Loin des clichés sur la banlieue, la dernière pièce de Nasser Djemaï parle d’une famille française issue de l’immigration, dont le fils ainé a réussi à s’en sortir grâce à l’ascenseur social. Une pièce émouvante, actuellement en tournée en France. Créée en 2017, Nasser Djemaï la reprend en 2025 avec une nouvelle distribution.
Nadir (Zakariya Gouram) c’est un peu le « blanc » de famille. Il a quitté la banlieue pour les beaux quartiers et même si son mariage est sur le point de capoter, il est père de deux magnifiques petites filles et dirige une entreprise. Lorsqu’il revient s’occuper pour quelques jours de son père malade (exceptionnelle interprétation de Lounès Tazaïrt), il est face à un monde qui n’est plus tout à fait le sien, face à des fantômes. C’est le choc des cultures. Son frère (Issam Rachyq-Aharad) et sa sœur (Clémence Azincourt) n’ont plus grand-chose en commun avec lui. Sa mère (magnifique Fatima Aibout) tente de tenir à bout de bras le foyer dans lequel erre une voisine (Marine Harmel). Nadir est comme un intrus dans sa propre famille.
Entre réalisme et fantastique, la vie dans cet appartement bascule. Les meubles en formica vacillent dans la scénographie d’Alice Duchange, les images vidéo de Claire Roygnan s’incrustent dans les plaies à vif. « Tu as mis le feu dans ma tête » lui lance sa mère désespérée. Face au père qui souhaite revoir une dernière fois son pays de naissance, Nadir intransigeant déclare avec brutalité « Ce n’est plus mon pays ».
Nasser Djemaï a mis beaucoup de lui dans l’écriture de cette pièce. Il nous faire entrer en toute simplicité dans cette famille qui est un peu la sienne, dans ce quartier qui est « un grand théâtre » comme le dit le père, dans cette banlieue souvent brocardée et montrée du doigt. Il n’élude pas les tensions entre les personnages mais il met aussi beaucoup de tendresse et d’amour dans leurs relations. L’amour s’exprime notamment dans un moment douloureux, lors de la mort soudaine du père. Sa femme et ses enfants le lavent selon le rite musulman, une dernière scène du spectacle qui résume à elle seule la dignité de ce spectacle.
Stéphane CAPRON – www.sceneweb.fr
Vertiges Fragments de Nasser Djemaï
texte et mise en scène Nasser Djemaï
avec à la création
Fatima Aibout,
Clémence Azincourt,
Zakariya Gouram,
Martine Harmel,
Lounès Tazaïrt,
Issam Rachyq-Ahraddistribution de la recréation 2025
Yassim Aït Abdelmalek, Nasser Djemaï, Chiara Galliano (violoncelle), Martine Harmel, Farida Ouchani, Lounès Tazaïrt, Zaïna Yalioua
création lumières Renaud Lagier
création sonore Frédéric Minière
production des Théâtrales Charles Dullin, édition 2016
Production Théâtre des Quartiers d’Ivry – CDN du Val-de Marne
Coproduction Comédie de Colmar – Centre dramatique national Grand Est Alsace, Théâtre de Lorient – Centre dramatique national de Bretagne, Centre dramatique national de Normandie-Rouen, Théâtre de Sartrouville et des Yvelines – Centre dramatique national, Théâtre de l’Union – Centre dramatique national du Limousin, Les Théâtres de la Ville de Luxembourg • © Jean-Louis Fernandez
durée 1h50 minVu à la création en 2017
Tournée de la recréation
Théâtre des Quartiers d’Ivry
du 20 au 30 novembre 2025Comédie de Colmar – CDN Grand Est Alsace
11 — 12 décembre 2025CDN de Normandie-Rouen
9 — 10 janvier 2026Théâtre de l’Union – CDN du Limousin
4 — 6 février 2026Le Préau – CDN de Normandie – Vire
12 — 13 février 2026Maison des arts de Créteil
20 — 21 mars 2026Théâtre de Nîmes, Scène conventionnée
24 mars 2026Théâtre Molière – Sète, Scène nationale archipel de Thau
27 mars 2026Théâtre de Lorient – CDN de Bretagne
8 — 9 avril 2026




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