Double actualité pour le comédien et metteur en scène au Théâtre de l’Epée de bois à Paris. Il reprend Le Jeu de l’amour et du hasard de Marivaux et crée Créanciers d’après Strinberg.
Avez-vous le trac lors des soirs de première ?
C’est une sensation particulière, un mélange de peur et d’excitation, mais je comprends maintenant quand Michel Piccoli me disait il y a longtemps que ça n’irait qu’en empirant : c’est effectivement le cas.
Plus jeune on découvre tout et tout semble possible – Peu à peu, on apprend qu’une part de votre travail vous échappe. Que la réception du spectacle ne dépend pas seulement de votre travail et engagement, mais aussi d’autres facteurs complètement impalpables finalement. Ce qui est quelque part merveilleux mais qui crée aussi de plus en plus de trac. IL faut finalement savoir lâcher prise. J’apprends à le faire de plus en plus.
Comment passez-vous votre journée avant un soir de première ?
Je travaille encore et encore, je mélange mon énergie à celle des acteurs et des techniciens. Je tente de fabriquer un élan commun tout en gardant les personnalités de chacun.
Avez-vous des habitudes avant d’entrer en scène ? Des superstitions ?
De plus en plus oui : je touche systématiquement du bois.
Pour Juste la fin du monde ,en ce moment même, nous chantons une chanson un peu idiote avec l’équipe avant le spectacle, pour constituer un souvenir de la famille –
Pour Le jeu de l’amour, nous dédions toujours la représentation à un ou plusieurs acteurs (ou artistes) disparus que nous admirons : très souvent Girardot, de Funès, Piccoli ou encore Freddy Mercury…
Première fois où je me suis dit « je veux faire ce métier ? »
Quand je vois La soupière avec Denise Grey au Péage de Roussillon, mon village de naissance, avec ma grand mère- Quand j’ose ensuite l’appeler au téléphone et qu’elle me répond (parce qu’elle est dans l’annuaire à l’époque). Je me dis alors que le lien avec des artistes devient possible. Quelques années plus tard, je rencontre Francis Huster après une représentation du Cid aux nuits de Fourvière, il m’encourage à « monter sur Paris » pour faire les cours Florent. Je le croise en juillet 93, et en septembre de la même année, je change de vie.
Premier bide ?
Alors la : c’est à l’espace Jemmapes, texte de Noëlle Renaude Ma Solange comment t’écrire mon désastre – la pièce a bien porté son titre…Cinq jeunes sont dans la salle, il n’y a donc que 5 spectateurs qui ne savent absolument pas ce qu’ils viennent voir. Ils commencent à nous parler, à intervenir pendant le spectacle – Noëlle avait glissé quelques provocations dans le texte qui les ont rendu fou, car ils n’ont pas vu le second degré. Nous avions notamment une scène de balayeurs , ils se sont levés et ont tenté de nous arracher nos balais : c’était finalement très interactif ! A vivre c’était l’horreur, mais nous en parlons encore.
Première ovation ?
Pour Cymbeline que je mettais en scène à Nanterre-Amandiers. Je me souviens de la salle entière du TNP debout à la fin puis celle du Quartz de Brest, debout également, c’était dément !
Premier fou rire ?
Dans Le jeu de l’amour et du hasard (que nous reprenons actuellement à l’épée de bois ) : l’acteur qui jouait Mario avait eu le malheur de se faire une coiffure type iroquois sans me prévenir. Je le découvre donc pendant notre scène et j’ai cru bon de faire un geste face à lui pour lui signifier que ces cheveux étaient très en hauteur : sorte de blague que je lui faisais et là je n’ai pas pu me contenir pendant toute la scène, c’était terrible.
Premières larmes en tant que spectateur ?
Je me souviens d’Isabelle Adjani dans une scène déchirante dans des escaliers dans La dame aux camélias mise en scène par Alfredo Arias, une des scènes les plus déchirantes que j’ai vu au théâtre. Il y a aussi les larmes de Dominique Blanc dans Phèdre de Patrice Chéreau, que j’ai vu, par chance, tant de fois….
Première mise à nue ?
Littéralement quand je mimais une scène sur une cuvette des toilettes dans Parasites de Mayenburg à Nanterre-Amandiers et que j’utilisais une page de papier journal pour clôturer l’acte- Je trouvais ça intérieurement très impudique. Je me suis mis a nu aussi chaque fois que j’ai joué Les visages et les corps de Patrice Chéreau…
Première fois sur scène avec une idole ?
Dominique Blanc, Florence Giorgetti, Irène Jacob, Jérôme Kircher : tous les acteurs que je réunis pour La mouette ; je les admire tous tellement.. – et actuellement je joue Créanciers avec Julie Debazac et Benjamin Baroche que j’aime énormément, comme artistes mais aussi comme humains.
Première interview ?
Une des premières pour les Amandiers, je me souviens que l’attaché de presse avait organisé une séance photo avec Jean-Marie Perrier, j’étais très impressionné, je me suis pris quelques minutes pour Claude François ou Françoise Hardy…
Premier coup de cœur ?
Le choc de ma vie reste Dans la solitude des champs de coton à la Manufacture des Œillets en 1995. Je me souviens encore ne pas avoir tout compris la première fois, mais avoir été traversé par une énergie qui me marque au fer rouge pour toujours. Cette force de vie et de création qui rend la vie parfois plus douloureuse mais plus belle aussi..
Laisser un commentaire
Rejoindre la discussion?N’hésitez pas à contribuer !