Adishatz : requiem pour une adolescence
Au Théâtre du Rond-Point, Jonathan Capdevielle invoque son moi adolescent pour mieux lui dire adieu. Un portrait à la fois drôle et sensible d’un artiste aux multiples facettes.
On a tous en nous un jukebox adolescent, une discothèque à souvenirs qui s’anime quand retentissent les premières notes de certaines musiques, les premières syllabes de certaines paroles. Dans la mémoire de Jonathan Capdevielle, Francis Cabrel, les Daft Punk et surtout Madonna, dont il a longtemps été fan, occupent une place à part, juste à côté des chansons paillardes de son Sud-Ouest natal. Dans Adishatz qu’il reprend au Théâtre du Rond-Point huit ans après sa création au Centre chorégraphique national de Montpellier, le caméléon de la scène française fait défiler tout un pan de la fin des années 1990 et du début des années 2000. Une période qui correspond à son adolescence, et où les 25-45 ans se retrouveront forcément.
Pour se raconter lui-même, Capdevielle a choisi d’utiliser la voix des autres. Celles des artistes qu’il a admirés et dont il chante aujourd’hui les chansons a cappella, celle de son père resté au pays avec lequel les conversations sont pleines de non-dits, celle d’une de ses amies, Virginie, qui a l’alcool triste après une soirée un peu trop arrosée en boîte de nuit. Puzzle hétéroclite, fait de chansons pop et de conversations intimes, Adishatz dit sublimement cet entre-deux adolescent. Cet âge de la vie où le cocon protecteur de l’enfance se délite et où la carapace protectrice de l’âge adulte n’est pas encore formée. Cet âge où l’on navigue, parfois, entre deux genres, entre deux sexes, entre deux sexualités. Cet âge où les « problèmes de grands » surviennent, où la mort de proches peut frapper, alors qu’on n’y était pas encore tout à fait préparé.
Avec pudeur et délicatesse, Jonathan Capdevielle ouvre grand les portes de son intimité. De sa chambre d’adolescent mal dans sa peau avec son jean et son sweat-shirt gris forcément un peu trop grands, de ses soirées au Must, une boîte de nuit de Tarbes où le DJ fait gagner des bouteilles de Malibu en passant du Britney Spears, de cette chambre d’hôpital où Nathalie se meurt petit à petit. L’artiste fait de cet environnement composite une richesse fondatrice. Plutôt que de rejeter les différences sociales et culturelles qui affleurent entre deux mondes (Paris/Province), entre deux milieux, entre deux vies, il les accueille à bras ouverts et porte sur elles un regard touchant et bienveillant.
Pour autant, Adishatz n’a rien du spectacle mélancolico-nostalgique, du déversoir autofictionnel. Dans une atmosphère à la fois kitsch et simple – où l’on reconnait la patte de sa complice Gisèle Vienne – les pointes d’humour qui se font jour le rendent intensément réflexif. Avec Jonathan Capdevielle, chacun pourra se souvenir et dire adieu à sa propre adolescence. Sur un air de Madonna ou de Lady Gaga.
Adishatz/Adieu
Un spectacle de et avec Jonathan Capdevielle
Lumière Patrick Riou
Collaboration artistique Gisèle Vienne
Regard extérieur Mark Tompkins
Assistanat audio Peter Rehberg
Assistanat artistique pour les tournées Jonathan Drillet
Régie générale Christophe Le Bris
Régie son Johann Loiseau
Avec la participation d’Ecume, Ensemble choral universitaire de Montpellier – Direction musicale Sylvie Golgevit
Avec (en alternance) Pierre-Yves Bruzzone, Renaud Lebrun, Paco Lefort, Jean-Luc Martineau, Olivier Strauss, Benoît Vuillon
Production déléguée Association Poppydog ; coproduction Centre chorégraphique national de Montpellier-Languedoc-Roussillon dans le cadre de ]Domaines[ (France), Centre chorégraphique national de Franche-Comté à Belfort dans le cadre de l’Accueil-Studio (France) et Bit Teatergarasjen / Bergen (Norvège) ; coréalisation Théâtre du Rond-Point – Festival d’automne à Paris, avec le soutien du Centre national de la danse pour la mise à disposition de studios. L’association Poppydog est soutenue par la DRAC Île-de-France – Ministère de la Culture et de la Communication au titre de l’aide à la structuration, avec l’aide de DACM et l’équipe technique du Quartz – Scène nationale de Brest. La pièce a été portée en production déléguée par le Bureau Cassiopée jusqu’en janvier 2016, production Anne-Cécile Sibué-Birkeland, diffusion et administration Fabrik Cassiopée, Léonor Baudouin et Manon Crochemore.
Spectacle créé en 2009.
Durée : 1hFestival d’automne à Paris
Théâtre du Rond-Point, salle Jean Tardieu
Du 12 décembre 2017 au 6 janvier 2018Puis, en tournée :
– Le 20 janvier 2018 au POC – Pôle culturel d’Alfortville
– Les 1er et 2 juin au Naves Matedero – Centro National des artes vivas / Madrid (Espagne)
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !