En s’appuyant exclusivement sur les textes de l’icône sud-africaine, le metteur en scène signe une pièce rigoureuse, servie par quatre excellents comédiens, à mille lieues de l’hagiographie hollywoodienne. Une réussite.
Il faut reconnaître à Xavier Marchand une certaine audace. Peut-être même, faut-il reconnaître à Xavier Marchand une certaine inconscience… Le metteur en scène, passionné par les figures de l’engagement, s’est donné comme projet de raconter au théâtre la vie et l’œuvre du grand Nelson Mandela ; un sujet passionnant, certes, un sujet au potentiel dramatique inépuisable, indéniablement, mais un sujet sur-traité par Hollywood (Mandela 1987, Goodbye Bafana 2007, Invictus 2010, Winnie 2010, Mandela : Un long chemin vers la liberté 2013…) saturant notre inconscient collectif de références et surtout de pathos.
C’était risqué, donc, très risqué. Et pourtant le metteur en scène s’en tire remarquablement bien, signant un spectacle à la fois radical, sur le plan théâtral, et extrêmement rigoureux, sur le plan historique. Xavier Marchand a eu la bonne idée, justement, de prendre le contre-pied du biopic hagiographique, en tissant un récit avec des textes exclusivement signés par l’icône sud-africaine (Un Long chemin vers la liberté, son autobiographie, et Conversations avec moi-même, un recueil réunissant ses lettres de prison, ses notes et des interviews). Le détenu politique devenu Président s’en tient aux faits et aux analyses, avec autant de précision que d’humilité ; la leçon est philosophique.
Sur les planches, la mise en scène est à l’image de l’adaptation, radicale : un décor dépouillé (quelques chaises, trois tables, des pieds de micros, un écran), quatre comédiens (qui s’échangent les rôles ; Mandela, ses camarades de lutte, des avocats, des juges…), une théâtralité à l’os (qui lorgne souvent vers le récit conté), et un spectacle long (trois heures trente) réussissant, là où les biopics échouaient, à donner l’idée que le combat contre l’apartheid s’est inscrit dans la durée, que l’incarcération de Mandela lui prendra presque un tiers de sa vie (30 ans) et que la lutte armée (le sabotage en l’occurrence) est parfois nécessaire. Comme quoi, au théâtre, l’audace – et même une certaine inconscience – peuvent produire de belles choses.
Igor Hansen-Love – www.sceneweb.fr
Mandela
D’après les écrits de Nelson Mandela
Adaptation : Olivia Burton et Xavier MarchandMise en scène : Xavier Marchand
Assistanat et dramaturgie : Olivia BurtonAvec : Odile Darbelley, Moanda Daddy Kamono, Valentin Rotilio et Lazare Minoungou
Régie générale : Julien Frenois
Création lumières : Julia Grand
Régie lumières : Lucie Delorme
Scénographie : Bissane Al Charif
Musique : Josef Amerveil
Archives : Nolwenn Gouault
Montage : Juliette Hautbois
Costumes : Gwladys Duthil
Production Lanicolacheur
Coproduction MC93, Maison de la Culture de Seine-Saint-Denis – Bobigny ; Châteauvallon- Liberté, scène nationale – Toulon ; Théâtre Joliette scène conventionnée art et création, expression et écriture contemporaine, Marseille ; Maison de la Culture d’Amiens, pôle européen de création, de production et de diffusion artistiques et culturelles – Amiens ; Pôle Arts de la Scène – Friche La Belle de Mai.
Avec le soutien de King’s Fountain
Et de La Fonderie – Le Mans, Châteauvallon-Liberté et la MC93 dans le cadre des résidences de création.
Le décor est construit dans les ateliers de la MC93.Durée : 3 h 30
création Châteauvallon, scène nationale
1er et 2 octobre 2021MC 93, Maison de la Culture de Seine-Saint-Denis
du 7 au 16 octobre 2021Maison de la Culture d’Amiens
du 21 au 22 octobre 2021Théâtre de la Joliette, Marseille
du 13 au 14 novembre 2021Théâtre du Bois de l’Aune, Aix-en-Provence
du 27 au 28 novembre 2021
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