Si les « variations » font leurs preuves en musique, elles fonctionnent souvent moins bien au théâtre – nous sommes toujours traumatisés par les « Musica » de Marguerite Duras, mises en scène par Anatoli Vassiliev au Vieux-Colombier. « Une place particulière », aussi considérée par ses auteurs comme une variation, ne déroge pas à ce triste constat.
Avant-même que le spectacle ne « commence », un groupe d’adultes s’amuse et lutine dans une grande salle de jeux. Certains jouent aux fléchettes, une femme minaude, un autre arrive en retard et en fond de scène, un musicien joue quelques accords de « gratte »… Un groupe de cinq ou six amis réunis pour une raison qui nous échappe encore, jusqu’à ce que l’effervescence s’arrête, au moment ou Margot commence à tirer les cartes. Pour nous dans le public et pour elle-même. Patrice la rejoint, une autre scène débute, ils attendent quelqu’un. Va-t-il arriver ? Aura-t-il changé ? Va-t-il les reconnaître ? Une suite de situations se succèdent et si elles n’ont en commun que leur thème – la famille – on entend quelques vagues questions sur l’implication du travail dans nos vies (les personnages se donnent comme excuse récurrente la « déformation professionnelle ») ou encore la possibilité d’un sixième sens qui nous permettrait d’être en phase avec un interlocuteur impromptu.
Parfois sur la scène, à la manière d’une fresque médiévale, plusieurs actions impliquant le même personnage se déroulent en même temps, les discours s’entrecroisent. Comme une suite d’impressions non structurées, étranges mais pas prenantes. La lumière segmente les différents endroits du plateau et entre les scènes, à la manière de Pommerat – avec moins de talent –, des moments de rêves naissent, faits de danse, de machines à fumée, de corps aux gestes chaloupés et autres masques.
Pour coudre l’action, aucun fil chronologique – ni même de logique tout court. On parcourt l’échelle du temps dans un sens comme dans l’autre, en compagnie de personnes à peu près banales qui connaissent leur lot d’imprévus cocasses – un enfant échangé à la naissance, un déni de grossesse, un train quasiment vide où se rencontre un homme marié et l’amant de sa femme… Tout cela est trop absurde pour être lisible, mais aussi trop lisse pour être mystérieux. Beaucoup de bavardages, peu de recul sur les situations et un jeu approximatif de certains comédiens achève le mauvais tableau. Pourquoi avoir créé ces situations ? Elles ne semblent servir aucun but, et le spectacle reste sans réponse.
Hadrien Volle – www.sceneweb.fr
« Une place si particulière »
création collective écrite et dirigée par Olivier Augrond
avec Margot Faure, Candice Lartigue, Patrice Botella, Yves Buchin, Guillaume Marquet,
Romain Arnaud-Kneisky, Jean-Philippe Feiss
création musicale : Jean-Philippe Feiss
création lumière : Sébastien De Jésus
création son : Janyves Coïc
régie son : Baudouin Rencurel
régie lumière : Julien Bensamoun / Léon Touret
Production : Les Apaches. Avec le soutien du Monfort Théâtre, du Théâtre Jean Arp – Scène conventionnée de Clamart, CAP* à Montreuil et Théâtre de Suresnes Jean Vilar. Ce texte est lauréat de la Commission nationale d’Aide à la création de texte dramatique – Artcena. © photo Olivier Augrond
Diffusion : AlterMachine
Durée 1h50Le Monfort
du 1 au 14 déc. 2016
du mardi au samedi à 21h
Cabane
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