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L’Histoire d’un Cid (trop) enjouée

Les critiques, Moyen, Théâtre

© Christophe Raynaud De Lage

Jean Bellorini fait son Cid en version conte d’enfants. Dans un château gonflable au pied de la façade de celui, majestueux, de Grignan, les alexandrins de Corneille se muent en punchlines. Au risque que l’aspect populaire ne vire au show.

Faire du théâtre à destination d’un très large public (46 représentations devant plus de 700 spectateurs par soir), Jean Bellorini en avait la mission en acceptant de s’inscrire dans les Fêtes Nocturnes de Grignan où l’ont précédé, entre autres Yves Beaunesne, François Rancillac, Claudia Stavisky, Brigitte Jaques-Wajeman, Denis Marleau, Didier Bezace ou encore David Bobée. Il le fait au-delà parfois de la commande alternant de très bonnes trouvailles avec un lien (trop) poussé dans l’interaction avec le public.

Depuis ses débuts, la langue sophistiquée de la littérature des siècles passés ne lui fait pas peur – Paroles gelées de Rabelais, Un instant d’après Proust… – pas plus que celle, ultra contemporaine et si singulière de Valère Novarina. Il les adapte en les raccordant à la joie de fabriquer du théâtre haut en couleur et clapotant dans l’eau. « Force est de constater qu’il y a dans cette écriture [NDLR, celle de Corneille] une vieillerie, une désuétude qui touche parfois au ridicule. Comment, dès lors, prendre au sérieux cette langue touffue, brillante, épique ? » questionne Sidonie Fauquenoi, documentaliste du TNP, dans le dossier du spectacle. Jean Bellorini ne pouvait imaginer monter in extenso la pièce après que les anciens locataires du théâtre national populaire, Vilar et Planchon l’aient fait dans des versions extrêmement différentes – classique pour le fondateur du festival d’Avignon, débridée, ouvertement politique pour le militant de la décentralisation. Ils étaient les chantres d’un théâtre populaire et exigeant.

Si l’exigence est ici présente dans sa mécanique de jeu et le montage de textes, l’aspect populaire flirte parfois avec la facilité qu’il y a par exemple à faire résonner Balavoine avec le tant entendu tube de Starmania « SOS d’un terrien en détresse » presque annoncé par une phrase distillée plus tôt par le Cid : « je ne suis pas un héros ». Le jeu avec les « punchlines » (nommées comme telles) – « ô rage ô désespoir… », « la valeur n’attend pas le nombre des années », « vas, je ne te hais point », « nous partîmes 500… » – des grandes répliques en alexandrins reprises en chœur par le public qui les apprises « au collège » suffisent à animer cette tragi-comédie du XVIIe siècle tant elles s’insèrent avec adresse dans cette adaptation qui emprunte aussi à Hugo et Novarina.

Jean Bellorini a su construire au fil des années une troupe d’une grande solidité qui apporte dextérité, influences cartoonesques et une autre langue (l’italien) à l’ensemble. François Deblock (véritable clown) et compagnon de route du metteur depuis la compagnie Air de Lune est sur ressorts pour ne pas perdre sa Chimène dont il a été obligé de tuer le père pour obéir au sien. Ce dernier est incarné par Federico Vanni rencontré sur le Tartuffe que Bellorini a monté à Naples la saison dernière. Cindy Almeida de Brito s’est formée à la troupe éphémère du TGP que le metteur en scène avait créée à Saint-Denis (et perpétue au TNP) avant de poursuivre au CNSAD. Enfin Karyll Elgrichi est présente depuis plus d’une décennie dans ses spectacles. En Infante, elle entame et clôt ce spectacle dans lequel elle « travaille » à « perdre » Don Rodrigue. Un duo de musiciens – percussions et claviers – encadre ce quatuor de comédiens par ailleurs tous chanteurs.

Comme souvent dans les propositions du directeur du TNP, c’est l’aspect solaire qui est sauvegardé d’une pièce par ailleurs sombre sur ce que sont les rapports de domination, de soumission dans des familles cadenassées par le pouvoir et leurs rivalités égotiques bien loin des préoccupations de ceux qu’ils sont censés administrer. Ces puissants sont ici des mômes inconscients voire inconséquents guidés par leur seul plaisir. Ils s’amusent et se débattent dans une scénographie qui fonctionne à plein et file la métaphore de l’enfance. Sur une scène ronde, un château gonflable à double configuration illustre, par sa mollesse (quand il est semi-dégonflé) les affres dans lesquels se perdent les protagonistes ou même la mer houleuse qui les malmène sur leur embarcation. Un petit bateau de bois et un cheval à bascule sont des jouets échappés d’une malle aux trésors qui matérialise les grandes épopées du texte, écho au petit théâtre de marionnettes du Fanny et Alexandre de Bergman, référence de Jean Bellorini dans l’approche de cette mise en scène. L’usage (éphémère) de la vidéo s’inscrit aussi pleinement dans cette scénographie mouvante et captivante. Mais il n’est pas aisé d’assouplir le théâtre. « Ton père s’appelle Don Diègue, pas Mick Jagger » rappelle Federico Vanni à son personnage de fils, Rodrigue, haranguant le public avec un vers cornélien.

Nadja Pobel – www.sceneweb.fr

Histoire d’un Cid

D’après Le Cid de Pierre Corneille
Mise en scène : Jean Bellorini

Avec Cindy Almeida de Brito, François Deblock, Karyll Elgrichi, Clément Griffault (claviers),
Benoit Prisset (percussions), Federico Vanni
Collaboration artistique : Mélodie-Amy Wallet
Scénographie : Véronique Chazal
Lumière : Jean Bellorini
Assisté de : Mathilde Foltier-Gueydan
Son : Léo Rossi-Roth
Costumes : Macha Makeïeff
Coiffure et maquillage : Cécile Kretschmar
Vidéo : Marie Anglade
Construction des décors et confection des costumes : les ateliers du TNP

Durée : 1h40

Fêtes Nocturnes 2024 du château de Grignan (Drôme)
Du 27 juin au 24 août 2024

Théâtre National Populaire, Villeurbanne
Du 27 novembre au 20 décembre 2024

Comédie de Reims
Du 5 au 7 mars 2025

La Faïencerie, Creil
Les 13 et 14 mars 2025

Le Bateau Feu, Scène nationale de Dunkerque
Les 24 et 25 avril 2025

Théâtre de Privas
6 mai 2025

Théâtre Nanterre-Amandiers
Du 15 mai au 15 juin 2025

29 juin 2024/par Nadja Pobel
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