auteur et metteur en scène fait le choix de ne pas trop utiliser cette métaphore – malgré le titre du spectacle – pour raconter une saga dont il a le secret, avec une multitude de rebondissements dont on ne vous dira rien pour ne pas briser le suspens.
Dans un scénographie beaucoup plus simple et épurée que ses précédents spectacle, composée d’un jeu de construction de morceaux de murs en mouvement, se joue un drame familial saisissant. Entre l’intransigeance d’un père juif (Raphaël Weinstok) qui n’arrive pas à se débarrasser de ses préjugés sur celui qui est différent, une grand-mère dont la méchanceté et le bon sens mettent un peu de piquant et d’humour et une mère (Judith Rosmair) totalement marquée par son enfance passée en Allemagne de l’Est, Wajdi Mouawad introduit de la géopolitique dans tous les personnages. C’est finement ciselé.
Le directeur du Théâtre de la Colline a réuni une distribution de comédiens polyglottes inconnus en France venus de Syrie, d’Israël, de Belgique et d’Allemagne…Ils sont tous excellents. En une fraction de seconde on passe de l’Allemand à l’Hébreu, de l’Anglais à l’Arabe, les sous-titres judicieusement projetés dans le décor ne sont plus un contrainte. Du coup on ne voit pas passer le temps et on est totalement happé par le scénario échafaudé par Wajdi Mouawad, qui signe une pièce chorale passionnante.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Tous des oiseaux
texte et mise en scène Wajdi Mouawad
avec
Jalal Altawil, Jérémie Galiana, Victor de Oliveira, Leora Rivlin, Judith Rosmair, Darya Sheizaf, Rafael Tabor, Raphael Weinstock, Souheila Yacoub
assistanat à la mise en scène
Valérie Nègre
dramaturgie
Charlotte Farcet
conseil artistique
François Ismert
conseil historique
Natalie Zemon Davis
musique originale
Éleni Karaindrou
scénographie
Emmanuel Clolus
lumières
Éric Champoux
son
Michel Maurer
costumes
Emmanuelle Thomas
maquillage, coiffure
Cécile Kretschmar
traduction hébreu
Eli Bijaoui
traduction anglais
Linda Gaboriau
traduction allemand
Uli Menke
traduction arabe
Jalal Altawil
Production
La Colline – théâtre national
avec le soutien des services culturels de l’Ambassade d’Israël en France
avec le soutien du Cameri théâtre de Tel-Aviv
Durée: 4 h avec entracte
1ère partie: 2h15
2ème partie: 1h15La Colline – théâtre national
du 17 Novembre au 16 Décembre 2017
du mercredi au samedi à 20h30, le mardi à 19h30 et le dimanche à 15h30
spectacle en allemand, anglais, arabe, hébreu surtitré en français
création à La Colline
Grand ThéâtreLa Colline
du 31 mai au 25 juin 2022 au Grand Théâtre
du mardi au samedi à 19h30 et le dimanche à 15h30 • relâche le dimanche 5 juin
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