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Une femme irradiée d’amour

A voir, Avignon, Best Off, Les critiques
Valentina Tchernobyl de Coralie Emilion-Languille
Valentina Tchernobyl - Coralie Emilion Languille

Photo Georges De Genevraye

En s’emparant d’un témoignage issu de La Supplication de Svetlana Alexievitch, Coralie Emilion-Languille transmet avec sobriété la parole d’une femme désarmante d’amour absolu pour son mari, victime des radiations de la centrale de Tchernobyl après l’explosion de l’un de ses réacteurs.

Plateau nu cerclé de rideaux noirs. Dépouillement maximal. Une femme entre, longue robe noire, gilet rouge, lèvres rouges, visage grave. L’entrée en scène de Coralie Emilion-Languille fera écho à sa sortie, par le même chemin, tout aussi digne et droite, sobre et intense à la fois. Entre les deux, la comédienne nous aura conté l’histoire de Valentina, dont le mari est mort des suites de la catastrophe de Tchernobyl. Un « tchernobylien », comme on dit dans le jargon médical. Ce récit est emprunté à l’un des livres de Svetlana Alexievitch, prix Nobel de littérature en 2015. La Supplication est une série de témoignages dont le sous-titre dit clairement le contexte : Tchernobyl, chronique du monde après l’apocalypse.

Une voix solitaire est le premier, celui qui ouvre le prologue. Celui que Coralie Emilion-Languille choisit d’adapter librement en monologue face public. Sans décor, sans accessoire, sans soutien aucun. Seule au milieu du plateau, comme cette femme, plantée au milieu de sa vie, debout malgré le drame, verticale dans la détresse. Avant que les premiers mots ne sortent, elle ose un temps de silence, elle s’offre ce sas, avant de s’accrocher aux mots pour se dire, dire la mort et dire l’amour, dire l’amour dans la mort et la mort dans l’amour. Valentina Tchernobyl, née pour l’amour n’est pas un drame romantique à la russe, pas un roman à l’eau de rose qui finit dans les pleurs, rien de tout cela.

C’est un texte qui s’ancre avant tout dans le réel et le vécu, la catastrophe nucléaire de Tchernobyl en 1986, qui s’ancre dans une vie en particulier, une famille, un couple, l’existence d’une femme coupée en deux par l’agonie lente et insoutenable de son mari. Aucun pathos en vue, l’interprétation de Coralie Emilion-Languille avance sur le fil du récit et de l’émotion. Elle ne cède jamais au désespoir, tout comme Valentina ne cède pas aux larmes, elle transmet. « J’avais envie de parler à quelqu’un, mais pas aux gens », dit-elle en préambule, et son sourire est celui qu’on appelle « la politesse du désespoir ». À moins qu’il ne soit la conséquence des souvenirs heureux qui remontent à la surface.

Car si le texte dit la déchéance et la maladie, ce qu’il évoque par-dessus tout, et contre toute attente, c’est le lien de ce couple uni et amoureux. Ce qui s’exprime entre les mots, c’est la force d’être deux, partenaires de quotidien, d’épreuves, de parenthèses salutaires. Ce qui s’exprime ici c’est le courage d’une femme dévouée à son mari, mais pas soumise, mue par un sentiment immense qui la pousse à ne rien lâcher, à tenir jusqu’au bout. Ce que peut être un couple, ce que signifie vivre ensemble, s’attendre, se retrouver, s’épauler, Valentina le traverse et c’est la vie qu’elle invite dans l’ici et maintenant de la confidence.

Sur le visage de l’actrice, on vit en direct le flux des étapes, l’avant, l’après, la volonté farouche d’aider, d’accompagner, de soigner. Dans son regard, on lit la trajectoire des souvenirs qui surgissent, comme des bouées auxquelles s’accrocher quand le corps de l’être aimé se meurt à petit feu sous ses yeux. Et sous ses mains, c’est le corps de l’autre qui se dessine dans le vide du plateau, dans l’absence physique du disparu. Coralie Emilion-Languille l’a bien compris : le théâtre a à voir avec la réparation, la disparition et l’apparition. Il traite avec les fantômes de nos vies et prendre la parole en public pour réveiller la voix d’une autre s’apparente à un devoir de mémoire, autant qu’à un hommage à la puissance vitale des rescapés.

Marie Plantin – www.sceneweb.fr

Valentina Tchernobyl, née pour l’amour
d’après Svetlana Alexievitch
Mise en scène Coralie Emilion-Languille, avec la collaboration de Laure Roussel
Avec Coralie Emilion-Languille
Lumières Moira Dalant
Scénographie Laure Montagné

Collaborations artistiques Michel Bulteau, Paula Brunet Sancho

Production Honorine Productions ; Cyril Dauvers

Durée : 1h

Vu en juillet 2023 au Théâtre des Béliers, dans le cadre Festival Off d’Avignon

La Scala Provence, dans le cadre du Festival Off d’Avignon 2025
du 7 au 21 juillet, à 11h

11 juillet 2023/par Marie Plantin
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