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Un Tartuffe à bras-le-corps

A voir, Les critiques, Paris, Théâtre

Marina Hands, Denis Podalydès et Christophe Montenez photo Jan Versweyld

A la Comédie-Française, se laisse découvrir la toute première version nouvellement reconstituée du Tartuffe de Molière dans une mise en scène brute et brutale d’Ivo van Hove défendue avec ardeur par la troupe.

Donnée une seule fois à la cour en mai 1664 et aussitôt interdite par Louis XIV car jugée trop à charge et amorale, la version initiale et donc inédite de Tartuffe, scientifiquement reconstituée grâce au travail de « génétique théâtrale » mené par l’historien Georges Forestier, se présente comme beaucoup plus courte et drue. Elle va droit au but et ne manque pas d’explicite. C’est sans doute ce qui a encouragé le metteur en scène belge à pousser voire fortement appuyer sa portée subversive en faisant s’apparenter le vaste plateau dépouillé à un ring sur lequel se jouent d’éloquents corps-à-corps. Il faut faire abstraction du cérémonial pompeux auquel se livrent les comédiens qui se font face et se saluent avant d’entamer leurs scènes (comme le font les judokas avant un combat), comme de certains effets visuels et sonores superflus, pour goûter pleinement le jeu acéré, concentré, enfiévré qui se déploie. Les personnages se saisissent, s’affrontent comme des adversaires à l’occasion de puissantes joutes verbales et physiques. La lutte acharnée s’effectue de très près et de manière charnelle. La mise en scène se montre vraiment convaincante lorsqu’elle exacerbe aussi bien la violence que la passion qui gagnent et dévorent les êtres piégés par l’ambivalence des rapports d’attraction et de répulsion qu’ils entretiennent entre eux.

Après le succès des Damnés et de Électre/Oreste, Ivo van Hove signe déjà sa troisième collaboration avec le Français et s’éprend à nouveau de l’acteur Christophe Montenez qu’il conduit à nouveau dans les zones troubles et sombres du mal et de la tentation. Lui confier le rôle-titre consiste à placer nécessairement Tartuffe du côté d’une séduction quasiment domjuanesque, moins lisse que dévastatrice. Le faux dévot attire, aimante, et ce, en dépit de la posture misérable avec laquelle il se présente au début, en marginal clochardisé sous un amoncellement de vieilles couvertures. Dévêtu de ses loques crasseuses, plongé dans une baignoire, bien savonné, bien habillé, Tartuffe revêt alors un aspect propret et plus conforme aux mœurs strictes et étriquées de sa bourgeoise famille d’accueil. S’il adopte les traits d’un premier communiant empreint d’une lascive suavité, il affecte également les pulsions fauves et fiévreuses colères d’un démon effroyable qui s’adonne à la flagellation à coups de martinet.

L’anéantissement est bien le sort réservé au couple central que forment Orgon et Elmire, traversés l’un et l’autre du désir confondant que suscite la magnétique présence de Tartuffe. Denis Podalydes paraît presque autant risible que touchant enfermé dans son idolâtrie hébétée tandis que sa femme est la sublimissime Marina Hands, d’une sensualité, d’une intensité, d’une humanité absolument renversantes. Totalement écorchée, l’actrice met en valeur toute la force et la fragilité du personnage. L’entière distribution porte le jeu à l’excellence même si les personnages secondaires semblent moins étoffés ici que dans la version qui suivra. Dominique Blanc dans Dorine, Loïc Corbery dans Cléante, Claude Mathieu dans Madame Pernelle paraissent très en verve. Une jouissive férocité tranche net dans la lecture claire et coriace que livre Ivo van Hove de la pièce jusqu’à une certaine indétermination finale. L’ajout d’un tableau conclusif totalement extrapolé laisse d’abord croire par la mort de la matriarche l’extinction fatale de la famille pulvérisée puis finalement donne à voir son exact contraire dans une sorte de renaissance plus libre et débridée que jamais.

Christophe Candoni – www.sceneweb.fr

Tartuffe ou l’Hypocrite
Comédie en trois actes et en vers
Version interdite de 1664 restituée par Georges Forestier, avec la complicité d’Isabelle Grellet
Le Tartuffe ou l’Imposteur, en 5 actes qui est habituellement joué a été créé le 5 février 1669 au Théâtre du Palais-Royal et joué 3193 fois par la Comédie-Française depuis 1680.

Mise en scène : Ivo van Hove
Dramaturgie : Koen Tachelet
Scénographie et lumières : Jan Versweyveld
Costumes : An D’Huys
Musique originale : Alexandre Desplat
Collaboration musicale : Solrey
Son : Pierre Routin
Vidéo : Renaud Rubiano
Réalisation maquillages : Claire Cohen
Assistanat à la mise en scène : Laurent Delvert
Assistanat à la scénographie : Jordan Vincent
Assistanat aux lumières : François Thouret

Avec
Claude Mathieu
Mme Pernelle, mère d’Orgon

Denis Podalydès
Orgon, mari d’Elmire

Loïc Corbery
Cléante, beau-frère d’Orgon

Christophe Montenez
Tartuffe, faux dévot

Dominique Blanc
Dorine, suivante

Julien Frison
Damis, fils d’Orgon

Marina Hands
Elmire, femme d’Orgon

Avec le soutien de la Fondation pour la Comédie-Française

Au cinéma en direct 15 janvier suivi de l’hommage de la Troupe à Molière

Durée: 1h45

Salle Richelieu
du 15 janvier au 24 avril 2022

26 janvier 2022/par Christophe Candoni
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3 réponses
  1. Jean-Marie Besset
    Jean-Marie Besset dit :
    9 décembre 2021 à 22 h 37 min

    Cette version de Tartuffe est disponible à la Mazarine, à la bibliothèque de la Comédie Française et sur Gallica notamment… Elle était accessible à quiconque voulait bien s’y intéresser. Bravo M. Van Hove de l’avoir choisie. Mais ce n’est nullement M. Forestier qui l’a inventée ou redécouverte.

    Répondre
  2. Renard
    Renard dit :
    30 mars 2024 à 9 h 13 min

    N’empêche qu’il la  » redecouverte » et commenté en universitaire nous dit on . Et le droit s’appliqué aux travaux universitaires.

    Répondre
  3. Renard
    Renard dit :
    30 mars 2024 à 9 h 15 min

     » l’a « et  » commentée  »  » s’applique »

    Répondre

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