L’étoile-vedette du Ballet de l’Opéra de Paris se livre dans Danser co-écrit avec Caroline de Bodinat.
Les danseurs n’ont pas – toujours – la réputation d’être de grands bavards. Pourtant certains se sont essayés au délicat exercice du livre, entre mémoire et récit. On peut s’étonner de voir Hugo Marchand, star du Ballet de l’Opéra de Paris, céder à la tentation des mots si jeune – il n’a que 27 ans !. Une étoile comme Patrick Dupond aura attendu ses 40 ans pour se livrer dans Etoile son autobiographie.
Hugo n’a pas la prétention de raconter une vie de danse, juste de mettre des paroles sur un début de parcours fulgurant. Il a, dit-il, porté ce livre pendant trois ans. Ces derniers mois ont été ceux de l‘introspection pour nombre d’artistes. Du côté de l’Opéra de Paris également. Privé de scène et de public durant une partie de 2020, Hugo Marchand aura sans doute pansé ses plaies en écrivant. Alors le soliste raconte ses doutes, enfants, à l’école de danse de l’Opéra de Paris. « Cette année grave en moi les premières douleurs physiques et ma rencontre avec le miroir. Avec ce satané miroir, nous allons devoir nous entendre. Je ne suis pas Narcisse. Mon reflet m’attriste. Il n’y a rien de cet idéal que je recherche, que j’aimerais. Je le prends en grippe », écrit le danseur. Cette première année, avec pour « rival » un certain Germain Louvet, Hugo la détaille.
Puis vient son entrée dans la compagnie, un autre cap. « Maintenant tout va commencer », lâche-t-il. Même si le jeune homme déchante un peu ; « l’essentiel de nos journées, nous les passons le cul par terre, dans les coulisses et les studios de répétition à prendre des notes, à observer ». Peu à peu un autre Hugo Marchand se révèle. « Mais la danse est surtout et avant tout l‘école de l’acceptation ». On lira dans ces pages peu de révélations, mais s’y dessine en creux le portrait d’une artiste citoyen, parfois un rien capricieux.
Hugo Marchand rend justice à Benjamin Millepied qui, le premier, croit en cette génération. Il est plus hésitant sur son rapport à Aurélie Dupont. Mais sait ce qu’il lui doit – notamment sa nomination au titre d’étoile. La recherche de la partenaire idéale (spoiler c’est… Dorothée Gilbert !) offre des pages d’une rare franchise : « Nous avons « cette façon de se respirer le cœur », cette respiration que le public veut aussi respirer ». Pour beaucoup, c’est le plus beau couple de scène à l’Opéra de Paris. Hugo Marchand évoque enfin ses attentes ou ses questionnements sur sa sexualité. Les passages les plus forts ? Sa blessure et les lendemains qui déchantent ou certaines prises de rôle (Romeo et Juliette, Eugène Onéguine). Il y a une vraie honnêteté entre ces lignes. On peut y voir le regard extérieur de Caroline de Bodinat, journaliste, qui a aidé Hugo à mettre des mots sur ses maux. Danser est une déclaration d’amour à un art. En ces temps confinés, où la danse en est réduite au petit écran, ce livre parlera à beaucoup.
Philippe Noisette – www.sceneweb.fr
Danser, de Hugo Marchand avec Caroline de Bodinat, Editions Arthaud, 19,90€.
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