« Ça dada », d’Alice Laloy (Molière du Meilleur spectacle Jeune public 2011) va poursuivre sa tournée pendant la saison 19/20. Une « fête joyeuse » où trois comédiens vont partir en quête d’« un acte de vraie création ». Une promesse au langage fou qui s’inscrit, par la volonté, dans la continuité de ce mouvement radical du début du XXe siècle.
Comment parler du dada ? Comment figurer ce mouvement artistique des années 1920 qui, plus que tout autre, avait pour volonté d’être dans l’instant présent ? Il nous reste les œuvres picturales de Francis Picabia, les readymades de Marcel Duchamps et quelques textes de Tristan Tzara. Pour les hommages contemporains, on retiendra l’une des scènes les plus drôles de Marguerite de Xavier Giannoli, où Catherine Frot, l’héroïne, chante (faux !) La Marseillaise dans un cabaret, des images de guerre projetées sur sa robe, pendant qu’un homme proclame la fin de la civilisation avant de détruire un piano à la hache. Donc au théâtre, le dada est-ce ça ?
Un riche ouvrage d’Henri Béhar, Le Théâtre dada et surréaliste, dont la première édition est parue dans les années 1960, regroupait des monographies sur les représentations dadaïstes. Le premier élément qui en ressort, est la recherche intransigeante d’une totale liberté par les artistes pour s’adresser à leur public. Il n’y a aucune barrière entre eux et les spectateurs, on les invective, les inclut au délire créateur. Dans une époque troublée où la Grande Guerre détruit l’Europe, les Dada détruisent les conventions.
La production dramatique (si l’on peut la qualifier ainsi dans ce monde sans règles), aime à se développer sous la forme de cabarets. Du Cabaret Voltaire, à Zurich à la salle Gaveau à Paris, pour le festival dada qui s’y est tenu en 1920, sans oublier le théâtre Michel qui accueille un autre lot de performances folles en 1922. Ces moments sont de tous les arts, tout en revendiquant n’être d’aucun. A cette époque, André Breton partage la scène avec Francis Picabia sur la scène du Palais des Fêtes de la Rue Saint-Martin. Pendant que Picabia peint, Breton efface l’œuvre avec une éponge !
Fait intéressant, les dadas voient en Ubu roi, d’Alfred Jarry (1896), le premier texte de leur mouvement. Cependant, le désir d’instantané et le parti pris radical de vouloir coller à une époque font que, aujourd’hui, il n’y a pas de quelconque répertoire dada au théâtre. Alors peut-être qu’il faut aller chercher dans les mouvements successeurs à cette folie, le surréalisme et l’absurde, pour tenter d’avoir une idée, même vague, des mots et des ambiances qui ont fait des dadaïstes un groupe d’artistes libres, anarchistes, qui inspire tous les fous créateurs d’aujourd’hui ?
Hadrien Volle – www.sceneweb.fr
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