Organisées au Théâtre Mogador, et pour la première fois sous l’égide d’Ekhoscènes, les 41e Rencontres du Théâtre Privé ont permis aux professionnels du secteur de lancer leur saison 2024-2025, et de faire passer quelques messages.
Les saisons se suivent et ne se ressemblent pas tout à fait pour les théâtres privés. Tandis que la rentrée de la saison 2023-2024 avait été marquée par un afflux de créations, le cru 2024-2025 renoue avec un assemblage plus traditionnel, fait pour moitié de reprises et pour moitié de nouvelles productions. « L’an dernier, nous faisions notre première vraie rentrée post-Covid, ce qui expliquait cette quantité importante de créations, traduit Caroline Verdu, vice-présidente Théâtre du syndicat Ekhoscènes, qui regroupe désormais le Prodiss (Syndicat national des producteurs, diffuseurs, festivals et salles de spectacle musical et de variété), le SNDTP (Syndicat national du théâtre privé) et le CAMULC (Syndicat des cabarets music-halls et lieux de création), et représente, à l’en croire, deux tiers du poids économique de la filière du théâtre privé. Après une bonne année, il était donc logique que certaines soient reprises cette saison. Contrairement à d’autres, nous n’avons pas attendu le plan du ministère ‘Mieux produire, mieux diffuser’ pour nous inscrire dans cette logique et offrir aux spectacles de longues séries ».
Si les chiffres de fréquentation de la saison dernière sont « encore en cours de consolidation » par l’Association pour le Soutien du Théâtre Privé (ASTP), Caroline Verdu anticipe qu’ils seront « bons », au vu des recettes de la taxe fiscale prélevée sur chaque billet de spectacle « qui ont atteint leur plafond de 8 millions d’euros », et espère « qu’il en sera de même cette saison ». Pour cela, les théâtres privés pourront compter sur une alliance de tubes inusables – Edmond au Palais-Royal, Le Roi Lion au Théâtre Mogador, Glenn / Naissance d’un prodige au Théâtre Montparnasse, La Machine de Turing au Théâtre Michel ou encore Les Crapauds Fous à La Renaissance – et de créations attendues – L’extraordinaire destinée de Sarah Bernhardt au Palais-Royal, La Serva Amorosa à la Porte Saint-Martin, L’Amante anglaise à L’Atelier ou La prochaine fois que tu mordras la poussière au Petit Saint-Martin.
Des nouvelles productions qui, a rappelé Caroline Verdu à l’occasion des 41e Rencontres du Théâtre Privé, organisées ce lundi 9 septembre au Théâtre Mogador, seraient « impossibles » sans « l’encouragement à la prise de risques de l’ASTP », et notamment sa garantie de déficit. Façon pour la vice-présidente Théâtre d’Ekhoscènes de répondre à l’Inspection générale des affaires culturelles (IGAC) qui, dans un rapport remis au ministère de la Culture avant l’été et intitulé Le système d’aide de l’Association pour le soutien du théâtre privé, appelait l’ASTP à « opérer par elle-même une triple évolution : celle de sa gouvernance, en permettant à davantage de professionnels et de responsables du secteur d’intervenir dans la gestion du dispositif ; celle des bénéficiaires de ses aides, qui doivent dépasser le nombre des seuls membres de l’association ; et celle de son fonctionnement, qui doit garantir la transparence des aides et l’égalité de traitement entre les bénéficiaires des subventions ».
Si les représentants théâtre d’Ekhoscènes se disent « prêts à faire évoluer les mécanismes de soutien au théâtre privé pour les rendre plus efficients », Caroline Verdu rappelle que l’organisation tient à ce que l’ASTP « soit gouvernée par des professionnels et pour des professionnels », qu’elle « restera ferme sur les principes d’automatisation des aides sans jugement esthétique, de soutien à l’emploi permanent et aux distributions nombreuses, de soutien à l’émergence sans le dévoyer par du saupoudrage inefficace, et bien sûr de mutualisation et d’accompagnement à la prise de risque », et réfute l’idée selon laquelle « une poignée de théâtres privés trustent les fonds de l’ASTP ».
En même temps que cette préoccupation, la vice-présidente Théâtre d’Ekhoscènes tiendra à en partager une autre avec « le futur ou la future ministre de la Culture » qu’elle compte rencontrer prochainement : une « nouvelle forme de censure » qui, assure-t-elle, « se développe sur les territoires de la part de programmateurs visés par leurs élus locaux qui préfèrent éviter de mettre à l’affiche dans leurs lieux, des spectacles portant sur des sujets qu’ils imaginent heurter une partie de leurs administrés ». Et Caroline Verdu d’enfoncer le clou lorsqu’on l’interroge : « Nous observons un vrai durcissement sur des sujets comme les migrants, l’homosexualité, le féminisme ou toute forme d’inclusion. Certains élus, notamment ceux situés aux extrêmes, ne veulent plus que du pur divertissement. » De quoi compliquer la tâche des artistes, déjà percutés par des coupes budgétaires en série.
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