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Passer sa vie à compter son temps

À la une, A voir, Les critiques, Lyon, Théâtre

 

photo Claire Bordenave

Frédéric Leidgens et Sophie Robin rendent hommage au Théâtre des  Célestins à Lyon au peintre franco-polonais Roman Opalka, mort en 2011, à travers ses rencontres avec l’écrivain poète Bernard Noël. Une plongée dans la pensée d’un artiste hors du commun. 

C’est en 1965 que Roman Opalka décide de consacrer sa vie à peindre des suites de nombres sur ses toiles, pour capter le temps qui passe. Une série qui démarre à 1 et s’achèvera à 5092456, au bout d’une série qui comptera 231 œuvres nommées Détails. On entend d’ici les railleurs de l’art contemporain, prompts à dézinguer les concepts fumeux de ses artistes. Qu’ils viennent donc voir Un, spectacle conçu et interprété par Frédéric Leidgens et Sophie Robin qui, par l’entremise de Bernard Noël, rend compte de ce travail unique dans toute sa poésie et toute sa profondeur.

« J’ai fait le choix d’offrir la durée de mon existence à la peinture ». « Ma recherche a le dégoût de tout ce qui se passe y compris dans l’Art ». « Il m’a fallu du temps pour comprendre que mon discours est une œuvre lui aussi ». L’écrivain poète Bernard Noël a relaté ses rencontres avec le peintre polonais Roman Opalka dans Le roman d’un être. Il lui rend trois visites, en 1985, 1990 et 1996 ; observe l’artiste au travail dans son atelier et l’interroge sur ce qu’il fait. Face à lui, des peintures couvertes de nombres, de tout petit nombres tracés minutieusement, pinceau à la main, qui se succèdent dans l’ordre croissant, sur des surfaces qui s’éclaircissent au fur et à mesure du temps. Et un homme qui vieillit, qui se photographie à l’identique, qui se tient immuablement debout en chemise face à l’appareil photo et face au chevalet, dans des postures millimétrées, dans une activité lente, monumentale, répétitive et minutieuse. Il semble vouloir faire corps avec cette lumière qui se lève face à lui, de la toile, et se laisser absorber par cette œuvre qui peint son effacement. L’œuvre du Temps.

On ne détaillera pas ici précisément le processus de travail d’Opalka, ses évolutions. Pas plus qu’on ne parlera de la puissance évocatrice de sa démarche. Ses mots et ceux de Bernard Noël sont irremplaçables et les nôtres seraient bien fades. Sur scène, Sophie Robin porte surtout ceux du poète français, Frédéric Leidgens ceux du peintre polonais. Les deux comédiens varient un peu. Passages avec ou sans micros, en direct ou enregistrés. Le tout dans une grande simplicité, une grande intelligibilité. Avec délicatesse. Entre des réflecteurs, une grande table blanche (de l’écrivain) à la quelle fait écho un grand rectangle blanc (le châssis du peintre où apparaît son portrait). On est un peu dans l’atelier, mais pas trop, les effets sont mesurés pour laisser s’épanouir la parole des deux artistes.

L’histoire de ce travail et les mots que le plasticien pose dessus abordent la singularité exceptionnelle de sa démarche unique dans un art contemporain dévoué au toujours nouveau. Mais aussi ses résonances, existentielle, bien sûr, puisqu’il s’agit de rendre par ce geste le passage du temps dans la vie. Esthétique, philosophique. Et aussi de simples considérations pratiques sur l’artiste au travail et sur sa vie. Mais surtout, avant tout et surtout, Un relate ce qu’une démarche aux allures conceptuelles peut avoir d’intimement relié à la sensation et à la recherche de l’émotion, et comment un travail calibré, répété, d’apparence ultra rationnelle – Opalka se nomme lui-même « mystique de la rationalité » – peut tendre à éprouver de la manière la plus sensible qu’il soit ce que c’est que de vivre, et d’avancer vers la mort, en regardant le temps passer. Il y a dans cette expérience artistique, sacrificielle, presque de l’ordre du suicide, les échos de la folie qui nous guette face à la disparition, et l’imperturbable détermination que dressent face à elle les poètes de l’Art Brut.

Eric Demey – www.sceneweb.fr

Un d’après « Le Roman d’un être » de Bernard Noël – P.O.L.
Entretiens avec le peintre Roman Opalka.
Mise en scène
Frédéric Leidgens
Avec Frédéric Leidgens,
Sophie Robin
Scénographie et création lumière : Eric Blosse
Création vidéo : Mickaël Varaniac-Quard

Production : Collectif jesuisnoirdemonde
Coproductions (en cours) : Les Célestins – Théâtre de Lyon, Les SUBS
Accueil en résidence (en cours) : Les SUBS

Durée 1h30

Les Célestins
du 5 au 15 janvier 2023

7 janvier 2023/par Eric Demey
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