A l’Opéra de Dijon, le très inventif metteur en scène Barrie Kosky et la cheffe Emmanuelle Haïm font souffler un vent de fraîcheur sur Les Boréades de Rameau.
Après un émouvant Castor et Pollux présenté en 2014, le directeur de la Komische Oper de Berlin retrouve Rameau et la scène lyrique dijonnaise qui l’a révélé en France pour une nouvelle production des Boréades. La dernière pièce du compositeur est une œuvre étonnamment pleine de jeunesse et d’innocence, ce dont rend formidablement compte le beau travail accompli par Barrie Kosky.
Il met en scène la pièce à la fois comme un jeu et comme une expérience. Les amoureux que sont Alphise et Abaris, contrariés par des vents contraires à leurs sentiments, y figurent comme les jouets des Dieux, cernés par une grand cube qui s’ouvre de façon intermittente grâce au souffle divin, et présentés insolemment, comme à l’écart du monde, dans un état originel à partir duquel ils seront mis à l’épreuve de la séparation et de la destruction. Sous des lumières en clair-obscur, la scène est d’abord une lande virginale, puis devient champ de ruines fumantes avant de se revêtir de la fine pluie dorée d’Apollon.
Des Boréades, Robert Carsen signait au début des années 2000 une version de référence. On y voyait défiler l’œuvre au gré des saisons et de spectaculaires tableaux esthétisants. Dans un dispositif beaucoup plus dépouillé, le spectacle de Kosky, très poétique également et intelligemment plus concentré sur les transports et les tourments humains, réussit à capter l’attention de bout en bout. Tout y est léger et profond, plein de naturel, de beauté, de cruauté et de sensibilité.
Hélène Guilmette, toute en suavité et en tempérament, et Mathias Vidal, au chant clair et nuancé d’une splendeur éclatante, offrent une très belle incarnation des passions et afflictions qui irriguent les sentiments de leur personnage. Ils sont chacun accompagnés par leurs “suivants” dont les rôles auprès d’eux ne manquent pas d’ambiguïté. En combinant plusieurs figures féminines secondaires qu’en apparence, Emmanuelle de Negri, campe l’amour personnifiée qui apparaît en petit cupidon tendance Charleston. Elle réussit un alliage parfait de fraîcheur vocale et d’alacrité scénique. L’Adamas / Apollon d’Edwin Crossley-Mercer est quant à lui d’une classe folle.
L’intensité du jeu, toujours physique et concret chez Barrie Kosky est doublée de l’énergie bondissante d’une myriade de six danseurs dans un style libre, sauvage, coquin. Le chœur, excellent, se prête aussi à la danse. A la tête de son Concert d’Astrée, la dynamique cheffe Emmanuelle Haïm dirige un Rameau de caractère, joyeux, élégiaque, déchaîné. Une vivacité et une variété insolentes caractérisent sa direction. Musique, théâtre, danse, chant semblent portés par les meilleurs vents.
Christophe Candoni – www.sceneweb.fr
Les Boréades
SPECTACLE EN FRANÇAIS SURTITRÉ
NOUVELLE PRODUCTION DE L’OPÉRA DE DIJONMUSIQUE Jean-Philippe Rameau
LIVRET Louis de Cahusac
ORCHESTRE ET CHŒUR DU CONCERT D’ASTRÉE
DIRECTION MUSICALE Emmanuelle Haïm
ASSISTANAT À LA DIRECTION MUSICALE Atsushi Sakai
CHEF DE CHANT Benoît HartoinMISE EN SCÈNE Barrie Kosky
ASSISTANAT À LA MISE EN SCÈNE David Merz & Emily Hehl
DÉCORS ET COSTUMES Katrin Lea Tag
PERRUQUES Pascal Jehan
MAQUILLAGE Marion Bidaud
LUMIÈRES Franck Évin
CHORÉGRAPHIE Otto Pichler
ASSISTANT DÉCORS Victor Labarthe d’ArnouxAVEC LE MÉCÉNAT du Crédit Agricole de Champagne-Bourgogne
DISTRIBUTION
ALPHISE Hélène Guilmette
SEMIRE, POLYMNIE, CUPIDON, NYMPHE Emmanuelle De Negri
ABARIS Mathias Vidal
BORÉE Christopher Purves
BORILÉE Yoann Dubruque
ADAMAS, APOLLON Edwin Crossley-Mercer
CALISIS Sébastien DroyDANSEURS Yacnoy Abreu Alfonso, Julie Dariosecq, Benjamin Dur, Anaëlle Echalier, Lazare Huet, Anna Konopska
COPRODUCTION
Opéra de Dijon
Komische Oper BerlinOpéra de Dijon
MARS 2019
vendredi 22 à 20h00
dimanche 24 à 15h00
mardi 26 à 20h00
jeudi 28 à 20h00
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